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Humanisme : le Contrat social
16 août 2020

Insomnie II (Stephen King).

3

Ralph et Lois furent fascinés par un univers chatoyant de couleurs inconnues et de formes jamais vues dès qu'ils entrèrent dans l'hôpital. Lois lui demanda si ces formes étaient vivantes. Ralph le pensait. Il pensait que les auras étaient vivantes aussi mais pas dangereuses. Ralph pensait que le hall de l'hôpital était comme un somptueux feu d'artifice du 4 juillet dans lequel les êtres humains tenaient le rôle des chandelles romaines et des fontaines chinoises. Ralph regarda la réceptionniste qui était plongée dans une aura d'un orange trouble. Il en conclut qu'elle devait adorer toutes les formalités. Il lui expliqua qu'ils voulaient voir Jimmy Vandermeer. Mais elle refusa car il fallait un laissez-passer spécial. Alors il insista et la réceptionniste consulta son ordinateur. Mais Ralph n'avait pas envie d'attendre et il saisit la femme au poignet avant qu'elle ait eu le temps de retirer sa main. Il serra doucement et sentit un petit jaillissement de force passer de lui à la femme. L'aura de la femme adopta la teinte turquoise délavé de Ralph. Elle obtempéra quand Ralph lui demanda deux laissez-passer. Ralph comprit qu'il pouvait probablement faire tout ce qu'il voulait à cette râleuse car il avait les batteries chargées à bloc. Mais lui et Lois disposaient d'une énergie qu'ils avaient volée. Elle leurs donna les deux laissez-passer en leur souhaitant une agréable visite. Lois trouvait cela merveilleux mais Ralph savait que lorsqu'arriverait la facture pour quelque chose qui faisait une impression aussi merveilleuse, il y avait des chances pour qu'elle soit fichtrement salée.

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Ralph remarqua un bébé qui avait le cerveau endommagé. Il s'en était rendu compte car la couleur de l'aura du bébé était jaune. Lois pouvaient communiquer avec Ralph par la pensée. Ralph pouvait saisir la pensée de la mère du bébé. Ralph et Lois ne comprenaient pas ce qui leur arrivait. La mère du bébé regarda Ralph avec inquiétude. Ralph sentait qu'elle l’avait entendu penser à son bébé. Le panache du nourrisson était différent de tous ceux que Ralph avait vus jusqu'ici. Il était laid et réduit à un chicot. La mère du bébé lui fit un reproche. Cela effraya Ralph alors il lui présenta ses excuses de manière télépathique. Ralph avait compris ce qui était arrivé au bébé. Le père du bébé l'avait jeté contre le mur. La mère le savait mais elle n'avait rien dit. Lois se mit à pleurer. Ralph lui demanda si elle trouvait toujours que c'était un monde merveilleux. Mais elle ne répondit pas.

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Ralph se rappelait de tout ce qu'il avait vécu durant les derniers jours de Carolyn. Cela le fit pleurer. Il se rappela que quand Carolyn venait de mourir, une infirmière l'avait pris dans ses bras. Lois lui demanda de regarder par terre. Le sol était couvert de multiples couches d'empreintes de pas de toutes les couleurs. Deux séries de pas se détachaient nettement des autres. Elles étaient d'un vert mordoré avec quelques particules rougeâtres. C'étaient les traces de pas des deux docs chauves.

Chapitre 17.

1

Il se produisit un événement très étranger plutôt effrayant. L'univers qu'ils avaient devant eux se mit à saigner blanc et les portes donnant sur les chambres s'agrandirent. Puis la perspective redevint normale mais les objet paraissaient mystérieusement plus épais. Les auras étaient toujours là. Ralph se rendit compte qu'il pouvait voir derrière les paroisses s'il le voulait. Il pouvait aussi entendre le froufrou produit par un collant qu'une infirmière rajustait dans les toilettes du personnel ; des battements de coeur ; la circulation du sang dans des artères et le reflux soyeux de respirations. Lois ressentaitla même chose que lui. Ils aperçurent Bill en train de discuter avec un ami qui était entouré d'une aura couleur prune. Ralph eut l'impression qu'elle ne trahissait qu'une affection bénigne. L'aura de Bill était totalement noire. Ralph dut fermer les yeux un instant pour s'empêcher de hurler et lorsqu'il les rouvrit, Lois n'était plus à ses côtés.

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Lois s'était précipitée vers Bill et Ralph lui courut après. Par la pensée, il lui ordonna de ne pas prévenir Bill de sa mauvaise santé. Mais Loi tendit sa main pour attraper l'épaule de Bill. L'aura de Lois se métamorphosa sur-le-champ, passant du gris-bleu piqueté d'étincelles roses à un rouge aussi rutilant que celui d'une voiture de pompiers. Alors elle poussa un hurlement intérieurement et retira sa main. Elle fit demi-tour pour s'enfuir. Ralph la rattrapa. Bill ne s'était rendu compte de rien. Il était en train de parler du livre que Bob avait écrit sur la guerre de sécession avec son ami. Lois avait vu des choses dans l'organisme de Bill. Ces choses s'étaient rendues compte de la présence de Lois. Ralph avait vu la main de Lois passer à travers le corps de Bill. Ralph tranquillisa Lois. Ralph partit à la rencontre de Bill et de son ami. Lois voulut l'en empêcher. L'ami de Bill passa à travers lui. L'aura de Ralph se confondit avec celle de l'homme. Immédiatement, il sut tout ce qu'on pouvait savoir sur lui. L'homme entendit un bruit comme si quelque chose avait explosé. Mais il continua sa conversation avec Bill. Lois et Ralph allèrent voir Bob. Le panache de Bob était encore intact. Cela voulait dire que Bob avait encore de la ressource. Lois montra les empreintes des docs chauves à Ralph. Les docs avaient sauté la chambre 313 mais ils s'étaient engagés dans la suivante, celle de Jimmy. Chapin était dans la chambre de Jimmy. Les deux petits docteurs chauves se tenaient au pied du lit de Jimmy. Ralph remarqua que leurs yeux brillaient d'intelligence et d'une vive conscience. Ils se tournèrent vers Lois et Ralph et leur sourirent. Le premier doc tenait les ciseaux dans sa main droite. Doc chauve 2 fit un pas en avant vers eux et leur adressa une petite courbette comique.

3

Lois demanda aux deux docs qui ils étaient. Ils répondirent qu'ils n'avaient pas de nom mais ils autorisèrent Lois et Ralph à les appeler en se servant des noms des Parques. Le doc aux ciseaux se présenta donc sous le nom de Clotho et présenta son collègue sous le nom de Lachésis. Ralph ne pensait pas que les docs avaient des intentions hostiles. Ils avaient des auras d'un éclat fabuleux.

Les docs voulurent savoir les noms de leurs interlocuteurs. Lois était étonnée qu'ils ne les sachent pas déjà. Ils répondirent qu'ils en avaient la capacité mais ils préféraient observer les règles de savoir-vivre des humains qu'ils appelaient les michrones. Alors Lois se présenta et présenta Ralph. Puis elle leur demanda des explications. Ralph était très en colère. Cette rencontre ne devait rien au hasard. Elle était prévue depuis le début. Il demanda aux docs pourquoi Faye ne pouvait pas les voir. Ainsi que Bill et son ami. Il demanda également pourquoi l'ami de Bill avait pu lui passer au travers. Clotho lui expliqua que les humains visaient aux deux premiers étages d'un édifice avec des ascenseurs qu'ils n'avaient pas le droit d'emprunter. Ralph comprit que les docs les avait fait monter dans l'ascenseur ou par l'escalier de secours en les privant de sommeil. Ralph Lohr demanda s'ils étaient des anges et ils répondirent que ce n'était pas le cas. Ralph se moqua deux en parlant de Dieu et du diable. Il imaginait que Dieu était en de l'immeuble et le diable au sous-sol. Lois tira sur la manche de Ralph mais il l'ignora. Il supposait que les deux docs leur avaient donné le rôle d'interpeller doc chauve 3. Mais il leur dit d'aller se faire foutre. Lois éclata en sanglots alors Ralph regretta son coup d'éclat. Lachésis comprenait la colère de Ralph mais ne la trouvait pas justifiée. Il leur dit qu'il n’était pas encore temps de répondre aux questions. Il ordonna à Ralph et Lois d'observer ce qui allait se passer pour apprendre et savoir.

Clotho passa à la gauche du lit et Lachésis s'en approcha par la droite. Chapin fut soudain atteint d'une quinte de toux. Clotho et Lachésis se penchèrent sur Jimmy. Leurs deux visages rayonnaient d'amour, de bonté, de douceur et leurs auras se confondirent au-dessus de la poitrine de Jimmy qui, soudain, ouvrit les yeux et sourit. Chapin sursauta. Jimmy pouvait voir Lois et Ralph et il le dit à Chapin. Jimmy referma les yeux et Lachésis prit son visage à deux mains. Au même moment, Clotho se pencha un peu plus, ouvrit ses ciseaux et les présenta de manière à prendre le panache noir de Jimmy entre les lames. Quand il coupa le panache de Jimmy, Lachésis se pencha et déposa un baiser sur le front de Jimmy. Le linceul qui entourait Jimmy devint momentanément d'un blanc éclatant puis s'évanouit. Faye comprit que son ami venait de mourir et quitta la chambre. Clotho dit à Ralph et à Lois que ce qu'ils faisaient, ils le faisaient avec amour et respect. Ils se voyaient comme les médecins de l'ultime recours. Ralph comprenait mais se demandait pourquoi cela leur donnait le droit de faire vivre un véritable enfer aux gens. Ils quittèrent la chambre. Ralph eut le temps de goûter l'aura des petits docteurs chauves. Elle avait un goût de pomme douce et la texture d'une écorce sèche et légère.

4

Ralph et Lois rejoignirent doc chauve 1 et doc chauve 2 devant la chambre de Bob. Lois demanda aux deux docs s'ils pouvaient faire quelque chose pour Bill qui était malade. Ils secouèrent la tête à l'unisson. Clotho expliqua que rien ne pouvait être changé. Bill appartenait déjà à Atropos. Mais même Atropos ne pouvait savoir quand Bill mourrait. Atropos était un agent de l'Aléatoire. Clotho et Lachésis prirent Ralph et Lois par la main et les emmenèrent au service de pédiatrie. Ils traversèrent des murs et des gens ce qui effrayait toujours Ralph et Lois. Ils arrivèrent à l'intérieur d'un bureau dans lequel se trouvaient deux médecins. Puis ils se retrouvèrent sur le toit. Ralph pensa que se retrouver à cet endroit et voir la ville dans la nuit rachetait tout ce qu'il avait vécu depuis qu'avaient commencé ses insomnies. Ralph demanda aux deux docs de tout leur expliquer. Clotho leur expliqua que les événements que Ralph et Lois avaient vécus n'étaient pas à proprement parler surnaturels. Clotho et Lachésis ainsi qu’Atropos faisaient ce qu'ils étaient programmés pour faire. Ce que Ralph appelait la liberté de choix était appelé le ka par Lachésis. Selon Clotho, la Bible était une excellente manière de présenter les choses.

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Clotho commença ses explications qui durèrent longtemps. Par moments, il n'y avait aucun mot dans ce qu'il disait. Les termes étaient remplacés par de simples images brillantes. Ralph supposa qu'il s'agissait de télépathie. Parfois les images et les mots étaient interrompus par des blancs mais Ralph arrivait en général alla se faire une idée de ce que Clotho essayait de leur communiquer et Lois comprenait encore mieux ce qui se cachait dans ces pauses. Clotho leur expliqua qu'il n'y avait que quatre constantes dans l'ère d'existence. Il y avait la vie, la mort, l'intentionnel, l'aléatoire. Clotho et Lachésis étaient des agents de la mort. Ils étaient aussi des agents de l'intentionnel. Il y en avait parmi les michrones (humains) qui croyaient que tout arrivait par nécessité et d'autres qui pensaient que les événements n'étaient qu'une question de hasard ou de chance. Mais la vérité était que la vie était à la fois aléatoire et intentionnelle mais pas dans des proportions égales. La vie était semblable à un jeu de cartes dans lequel Atropos était le joker. C'était l'agent de l'aléatoire. En général, le passage du temps était fixé. Les auras servaient d'horloge. Loi leur demanda si leur travail était la mort naturelle. Mais Lachésis expliqua que la mort naturelle n’existait pas réellement. La tâche de Clotho et Lachésis était la mort intentionnelle. Clotho expliqua que quand l’aura se métamorphosait la personne mourrait. Lois voulut savoir ce qui se passait après. Clotho expliqua que les michrones étaient envoyés dans d'autres mondes. L'autre monde était un mystère pour Clotho et Lachésis. La ville après la mort n'avait aucune place parmi les quatre constantes. Les auras de ceux qui devaient connaître une mort intentionnelle devenaient grises au moment où la fin se rapprochait et ce gris virait progressivement au noir. Clotho et Lachésis délivraient ceux qui souffraient et donnaient le repos à ceux qui ne pouvaient le trouver. La plupart des morts intentionnelles étaient attendues mais pas toutes.

Atropos servait l'aléatoire. Toutes les morts que les michrones appelaient idiotes, inutiles ou tragiques étaient souvent leur oeuvre. Lorsqu'un bébé mourait dans son berceau sans raison apparente, Atropos et son scalpel rouille y étaient souvent pour quelque chose. Lois demanda si c'était ce qui était arrivé à Rosalie. Clotho lui confirma qu'Atropos était arrivé à Rosalie avec Plussaj comme agent opérant. Atropos s'était également occupé de Bill. Ralph et Lois venaient donc d'apprendre la mort de leur ami. Lachésis était désolé de leur donner cette nouvelle d'une manière aussi maladroite. Ralph demanda aux docs chauves de leur montrer et Lois surenchérit. Alors Lachésis créa une représentation minuscule du couloir des soins intensifs. Lois et Ralph virent leur ami Bill mourir d'une crise cardiaque. Ralph comprit que les docs étaient peut-être des créatures surnaturelles mais pas omniscientes ni omnipotentes.

En effet, les docs regardaient Bill s'effondrer avec effarement. Ralph pensa soudain aux boucles d'oreilles de Lois dont s'était emparé le doc chauve 3. Cela le mit en colère. Lachésis avait déclaré que les morts accidentelles n'existaient pas et cela incluait donc celle de Bill. Ralph était persuadé qu'Atropos s'en était pris à Bill pour une seule raison : punir Ralph de s'être mêlé de ses affaires. Lachésis lui dit qu'il sautait trop vite aux conclusions. Ralph dit qu'Atropos savait que Ralph et Lois pouvaient le voir. Les yeux de Lois s'agrandirent sous l'effet de la terreur et de la compréhension.

Chapitre 18.

1

Clotho et Lachésis étaient terrorisés. Ralph avait décroché et Lois lui avait demandé d'une voix lointaine ce qu'il faisait. Puis Ralph était revenu en ordonnant aux docs chauves de jouer franc jeu cette fois. Lachésis et Clotho reconnurent qu'il n'avait pas mentionné la possibilité qu'Atropos avait une compréhension légèrement meilleure de la situation qu'eux-mêmes. En temps normal, Lachésis et Clotho n'intervenaient pas dans ce que faisait Atropos et Atropos n'intervenait pas dans ce qu'ils faisaient. Lachésis et Clotho ne pouvaient interférer avec Atropos car l'aléatoire et l'intentionnel étaient comme les cases blanches et noires d'un échiquier. Mais Atropos cherchait à interférer avec la manière dont fonctionnent les choses. Les efforts pour contrer ses interventions étaient rares.

Mais Lachésis reconnaissait qu’Atropos avait coupé un cordon vital auquel il aurait mieux fait de ne pas toucher. Il avait provoqué ainsi un sérieux déséquilibre entre à l'intentionnel et l'aléatoire.

En fin de compte, seuls les michrones pouvaient s'opposer à Atropos. C'est pour cela que Lachésis et Clotho avaient fait venir Lois et Ralph. Clotho expliqua à lois que certaines vies n'avaient pas de définition précise. Lorsque Atropos s'en prenait à elles, il fallait toujours s'attendre à des ennuis. Comme Atropos avait commis une erreur quelqu'un ou quelque chose avait demandé un temps mort. Lois demanda si c'était son mari. Lachésis acquiesça. Ralph ne pensait pas que c'était les docs qui avaient lancé l'alerte. Il leur dit qu'il les considérait comme des seconds couteaux. Lachésis le reconnut. Lachésis confirma qu'Atropos avait bien coupé le cordon vital de Deepneau. Deepneau était devenu indéfini. Il n'appartenait ni à l'aléatoire ni à l'intentionnel. Lachésis pensait que Deepneau devait avoir un maître cordon pour provoquer autant d'agitation et d'inquiétude. Le seul fait qu'il ait vécu aussi longtemps après la coupure suffisait d'indiquer son pouvoir et son importance. Lorsqu’Atropos avait coupé le cordon, il avait mis en branle un terrible enchaînement d'événements. Lachésis expliqua à Lois et Ralph qu'ils étaient des simples messagers. Leur tâche était de leur faire prendre conscience à tous les deux de ce qui se passait et de ce que l'on attendait d'eux. Lachésis et Clotho ne savaient pas qui avait sonné l'alerte rouge. Clotho leur expliqua qu'au-delà du niveau d'existence des michrones et des machrones sur lequel Lachésis, Atropos et lui-même existaient, il y avait d'autres niveaux. Dans ces niveaux il y avait des pantachrones qui étaient éternels. Michrones et machrones vivaient dans des sphères d'existence qui se superposaient dans un bâtiment commun. Au-dessus d’eux, Lachésis et Clotho savaient qu'il existait d'autres entités extraordinaires ou hideuses. C'était l'intentionnel supérieur et l'aléatoire supérieur. Lachésis et Clotho pensaient que quelque chose de ces hautes sphères s'était intéressé à Deepneau et que quelque chose d'autre de ces mêmes sphères avait lancé une contre-attaque. La contre-attaque, c'était Ralph et Lois. Lois leur demanda comment ils avaient fait pour les amener à ce niveau elle et Ralph. Lachésis répondit que c'était par le biais de l'insomnie. Ils avaient effectué une modification des auras de Ralph et de Lois. Ralph leur demanda qui était le roi pourpre. Clotho répondit que le roi pourpre devait exister sous une forme ou une autre et Deepneau était tombé directement sur ce roi pourpre quand Atropos avait coupé son cordon vital. Ralph comprit que les de docs étaient terrifiés.

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Clotho leur conseilla de ne pas se laisser détourner par Atropos et de le considérer comme un simple pion sur l'échiquier. Ce n'était pas réellement Atropos qui s'opposait à eux. Mais Ralph et Lois ne devaient pas non plus approcher Atropos directement. Mais même en restant loin d'Atropos, Lois et Ralph seraient capables d'empêcher la chose terrible qui était sur le point de se produire.

Loi demanda ce qui allait se produire. Lachésis il leur expliqua qu'ils ne devaient pas s'approcher de Deepneau qui avait obtenu de grands pouvoirs. Le simple fait de l'approcher ferait courir à Ralph et à Lois le risque d'une visite de l'entité que Deepneau avait baptisée le roi pourpre. Lachésis leur fit comprendre que Deepneau était parti sur la côte. Lachésis leur expliqua qu'ils devraient peut-être se servir de leurs pouvoirs pour accomplir leur tâche. Lois accepta la mission à condition qu'il ne soit pas question de faire de mal à qui que ce soit.

Ralph, quant à lui, se sentait capable de faire du mal à quelqu'un, si c'était pour récupérer les boucles d'oreilles de Lois. Lois demanda si Ralph n'était pas en danger, lui aussi. Elle voulait savoir si Atropos avait pris un objet personnel de Ralph. Les deux docs la rassurèrent. Clotho leur expliqua ils avaient passé leur vie comme partie intégrante de l'intentionnel mais que cela avait changé depuis qu'ils avaient commencé à voir les auras. Lachésis avoua qu'ils avaient attiré Ralph et Lois tout en sachant que celle altérerait leur ka. Mais la situation l'exigeait. Lois demanda quels étaient leurs pouvoirs et Lachésis lui montra ce qu'ils avaient fait avec leurs mains quand ils avaient envoyé des rayons. Mais Ralph avait peur de ne pouvoir le faire chaque fois alors Clotho lui expliqua que lui et Lois se tenaient tous les deux à côté d'une réserve de puissance illimitée. Lachésis leur montra les différents moments où ils avaient capté l'énergie vitale de leur entourage. Mais Ralph ne voulait pas continuer à faire cela. Il ne voulait pas être comme un vampire. Mais Lachésis le rassura. Selon lui on ne pouvait pas vider l'Atlantique avec un seau et il en était de même avec l'énergie vitale. Ralph leur demanda ce qu'il devait arrêter. Il comprit que c'était Susan Day que Deepneau avait l'intention de tuer. Clotho leur expliqua que Deepneau avait l'intention de tuer toutes les personnes qui viendraient voir Susan Day.

Lachésis dit à Ralph et Lois qu'ils étaient les seuls à pouvoir l'en empêcher.

3

Ralph pensait que Derry avait un côté mauvais et quand ses habitants étaient un peu trop remontés, il leur arrivait de commettre des actes excessivement horribles. Lois était horrifiée. Elle demanda aux docs chauves comment ils voulaient qu'elle et Ralph arrêtent quoi que ce soit sans pouvoir approcher Atropos et Deepneau. Ralph proposa de téléphoner pour annoncer un attentat à la bombe. Lachésis lui dit que ça marcherait pas. Il ordonna de retourner tout de suite en bas. Clotho leur expliqua qu'il y avait déjà eu des alertes à la bombe et la police avait passé tout le centre municipal au peigne fin. Lachésis leur conseilla d'empêcher la manifestation d'avoir lieu en convaincant Susan de l'annuler. Il leur fallait donc intercepter Susan. Clotho leur demanda de ne pas les décevoir. Ralph ferma les yeux et se concentra sur le retour dans le monde des michrones.

Chapitre 19.

1

Ralph se sentait manipulé et vulnérable. Il serra Lois dans ses bras. Il supposait que Deepneau avait planqué une bombe et que les chiens renifleurs ne l'avaient pas encore trouvée. Lois demanda à Ralph si les docs leur avaient pas menti. Ralph ne le croyait pas.

2

En descendant du toit, Ralph et Lois se retrouvèrent dans une salle de l'hôpital où se trouvait une télévision. Il y avait un reportage sur Susan Day. Dalton était interviewé. Ralph remarqua que Dalton avait l'air mortellement effrayé. Dalton affirmait qu'il n'y aurait pas de violences.

Quand le journaliste lui demanda des nouvelles de Deepneau, Dalton fut interloqué et prétendit que Deepneau ne faisait plus partie des Amis de la Vie.

Dalton prétendait ignorer où se trouvait Deepneau.

Ralph pensa que si Dalton avait la frousse, lui-même était terrifié. Le journaliste raconta que les agents de la sécurité privée avaient trouvé des centaines de cartes éparpillées sur les pelouses entourant le centre municipal. Elles avaient été jetées d'une Cadillac marron. Sur ces cartes était écrit : « si vous avez un revolver avec seulement deux balles et que vous vous trouvez dans une pièce avec Hitler, Staline et un avorteur, que faites-vous ? ». La réponse était écrit de l'autre côté : « vous tirez deux fois sur l'avorteur ».

3

Ralph et Lois étaient affamés. Ils n'avaient pas mangé depuis plusieurs jours car le temps était passé plus vite avec les deux docs. Ralph crut entendre un bruit étrange en provenance du capot de sa voiture. Lois demanda à Ralph ou se trouvait le refus de High Ridge. Il répondit que c'était aux limites de la ville de Newport. Il espérait pouvoir entrer en contact avec Gretchen grâce à ses nouveaux pouvoirs.

4

À la sortie du parking, Ralph et Lois rencontrèrent Trigger Vachon. Trigger avait perdu son emploi à la teinturerie. À présent, il s'occupait du péage du parking. Il ne remarqua pas que le compostage montrait que Ralph et Lois étaient dans le parking depuis presque 60 heures. Trigger se rappela l'incident entre Deepneau et le gros balèze. Il trouvait que Ralph avait rajeuni. Il voulait dire quelque chose à Ralph à propos de cet incident mais il ne savait plus quoi.

5

Devant  le WomanCare, il n'y avait qu'un seul vigile et aucun manifestant. Le vigile scruta la voiture de Ralph et écrivit quelque chose sur son bloc-notes. Lois dit au vigile qu'elle avait besoin de parler à la standardiste. Le vigile accepta de les laisser entrer. Ils rencontrèrent une femme enfouie dans une aura bleue foncée tachetée de points noirs malsains qui les regarda avec un air soupçonneux. Puis ils croisèrent la nièce de Simone Castonguay au milieu d'une aura d'un vert végétal beaucoup plus saine que celle de la femme de ménage. Lois avait remarqué que Barbara Richards avait une main à proximité d'un petit bouton blanc. Elle appuierait en cas de danger. Lois utilisa la télépathie pour l'expliquer à Ralph. Barbara se rappela avoir connu Lois qui avaient été la partenaire de bridge de sa tante. Loi prétendit que c'était Simone qui l'envoyait et qu'elle avait un message pour Gretchen. Elle donna un papier à Barbara. Barbara promit de mettre ce message dans le casier de Gretchen. Alors Lois saisit Barbara au poignet et un éclair de lumière verte bondit vers le bras de la femme et pénétra en elle. La femme de ménage entendit un bruit à ce moment-là. Ralph lui expliqua que cela venait d'une voiture qui avait pétaradé. Loi insista pour voir Gretchen et Barbara lui dit qu'elle n'était pas là. Alors Lois lui demanda comment la joindre tout en lui assurant qu'elle et Ralph n'avaient pas l'intention de faire le moindre mal à Gretchen. Puis, loi toucha de nouveau la main de Barbara. Elle lui demanda où se trouvait High Ridge et Barbara lui répondit. La femme de ménage voulut s'interposer alors Ralph lui saisit le bras et elle se calma tout de suite. Lois dit à Barbara qu'elle n'aurait pas besoin de se souvenir de ce qui venait de se passer. Loi ramassa le bout de papier qui lui avait échappé lorsqu'elle avait saisi le poignet de Barbara. Avant de partir, Ralph demanda à Lois ce qu'il y avait sur le bout de papier et elle lui répondit que c'était sa facture d'électricité.

6

En sortant, Ralph et Lois croisèrent le vigile qui leur annonça qu'une douzaine de vigiles serait présents entre midi et minuit. Ralph lui répondit qu'il espérait que tout se passerait bien.

Ralph félicita Lois. Ils approchaient du parking de l'hôpital lorsque Trigger sortit de sa guérite en agitant les bras. Ralph comprit que rien n'arrivait par hasard et que l'intentionnel répliquait et mettait le paquet. Trigger tendit à Ralph une carte sur laquelle il avait recopié les idéogrammes que Ralph lui avait dessinés parce qu'il les avait vus sur le foulard de Deepneau au moment de l'incident avec le gros balèze. Trigger les avait recopiés sur une carte car il avait déjà vu ces idéogrammes. Son grand frère était dans le Pacifique pendant la seconde guerre mondiale. Il avait ramené un foulard avec les mêmes marques dessus. Le frère de Trigger avait traduit les idéogrammes qui signifiaient : kamikaze.

Troisième partie : le roi pourpre.

Chapitre 20.

1

Le claquement se faisait de nouveaux entendre dans le moteur et Ralph espérait que Lois n'allait pas lui en parler. Lois pensaient savoir où se trouvait Deepneau. Elle pensait qu'il se trouvait dans un hangar d'avion. Lois se mit à pleurer car elle savait ce que signifiait le mot kamikaze : vent divin où pilote-suicide.

2

Ralph ne voulut pas retourner chez lui car il ne voulait pas courir le risque d'être vu par un de ses vieux amis, maintenant que lui et Lois paraissaient avoir 15 et 20 ans de moins que le lundi précédent. Ils s'arrêtèrent pour prendre un petit déjeuner dans un petit établissement. Lois dit à Ralph qu'elle ne pensait pas que ses amies avaient signalé sa disparition car elle savait qu'elle en pinçait pour Ralph depuis des années. Lois profita du restaurant pour se regarder dans la glace des toilettes. Elle n'en revenait pas. Elle avait beaucoup rajeuni. Elle trouvait que Ralph n'avait pas l'air aussi en forme quand il avait 40 ans..

3

Quand il était dans les toilettes, Ralph pensait qu'Atropos pouvait être à leur poursuite. Puis il s'était donné l'ordre d'arrêter de penser à cela. Lois dit à Ralph que la première fois qu'il avait vue Deepneau se comporter bizarrement, celui-ci sortait de l'aéroport. Ils savaient ce qu'il y avait fait à présent. Il avait pris des leçons de pilotage. Lois pensait qu’Atropos était sans doute celui qui avait fait le plus de véritable travail sur Deepneau mais elle pensait qu'Atropos prenait ses ordres bien plus haut. Ralph se demandait comment Deepneau avait pu payer la caution de Pickering en plus de ses leçons de pilotage.

Ralph commanda une omelette au fromage et champignons. Il commanda également un grand verre de jus d'orange, du bacon, des saucisses et une portion de frites. Lois commanda la même chose.

4

Il n'était que 7:10. Ralph et Lois pouvaient espérer obtenir l'annulation du discours de Susan Day en faisant converger leurs lasers mentaux sur Gretchen. Ralph supposait que depuis longtemps le problème de l'avortement tracassait Deepneau. Puis il avait commencé à perdre le sommeil et à entendre des voix. Il avait dû rencontrer Atropos qui était devenu son gourou. Lois pensait qu’Atropos lui avait lavé le cerveau. Ralph pensait que c'était Atropos qui avait donné à Deepneau le foulard. Il pensait également que Deepneau balancerait des explosifs de son avion. Lois pensait qu'Atropos avait fait de Deepneau un missile téléguidé. Ralph pensait que c'est exactement ce qu'étaient les kamikazes pendant la guerre. Ce qui tracassait le Ralph c'était que Clotho et Lachésis leur avaient fait la même chose. Il aurait bien aimé savoir pourquoi. Il pensait que lui et Lois n'avaient pas eu le temps de lire les clauses écrites en petits caractères au bas du contrat et si ça qui lui fichait la frousse. Ils connaissaient leur mission mais ils ignoraient pour quelles raisons Clotho et Lachésis leur avait confié cette mission. C'est de ça que Ralph avait peur. Lois devinait que sauver 2000 vies humaines n'était peut-être pas assez pour Clotho et Lachésis. Ralph avait eu l'impression de ne pas poser les bonnes questions à Clotho et Lachésis. Ralph pensait que Clotho et Lachésis avaient organisé toute la scène de manière à ne plus laisser à Ralph et à Lois le temps de leur poser des questions auxquelles les deux docs n'avaient pas envie de répondre. Ralph pensait que les deux docs chauves avaient cherché à les persuader que toute cette affaire était une sorte de devoir civique où il n’était question que de sauver des vies. Lois demanda à Ralph quelle était la réelle intention de Clotho et Lachésis. Ralph répondit qu'il n'en savait rien.

Lois avait tout de même senti que Clotho et Lachésis étaient bons. Ralph l'avait également senti. Ralph remarqua que la serveuse portait un badge anti IVG. Il en profita pour lui demander si elle irait à la réunion du centre municipal. Elle comptait bien manifester. Ralph remarqua une aura verdâtre qui se répandait de la serveuse. La serveuse leur dit que ce qui l'agaçait le plus chez les pros IVG c'était que c'était les mêmes qui voulaient mettre les armes à feu hors-la-loi pour que les gens arrêtent de s'entre-tuer et qui s'opposaient à la chaise électrique. Elle ne comprenait pas pourquoi ces gens-là pouvaient également soutenir des lois autorisant les docteurs à pratiquer l'IVG. Ralph sentit que la serveuse avait le foie malade. Loi demanda à la serveuse si elle avait des mauvaises intentions à l'égard de Susan Day. La serveuse répondit que si Dieu faisait quelque chose de mal à Susan Day, elle serait la première à applaudir. Mais elle se disait contre la violence. Elle voyait les gens violents comme les jokers de la partie de cartes. La serveuse pensait que Susan Day courait avec les loups et selon elle les femmes qui couraient avec les loups ne devaient pas trop jouer les étonnées quand elles se faisaient mordre.

5

A présent qu'il avait chaud et qu'il était repu, les quatre derniers mois de nuits passées éveillé donnaient à Ralph l'impression d'avoir les paupières lestées de plomb. Lois conseilla à Ralph d'appeler Leydecker. Ralph rejeta cette idée car cela signifiait impliquer Leydecker et risquer d'aggraver encore les choses. Lorsque la serveuse vint poser la note devant lui, Ralph remarqua que son badge anti IVG avait disparu de son tablier. Le serveuse présenta ses excuses. Ralph répondit qu'il ne s'était pas senti offensé. Lois approuva d'un signe de tête.

Le serveuse leur apprit que son groupe aurait une réunion dans l'après-midi à 16:00. Ralph écrivit un mot sur le dessous de plat en papier et laissa un billet de cinq dollars comme pourboire. Lois lut ce que venait d'écrire Ralph. Ralph expliquait à la serveuse qu'elle souffrait d'un problème d'atrophie des fonctions hépatiques et qu'elle devait consulter un médecin. Il lui conseillait également de ne pas approcher du centre municipal dans la soirée.

Lois entreprit d'entrer dans la pensée de la serveuse. Ralph alla payer la note et la serveuse était inquiète. Elle demanda à Ralph pourquoi sa femme n'arrêtait pas de la regarder. Mais Ralph essaya de la convaincre du contraire. Ralph sortit pour rejoindre Lois et se rendit compte qu'il avait oublié son stylo. En allant le chercher, il remarqua que Lois avait laissé en post-scriptum sur le dessous de plat en papier. Lois conseillait à la serveuse d'aller voir son médecin avant qu'il ne soit trop tard car elle savait que le serveuse avait mis au monde un enfant qu'elle avait donné pour adoption.

6

Ralph comprit que Lois avait exploré l'aura de la serveuse. Lois avait eu l'impression de l'avaler tout entière. Loi conseilla à Ralph de prendre un peu plus de force vitale, lui aussi. Ralph démarra la voiture et Lois entendit le claquement. Elle lui demanda ce que c'était. Ralph ne savait pas. Finalement, l'intensité des claquements diminua et Ralph passa une vitesse.

Chapitre 21.

 

Ralph et lois se rendirent à Newport avenue. Il y avait deux adolescents à bicyclette qui s'amusaient à se couper mutuellement la trajectoire. Ils se heurtèrent de plein fouet mais sans se faire de mal. Comme Ralph les regardait, ils lui demandèrent ce qu'il voulait. Ralph inhala une grande bouffée de l'aura d'un des deux adolescents et il se sentit comme Superman dopé aux amphétamines. Lois apporta à Ralph un café mais il lui dit qu'à présent il n'en avait plus besoin.

2

En regardant la nature que l'automne avait enflammée, Lois avait envie de se promener en forêt. Ralph lui répondit qu'ils auraient peut-être l'occasion de le faire un jour. Il lui dit que chaque chose qu'il faisait, il la faisait à la hâte pour pouvoir faire autre chose. Lois trouvait que c'était une idée terrible. Ralph lui répondit que c'était tiré d'un recueil de poèmes intitulé Cemetery Nights. Dorrance le lui avait offert. Lois savait que Dorrance jouait un rôle lui aussi. Elle pensait que Clotho et Lachésis n'étaient pas au courant. Ils virent passer des voitures de police qui roulaient à toute vitesse. Lois eut peur que High Ridge soit déjà en danger car Helen y était avec sa petite. Ralph fixa l'horizon. Il voyait un linceul moins spectrale que l'ombrelle noire obscène dont lui et Lois avaient eu la vision depuis le toit de l'hôpital, au-dessus du centre municipal.

3

Ralph poussa sa vieille Oldsmobile jusqu'à 120 km/h. Des voitures de police les dépassaient. Un flic lui fit signe de repartir. Lois regarda la tache noire qui surmontait la colline avec une expression désespérée. Ralph et Lois ne voyaient plus les auras. Mais la voiture s'arrêta. Le moteur avait calé.

4

Ralph et Lois sortirent de la voiture. Une brise d'ouest assez vif soufflait et ils sentirent une odeur de fumée en provenance de la colline. Il leur restait 400 m à parcourir. Ils entendirent une rafale d'arme automatique et des détonations d'armes de poing. Un hurlement de douleur fit grimacer Ralph et lui donna envie de se boucher les oreilles. Il comprit que c'était la bande de Deepneau qui avait lancé un assaut en règle sur High Ride. Ils entendirent un policier mugir par un porte-voix. Il donna l'ordre à Pickering de les laisser sauver les femmes. Ralph entendit Pickering rire. Lois lui demanda ce qu'il fallait faire. Il répondit qu'il fallait y aller.

5

Ralph et Lois purent voir les auras. Ils entendirent un policier ordonner à Pickering de se rendre car ses amis étaient morts. Ralph et Lois étaient invisibles pour les hommes qui couraient tout autour d’eux. Ils virent le cadavre d'une femme en treillis vert. Ralph se demanda si Susan Day était là-dedans. Mais pour Ralph ce qui comptait c'était que Helen et Natalie se trouvaient presque certainement dans la maison ainsi que d'autres malheureuses femmes impuissantes. Il comprit que Pickering avait balancé des cocktails Molotov dans la maison. Il reconnut Leydecker et Nell. Ralph remarqua quelque chose d'inquiétant dans l'aura de Nell. Le policier était dans un tel état d'excitation qu'il en perdait toute notion de prudence. Ralph hurla à Leydecker de ramener son collègue. Leydecker tendit la main vers le col de Nell mais c'était trop tard. Pickering tua Nell. Lois hurla.

Pickering allait abattre Leydecker mais Ralph envoya une grosse larme bleue qui jaillit du bout de ses doigts pour protéger le policier. Leydecker put retourner dans sa voiture pour appeler des renforts. Lois et Ralph entendirent Helen crier à l'aide. Elle était dans le sous-sol avec les enfants. Ralph et Lois coururent vers la maison.

6

Les policiers continuaient de tirer sur Pickering. Ralph se demandait comment était-il possible qu'il ne soit pas touché. Mais il savait qu'Atropos et Deepneau étaient entourés de forces mauvaises mais protectrices. Il était logique que ces mêmes forces protègent Pickering. Soudain, Ralph se sentit prix de haine pour Pickering. Il demanda à Lois d'aller régler son compte à ce fumier. Ils entrèrent dans la maison en feu.

Chapitre 22.

1

Lois et Ralph passèrent à travers les flammes en éprouvant une impression de fraîcheur. Ils avaient l'impression d'être deux êtres invisibles nageant dans une rivière de feu. Il passait ensemble à travers la porte du salon. Il y avait deux femmes mortes qui avaient été abattues à bout portant. C'était Gretchen et une femme enceinte. Pendant un instant épouvantable, Ralph crut qu'il allait s'évanouir. Il se ressaisit en pensant à Lois qui avait une aura rouge d'indignation. Ralph entraîna Lois dans la pièce voisine qui était la salle de thérapie de groupe. Pickering était accroupi à côté de l'une des fenêtres. Il portait un gilet pare-balles. Ralph ordonna à Lois de ne pas bouger. Elle le supplia de ne pas tuer Pickering. Il accepta. Puis il se concentra et se retrouva au niveau des michrones. Les couleurs perdirent une partie de leur éclat remplacées par un vacarme infernal. Ralph pouvait à présent sentir l'odeur de suie et la chaleur insupportable. Il courut jusqu'à Pickering qui ne se retourna pas. Pickering avait mis des cocktails Molotov dans un sac de sport. Ralph se pencha sur le sac et prit l'une des bouteilles pleines d'essence. Il la balança contre la tête de Pickering. Pickering se retourna et en reconnaissant Ralph, il le traita de centurion. Ralph lui arracha son arme des mains et la retourna contre lui. Avant d'appuyer sur la détente, Ralph eut conscience d'un grouillement intense de lumière qui se matérialisait dans l'air. Une forme féminine apparut. Pickering hurla, croyant voir un fantôme. C'était Lois qui ordonna à Ralph de ne pas tuer Pickering. Il ne devait pas devenir ce que Pickering était. Alors Ralph laissa retomber larmes. Pickering essaya de s'en saisir. Alors Ralph envoya toute son énergie contre Pickering. Pickering retomba contre le mur. Un morceau de papier peint enflammé tomba sur Lois et mit le feu à ses cheveux. Ralph étouffa les flammèches de la main. Ralph et Lois décidèrent de redevenir invisible.

2

Lois demanda à Ralph ce qu'il avait fait à Pickering. Il répondit en créant une image dans son esprit : celle du coupe-circuit d'un compteur électrique. Elle comprit que c'était Pickering qui était responsable. Ralph ne l'avait pas fait exprès. Ils s'enfoncèrent à travers le plancher comme si c'était la surface d'un lac. Ils se retrouvèrent dans la cave. Il y avait une vingtaine de personnes. Ralph remarqua un petit garçon qui s'accrochait aux genoux de sa mère, une petite fille le visage enfoncé dans le sein de sa maman puis Helen. Elle tenait la petite Nathalie dans ses bras. Ralph crut distinguer des marches qui s'élevaient dans l'obscurité. Il retourna au monde des michrones et se retrouva soudain à son tour en train de tousser. Lois se matérialisa également. Le petit garçon crut que Ralph et Lois étaient des anges. Helen le regarda sans le reconnaître. Ralph lui demanda où menait l'escalier. Helen répondit que c'était la sortie extérieure de la cave. Mais la porte était fermée à clé. Lois grimpa l'escalier et s'évanouit dans une gerbe lumineuse. Ralph entendit une violente explosion et Lois fut de retour. Lois appela Ralph à l'aide. La serrure avait cédé mais la porte était trop lourde pour Lois. Ralph donna un coup d'épaule et la porte céda. Ralph regarda le petit garçon. Il pensa que l'enfant dirait avoir été sauvé par deux anges.

Les femmes et les enfants sortirent de la cave. Ralph demanda à Helen s'il n'y avait personne d'autre dans la maison et Helen répondit qu'elle ne le croyait pas.

3

Ralph et Helen surgir de la cave dans un nuage de fumée noirâtre. Elle s'agrippa pas à lui d'une main sans force et voulut dire quelque chose à propos de Natalie. Elle fut rassurée en voyant sa fille dans les bras de Lois. Lois exhorta les femmes à ne pas aller plus loin. Ralph entendit les sirènes d'une ambulance. Lois rendit Natalie à sa mère. Elle mit ses mains en porte-voix et tenta d'appeler la police. Ralph cria à son tour pour appeler Leydecker. Alors Leydecker ordonna d'arrêter les tirs. Leydecker ordonna à Ralph de s'identifier. Mais Ralph ne voulut pas s'identifier. Il répondit simplement que les femmes allaient arriver. Lois annonça que Pickering était inconscient. Lois demanda aux policiers de ne pas tirer car les femmes allaient arriver les mains levées. Au moment où Helen s'apprêtait à fermer la marche, Ralph la toucha l'épaule et elle tourna vers lui des yeux songeurs. Elle lui dit que c'était la deuxième fois qu'il se trouvait là au moment exact où elle et sa fille avaiten besoin de lui. Elle lui demanda s'il était son ange gardien. Ralph répondit qu'il l’était peut-être et lui annonça la mort de Gretchen. Helen le savait. Helen leur montra une voiture dans laquelle étaient venus les anti IVG. Ralph comprit que c'était Sandra McKay qui conduisait la voiture. Les résidentes de High Ridge avaient vu une femme et n'avait pas prêté attention aux slogans des autocollants collés sur le pare-brise. Seules Deanie et Gretchen avaient compris en voyant que le groupe était habillé comme des soldats Gretchen avait ordonné aux femmes et aux enfants de descendre à la cave. Helen commença à pleurer. Nathalie se mit à son tour à pleurer. Ralph lui demanda si la réunion aurait tout de même lieu le soir. Helen était choquée par la question.

Annuler la réunion signifiait donner raison aux anti IVG.

Les yeux d'Helen brillaient du même éclat que ceux de Pickering lors que l'homme s'était assis à côté de Ralph, dans la bibliothèque, et il n'existait aucun moyen de raisonner avec quelqu'un qui avait ce regard. Elle se mit à hurler : « s'ils nous arrêtent, ils ont gagné ! ». Puis elle partit en courant avec sa fille dans les bras Dorrance apparut et salua Ralph et Lois. Comme d'habitude, il tenait un livre à la main. Il leur demanda de venir vite.

4

Dorrance les entraîna dans un chemin envahi d'herbes. Ralph lui demanda comment il était parvenu jusqu'à High Ridge et où il voulait les emmener. Mais Dorrance ne voulut pas répondre. Ralph changea de niveau sans même en avoir conscience et la couleur se mit à envahir le monde. Ralph avait vu beaucoup d'auras au cours du dernier mois mais aucune n'approchait la splendeur de celle qui entourait de Dorrance. Dorrance leur ordonna de redescendre de niveau. Il prétexta qu'ils n'avaient plus le temps. Dorrance accepta de leur dire une seule chose, il avait dans les mains le meilleur recueil de poèmes de Robert Creely.

5

Après avoir marché longuement, une Ford récente d'un modèle totalement anonyme les attendait. C'était la voiture de Plussaj.

Chapitre 23.

1

Ralph regarda l'aura de Plussaj. Elle était jaune orangé et paraissait atténuée probablement sous l'influence de Dorrance. Lois demanda à Plussaj où il les emmenait mais il n'en avait aucune idée. Ralph souhaita à Plussaj la bienvenue dans le monde de l'hyperréalité. Le pharmacien supposait que c'était bien ce qu'il pensait. Ralph se doutait que Dorrance pourrait probablement leur dire tout ce qu'ils avaient besoin de savoir s'ils montaient de quelques niveaux. Mais il savait que Dorrance refuserait parce que plus on montait, plus le temps passait vite.

Dorrance affirma qu'ils avaient tout un lien commun, l'intentionnel. Ka-tet, ce qui signifiait un fait de plusieurs.

Ralph songea que lui, Lois et Plussaj étaient les trois Insomniaques de l'Apocalypse. Dorrance murmura dans l'oreille de Plussaj la direction à prendre. Ils allaient au centre municipal. Mais Lois se rappela que les deux docs chauves leur avaient dit de ne pas y aller. Peu importait pour Dorrance.

2

Ralph se surprit à évoquer le souvenir d'un jeu auquel il avait joué enfant. La chasse au dahu. Il se sentait gagné par la conviction que Clotho et Lachésis les avait envoyés, lui et Lois, chasser ce genre de gibier.

Ralph dit à Dorrance que les docs leur avaient dit qu'ils ne devaient à aucun prix s'approcher de Deepneau ou de doc chauve 3. Il précisa que Lachésis avait même affirmé que s'ils tentaient d'approcher de Deepneau où Atropos, ils pourraient bien avoir la visite d'un des manitous des étages supérieurs que Deepneau appelait le roi pourpre. Lois ajouta qu'ils avaient également dit qu'il fallait convaincre les responsables d'annuler la réunion avec Susan Day.Plussaj demanda à Lois s'ils avaient réussi à convaincre les responsables. Lois répondit que la bande de Deepneau était arrivée avant et avait mis le feu et avait tué Gretchen.

Ralph sentit son estomac se nouer douloureusement car il savait qu'Helen estimait que la réunion serait plus importante que jamais et qu'elle ne serait pas la seule. La cause était devenue si importante qu'elle méritait que l'on meure pour elle. La réunion était devenue une sorte de requiem athée.

Lois espéraient que les gens auraient peur d'y aller et Ralph lui répondit que la plupart des gens allaient penser que le danger était passé. En effet, deux des extrémistes qui avaient attaqué High Ridge étaient morts et le troisième était dans un état catatonique. Lois lui répondit que Deepneau était encore vivant et c'était lui le principal responsable. Ralph lui répondit qu'elle ne pouvait pas le prouver. Il imaginait que Pickering avait laissé un message chez lui pour expliquer que l'idée était entièrement de lui.

Plussaj leur apprit que Susan Day était déjà à Derry. De plus Susan Day avait déclaré que la réunion aurait bien lieu. Ralph pensait que Susan Day était prisonnière des événements, du ka-tet, comme eux.

Lois demanda à Dorrance si il savait ou se trouvait Susan Day. Dorrance répondit que faire changer d'avis à Susan ne changerait rien car les gens viendraient quand même. Ralph lui dit que quand le vin était tiré, il fallait le boire. Dorrance était ravi de cette remarque.

3

Devant le centre municipal, des équipes de télévisions étaient déjà présentes il y avait également des petits groupes pour la plupart constitués de femmes. Plussaj immobilisa sa voiture et demanda à Ralph et à Lois de descendre. Il aurait voulu les accompagner mais Dorrance lui avait dit qu'il n'était pas équipé pour.

Ralph demanda à Dorrance pourquoi ils étaient ici. Quelle était la vraie raison. Dorrance lui répondit que Ralph était devenu l'axe autour duquel se joueraient de grands événements et où s'affronteraient de grandes forces. L'ouvrage des univers plus élevés était presque au point mort depuis que ceux de l'intentionnel et de l'aléatoire observaient la progression de Ralph.

Ralph voulait se venger d'Atropos car il le jugeait responsable de la mort de Gretchen et il n'avait pas oublié qu'il avait volé les boucles d'oreilles de Lois. Lois empêcha Ralph de sortir de la voiture car elle avait encore quelque chose à faire. Elle demanda à Dorrance pourquoi on les avait envoyés à High Ridge. Elle savait que même s'ils avaient sauvé quelques vies, une poignée de vies humaines ne signifiait pas grand-chose pour ceux qui avaient monté le spectacle. Dorrance lui répondit que Clotho et Lachésis étaient presque des michrones dans le grand ordre des choses. Ils souffraient d'une certaine cécité mentale. Mais ils servaient aussi l'intentionnel et le ka-tet. Ralph avait compris que Clotho et Lachésis estimaient qu'ils n'auraient aucune chance s'ils attaquaient Atropos de face et qu'ils pourraient exécuter leur mission en passant par la porte de derrière. High Ridge était la porte en question.

Dorrance confirma que c'était bien cela. Pourtant il leur dit aussi que Clotho et Lachésis les avaient peut-être envoyés à High Ridge pour de mauvaises raisons alors que l'intentionnel les y avait envoyés pour les bonnes. Les bonnes raisons n'étaient pas le fait d'avoir sauvé des femmes et des enfants. Lois voulut savoir quelle était le raison. Dorrance lui répondit qu'ils n'avaient pas encore le droit de le savoir. Ils n'avaient pas terminé. L'aléatoire était insensé et l'intentionnel était rationnel. Ralph demanda à Dorrance plus d'informations mais il refusa. Il lui dit qu'ils feraient un bon repas ensemble quand tout serait terminé. Dorrance dit à Plussaj que Ralph ne devait pas oublier le peigne du pharmacien. Plussaj n'avait pas compris pourquoi Dorrance avait dit ça.

4

Ralph et Lois croisèrent Connie Chung, la journaliste. D'un seul coup, sans prévenir, les auras étaient revenues et Ralph en eut le souffle coupé. Le spectacle était d'une horreur indicible et pour la première fois, Ralph se rendit compte que même l'univers flamboyant des auras possédait une face sombre. Lois ressentit la même chose.

Au-dessus du centre municipal, Ralph et Lois pouvaient voir un filet à papillon gigantesque et malsain. Ralph pensait que si jamais lui et Lois tentaient d'interférer, ils allaient se faire écraser comme des mouches.

Il prit conscience que Lois pleurait. Il la réconforta. Elle voulait partir. Il répondit que s'ils ne faisaient rien, 2000 personnes allaient mourir. Il proposa de le ramener en bus. Alors elle lui dit qu’elle pourrait y arriver si ça ne prenait pas trop de temps. Lois se demandait comment les gens ne pouvaient rien sentir mais Ralph pensait le contraire. Il regarda les gens et ils ne souriaient pas. Connie n'avait pas l'air bien.

5

Ralph pensait que le linceul mortel vivait d'une vie paresseuse et les sucerait à mort s'il pouvait. Lois porta une main en cornet à sa bouche et inhala vivement. Cela lui donna quelques forces. Elle invita Ralph à l’imiter. Ralph inhala avec force entre les tuyaux de ses doigts recourbés l'aura de Connie. Il se sentit presque tout de suite pénétré d'une énergie qui chassait la douloureuse fatigue de ses articulations et de ses muscles. Lois poussa un cri. Elle venait de voir des bestioles géantes dans des buissons qui paraissaient fantomatiques. Leurs auras scintillaient fiévreusement. Rosenberg, le caméraman les interpella pour savoir si Lois allait bien. Elle prétendit avoir vu une souris dans les buissons. Lois pensait que ce qu'elle avait vu étaient des charognards. Ralph reconnut John Kirkland et sa productrice qui s'approchaient des bestioles. Lois voulut les en empêcher. Mais Ralph la rassura. Il pensait que ces bestioles ne feraient rien aux gens. Les deux journalistes discutaient de l'événement et évoquaient la femme de Deepneau. La productrice pensait qu'Helen et Gretchen étaient des amies un peu particulières. Ralph vit un tribolite grimper sur les souliers de la jeune femme puis disparaître sous l'ourlet de sa jupe. La jeune femme gratta d'une main distraite le renflement sous sa jupe. La productrice parla des Amis de la Vie et pensait qu'ils ne seraient pas assez stupides pour faire une apparition au centre municipal. Ce n'était pas l'avis de son collègue. Pendant qu'ils parlaient, le nombre des bestioles multicolores ne cessait de s'accroître et grouillaient sur leur corps. Un technicien fit remarquer la présence de Ralph et de Lois qui n'avaient pas le droit d'être là. Lois annonça à Ralph qu'elle allait voir Connie pour lui demander un autographe pour faire diversion. Connie lui fait comprendre qu'elle était occupée.. Au même moment, Ralph regarda le centre municipal. Devant les portes, il aperçut une substance noirâtre à demi transparente d'une épaisseur d'environ 5 cm. Cette fumée ne disparaissait pas réellement ; elle déposait un résidu sur le mur. Il comprit quelle était l'origine de ce dépôt à demi transparent. C'était l'équivalent de l'usure qui creuse les marches d'un escalier que l'on emprunte beaucoup. Connie accepta de signer un autographe. Ralph chercha les empreintes d'Atropos. Puis il grimpa d'un niveau. Les couleurs jaillirent en silence dans le monde. Un sentiment dépressif s'abattit de nouveau sur lui. Il put voir des éclaboussures d'une sorte de mucus sanguinolent sur les portes ainsi qu'une grande flaque répugnante de la même substance sur la dalle de béton. C'étaient les traces d'Atropos. Lois le rejoignit elle lui demanda de la faire sortir de là. Ils retournèrent vers l'endroit où Plussaj les avait déposés. C'était la même direction que suivaient les empreintes sanglantes.

Chapitre 24.

1

Ralph et Lois se dirigèrent vers l'hippodrome où se trouvaient les limites du linceul. Ils entendirent deux bruits, un soupir qu'aurait pu pousser le vent et une très désagréable mastication baveuse.

Le linceul émettait des sons que Ralph finit par comprendre. Le linceul menaçait Ralph et Lois de mort. Ils traversèrent l'endroit où ils savaient que retombaient les pans du linceul noir.

Ralph sentit un mélange sinistre de souvenirs jaillir dans son esprit. Puis ils se trouvèrent de l'autre côté.

2

Ils firent une pause à l'autre bout du parking. Ralph prit cinq minutes pour réfléchir. Il comprit qu'il fallait s'élever environ deux sauts pour voir le roi pourpre. Mais ils devraient faire attention car pour pouvoir voir il fallait aussi être vu. Lois réclama un baiser avant de repartir.

3

Ils se rendirent à l'hippodrome. L'aura de Lois avait considérablement pâli. Ralph lui dit qu'ils n'allaient pas tarder à avoir besoin de se recharger.

4

Ils suivirent la piste qui traversait le champ de course. La principale inquiétude de Ralph, celle de voir la piste d'Atropos s'évanouir, se révéla tout d'abord sans fondement. Mais ils perdirent momentanément la piste une fois arrivés à la gare de triage. Lois montra à Ralph une voie ferrée, demeurée ligne principale jusqu'en 1963, puis une ligne unique jusqu'en 1983. Ralph avait l'impression qu'ils allaient retomber à l'endroit exact où tout avait commencé, sur Harris avenue.

Un clochard les interpella. Ralph le reconnut. Il avait été déjà ennuyé par ce clochard le jour où il avait écouté Bill gémir sur le sort de son vieux pote Bob. Une bizarre impression de fatalité envahit Ralph. Il avait la sensation que lui et Lois étaient attachés aux rayons d'une roue démesurée qui les entraînait de l'endroit où ils étaient partis pour s'enfoncer de plus en plus profondément dans cet horrible tunnel. Le clochard prétendit encore avoir besoin de 55 cents pour prendre le bus et lois lui rétorqua qu'il en avait 76 dans sa poche. Le clochard fut surpris et Ralph lui répondit qu'il pouvait percevoir son aura. Ralph inhala l'aura du clochard. Pendant ce temps, Lois avait tiré un billet de 20 $ dans son sac. Puis elle aussi inhala l'aura du clochard. Lois offrit le billet au clochard. Elle lui recommanda simplement de s'acheter aussi à manger et pas seulement à boire. Il la remercia en disant qu'elle était une vraie princesse. Ralph lui répondit qu'il était déjà au courant.

5

Ralph et Lois avancèrent entre les rails rouillés de la voie qui s'incurvait doucement derrière le golf municipal. Ils étaient revigorés grâce à l'aura du clochard. Les joueurs de golf ne leur adressèrent même pas un regard. Ralph avait l'impression d'être de nouveau visible. Cela l'inquiétait. Car plus on montait, plus le temps filait. La piste devenait de plus en plus fraîche en avançant vers l'Ouest. Lois put voir de grandes taches de la piste d'Atropos qui brillaient comme une peinture malsaine sur le tronc des arbres. Ralph comprit qu'ils s'approchaient de l'endroit où Atropos habitait. Ralph était prêt à tuer Atropos même si cela ne cadrait pas avec les objectifs des patrons. Il voulait sauver sa peau et celle de Lois. Lois entendit les pensées de Ralph et lui dit qu'elle serait prête à l'aider pour tuer Atropos. Lois savait qu'Atropos devinerait qui était venu chez lui. Ralph considérait que c'était sans importance.

6

Ralph devina que le terrier d'Atropos se trouvait seulement à un jet de pierre de l'endroit où Deepneau s'était jeté sur la camionnette chargée de fertilisant du gros balèze.

Il y avait une odeur ignoble. Ils entendirent la voix de Chapin. Ils se dirigèrent vers le chêne au pied duquel aboutissaitla piste d'Atropos dans l'odeur écoeurante de putréfaction féroce qui était son parfum.

Chapitre 25.

1

En dehors de la récupération du peigne du pharmacien et des boucles d'oreilles de Lois, Ralph ignorait s'il devait faire autre chose mais il avait la certitude qu'il le serait le moment venu. La foudre avait violemment renversé un tronc d'arbre et ouvert un grand trou à son pied, côté Ouest. Ralph put voir une lueur rougeâtre en dessous de l'arbre. Ralph et Lois entrèrent dans le trou.

2

L'odeur était un remugle de cage de singe qui soulevait le coeur de Ralph. Ralph et Lois vomirent. Lois demanda à Ralph de monter un peu. Alors il y eut soudain plus de place et de clarté dans la tanière. L'odeur était devenue supportable. Il était impossible de garder la notion du temps. Ralph trouva une racine qui dépassait et il glissa le long de la pente caillouteuse en tenant Lois par la taille.

Ralph sentit une surface qui évoquait une véritable marche. Il se laissa glisser sans lâcher Lois. C'était la première marche d'un escalier étroit qui s'incurvait dans la pénombre rougeâtre. Ils s'engagèrent dans l'escalier.

3

La lumière rouge devint plus intense. La puanteur d'Atropos s'accentua. Un couloir taillé dans la pierre débouchait sur une arche au-delà de laquelle la lueur rouge vacillait comme par une porte de four laissée ouverte.

Ralph demanda à Lois de se tenir prête. Ralph trouva un cylindre de plastique rouge. C'était une poignée de corde à sauter. Ralph la jeta et reprit sa progression. Ralph et Lois avaient l'impression d'être Hänsel et Gretel qui seraient tombés sur la maison en sucre de la sorcière après avoir erré des jours dans la forêt.

4

Juste devant eux se trouvait une petite pièce minable. Au centre, il y avait une table basse ronde avec une chaise et un grand miroir qui couvrait tout un mur. Il y avait également une literie sommaire. Une autre arche s'ouvrait sur un espace qui ressemblait à une remise. Ralph se précipita pour arrêter Lois juste avant qu'elle ne franchisse le seuil. Puis il s'élança à travers l'arche et renversa un carton d'où s'éparpillèrent une multitude d'objets divers. Lois étaient restées sur le seuil. Elle se précipita vers Ralph. Ils se rendirent compte qu'il s'agissait d'un véritable entrepôt. Lois comprit qu'Atropos devait être très vieux puisqu'il avait eu le temps d'accumuler beaucoup d'objets. Ralph trouva une grande roue à rayon posée sur un fauteuil juché sur une antique armoire à linge. C'était une roue de bicyclette. Ralph se demanda combien de milliers de gens étaient morts à Derry depuis qu'Atropos avait remisé cette roue ici. Combien étaient morts aux mains de l'aléatoire. À combien de siècles cela remontait-il.

Pendant tout ce temps, Atropos avait subtilisé un petit quelque chose à tous ceux qu'il avait baisés. Lois trouva le panama de Bill est le peigne du pharmacien. Lois montra à Ralph un vieux fauteuil à bascule avec un patin brisé. Le chapeau était posé dessus et cachait le peigne. Elle donna le peigne à Ralph. Ralph le glissa dans la poche de devant de son pantalon. Lois se mit à pleurer. Elle pensait à Bill qui adorait son chapeau.

Ralph examina le dessous du fauteuil dans l'espoir de voir de petits éclats brillants dans l'obscurité. Mais il ne trouva pas les boucles d'oreilles de Lois. Alors il monta légèrement plus haut et prit conscience d'un bruit comme une alarme. Il prit la main de Lois. Lois pensait que cela signalait ce qu'ils étaient venus chercher mais Ralph ne voulait pas partir sans avoir trouvé les boucles d'oreilles. Le grognement s'amplifiait dans leurs oreilles et ils en trouvèrent la source. Il ressentait les rappels muets des morts par l'aléatoire. Ce lieu était comme une église profane dans laquelle Atropos pratiquait son propre rituel de communion. De chaque objet montait un minuscule sanglot de chagrin abasourdi. Lois pleurait à côté de lui. Le seul crime des gens qui étaient morts avaient été de naître sous le signe de l'aléatoire et d'accrocher le regard du cinglé au scalpel. Ralph avait envie de caresser les côtes d'Atropos. Lois acquiesça.

5

Ils atteignirent un endroit où l'étroit couloir se divisait en plusieurs embranchements. Le bourdonnement régulier venait de leur gauche. Lois comprit qu'Atropos passait beaucoup de temps dans ce lieu. Le couloir ne se terminait pas en impasse. Sur la gauche s'ouvrait un espace étriqué entre les pieds d'une table de salle à manger sur laquelle s'empilaient de la vaisselle et des tas de papiers verts.

C'étaient des billets de banque. Il y avait des liasses empilées. Une lumière rouge provenait d'une autre petite pièce. Ils rampèrent sous la table et se retrouvèrent dans le sanctuaire bâti par Atropos. Ils trouvèrent un objet emmitouflé dans un linceul. Ralph crut entendre quelque chose puis il n'y eut plus rien. Lois comprit qu'Atropos aspirait la vie de toutes les affaires empilées dans ce lieu. La chose dissimulée sous le linceul essayait d'aspirer leur force vitale.

Lois tenait une chaussure de sport de petite taille ayant appartenu à une femme ou un enfant. Lorsque Ralph prit la chaussure, il entendit chantonner doucement une voix très lointaine. C'était une voix qu'il connaissait. C'était la chaussure d'Helen. Ralph pouvait entendre les voix provenant de tous les autres objets. Toutes les choses alignées contre les parois chantaient parce que leurs propriétaires le pouvaient encore.

Ralph comprit que c'était des objets des gens qui iraient au centre municipal dans la soirée. La chose sous le linceul reliait tous ces objets différents et toutes ces vies différentes.

Lois décida d'emporter la chaussure d'Helen. Lois demanda à Ralph de prendre la chose sous le linceul. Ralph pensa que ce dont il avait besoin était une paire de ciseaux.

6

Ralph pensa au jeu auquel il avait joué enfant, ciseaux, papier, caillou. Puis il pensa aux ciseaux en acier de la trousse de couture de sa mère. Il sentit une force immense qui se contractait lentement dans son esprit. L'aura qui entourait son index et son majeur commença à s'épaissir et à s'allonger. Il se pencha, les deux doigts collés l'un à l'autre pointés vers le linceul, et y enfonça la pointe des ciseaux. Lorsque la pointe des lames pénétra dans la surface noire, le linceul se mit à hurler. Un liquide noirâtre tomba sur le sol. Ralph déploya des efforts colossaux pour écarter les doigts et ainsi, il put entailler légèrement l'oeuf noir. Deux éclairs dentelés éclatant de lumière rouge parcoururent la surface de l'oeuf. Ralph resserra les doigts et les lames se refermèrent. Il poussa un cri. Il ressentait une immense fatigue. Il rassembla toutes ses forces et tenta d'ouvrir les doigts et réussit à agrandir la fente. Alain d'ailleurs de l'oeuf, il y avait un objet brillant. Mais la force de Ralph déclinait et les lames bleutées vacillèrent. Alors il demanda à Lois de l'aider. Elle  prit son poignet et les lames se solidifièrent de nouveau. Les ciseaux entaillèrent complètement le linceul qui devint entièrement rouge et disparut. À la place du linceul noir se trouvait une alliance d'homme. C'était l'alliance de Deepneau. C'était pour cela que Ralph était venu. Il ne restait plus qu'à retrouver les boucles d'oreilles de Lois et à ficher le camp.

7

Ralph pensa au texte de Tolkien sur l'anneau de Sauron. Il pensait qu'il n'arriverait pas à soulever l'alliance de Deepneau. Il s'empara de l'alliance et ressentit une douleur aiguë qui lui remonta la main, le poignet et l'avant-bras. Les voix des objets qu'Atropos avait entassés s'élevaient en un grand soupir harmonieux. Ralph souleva l'anneau et regarda Lois. Elle avait une expression de peur et d'incrédulité sur le visage. Il se rendit compte qu'une deuxième alliance était apparue à l'endroit où il avait enlevé la première. Il tenait toujours la première dans la main.

8

Lois  s’empara du deuxième anneau et un troisième anneau apparut. Il était identique aux deux premiers. Ralph pensa alors à une histoire du docteur Suess sur des rats, des chars et des chauves-souris, elle était intitulée les 500 chapeaux de Bartolomew Cubbins. Le pauvre Bartolomew était un cul terreux qui avait eu le malheur de se trouver en ville lors du passage du roi. On devait enlever son chapeau en présence de Sa Majesté et Bartholomew avait certainement essayé mais pas de chance : chaque fois qu'il l'enlevait, un autre, identique au premier, prenait sa place. Il allait être décapité pour crime de lèse-majesté. Les chapeaux avaient commencé à se transformer, devenant de plus en plus fabuleux et baroques. Alors Lois demanda à Ralph si les alliances étaient absolument identiques. Il n'en était pas sûr car il avait ressenti une douleur lui remonter une partie du bras en prenant la première alliance mais Lois n'avait manifesté aucun signe de souffrance en ramassant le deuxième anneau. Ralph se pencha pour prendre la troisième bague et ne ressentit aucun élancement douloureux. Un quatrième anneau se matérialisa. Ralph pensait que c'était le premier anneau qui gouvernait tous les autres. La première bague émettait un écho affaibli du hurlement final lancé par le suaire déchiré. Les autres étaient silencieuses. Il expliqua à Lois que tant que les faux anneaux continueraient d'apparaître dans cet immonde petite pièce, l'avenir que représentait le linceul de mort autour du centre municipal resterait le seul véritable. Mais la première alliance pouvait changer tout cela. Les duplicateurs étaient des signes qui préservaient la forme du ka. Ralph pensait que l'anneau original c'était le moyeu de la roue. Il glissa l'anneau dans le gousset de son pantalon. Ralph pensait que le ka était glissant comme une vieille anguille immonde qui ne veut pas se décrocher de l'hameçon et n'arrête pas de gigoter dans vos mains. Le ka était comme une alliance. Il comprit que le statut sans définition de Deepneau lui conférait une puissance phénoménale. Une porte s'était ouverte et un démon appelé le roi pourpre s'y était engouffré. Il expliqua ce qu'il avait compris à Lois. Avant de partir, Ralph remarqua que le linceul noir se reconstituait autour de la fausse alliance.

9

Lois était pressée de sortir pour prendre un peu d'air frais. Ralph se rendit compte qu'ils avaient été beaucoup moins prudents pendant le retour à cause de leur fatigué. Ralph sentit le bras de Lois se détacher violemment de lui tandis que la créature ricanante la saisissait par la taille et l'entraînai en arrière. Atropos menaçait de trancher le panache de Lois. Il portait toujours les boucles d'oreilles de Lois sur ses oreilles. Atropos ordonna à Ralph de lui rendre ce qu'il lui avait pris.

Chapitre 26.

1

Ralph sentit qu'Atropos avait peur. C'était le roi pourpre dont il avait peur. Ralph tint l'anneau entre le pouce et l'index de sa main droite et demanda à Atropos de venir lui-même prendre la bague. Quand Atropos menaça de tuer Lois, Ralph lui rétorqua que s'il faisait la plus petite entaille avec son scalpel, Ralph le frapperait. Puis il lui proposa un marché. Si Atropos promettait qu'il n'y aurait pas d'arnaque, Ralph lui donnerait la bague. Atropos s'énerva il ordonna à Ralph de baisser ses mains. Ralph rabaissa vivement la main et mit les deux bras derrière le dos. Il en profita pour glisser l'alliance de Deepneau dans la poche revolver de son pantalon. Il n'avait aucune intention de rendre la bague même si cela devait coûter la vie de Lois. Il proposa à Atropos de lui rendre l'anneau s’il lui rendait son amie. Atropos devait simplement promettre de ne pas lui faire de mal. Ralph savait qu’Atropos ne pouvait pas mentir. Mais Atropos étudia avidement l'aura de Ralph. Il comprit que Ralph était déchargé. Lois exerça une violente poussée en arrière pour écraser Atropos contre le montant de l'arche.

Le nabot laissa échapper un grognement de surprise. Elle griffa le nabot aux joues.

Mais il réussit à la reprendre par la taille et raffermit sa prise sur le scalpel. À ce moment-là, Ralph lança un rayon lumineux qui frappa la pointe du scalpel. Puis il s'agenouilla et attrapa le slip de Lois qui hurlait toujours. Lois mordit Atropos au poignet. Ralph enfonça le slip de Lois sur la tête du nabot et emprisonna sa main. Il ordonna à Lois de s'enfuir. Ralph fit virevolter Atropos en se servant du slip comme d'une fronde et l'envoya valser à travers l'arche. Le nabot s'effondra. Puis Ralph se jeta sur lui et l'attrapa par les épaules. Il lui frappa la tête sur le sol. Lois lui demanda d'épargner la créature. Lois avait vu que le nabot portait ses boucles d'oreilles. Atropos insulta Ralph. Il continuait de donner ses dérisoires coups de scalpel au petit bonheur la chance. Ralph les évita sans peine. Lois supplia Ralph de prendre les boucles d'oreilles et de fuir avec elle.

Ralph se demanda ce qu'il devait faire de ce modèle réduit de monstre. Il ordonna à Lois de s'en aller. Avant de partir elle lui dit qu'il ne fallait pas faire de mal Atropos car ce n'était pas chrétien. Après le départ de Lois, Ralph saisit les boucles d'oreilles et les arracha. Le nabot poussa un cri. Il avait l'habitude de faire mal aux autres mais pas qu'on lui en face. Atropos dit à Ralph que ce n'était pas le fait de prendre la bague qui changerait quoi que ce soit pour les gens qui se trouvaient au centre municipal. Ralph le savait. Atropos promit de le laisser en paix à Ralph et Lois si Ralph le relâchait. Mais Ralph saisit le poignet du nabot elle tendit violemment. Atropos abandonna son scalpel.

2

Ralph s'était emparé du scalpel. Il entailla superficiellement la peau du crâne d'Atropos.

Alors Atropos arrêta de s'agiter. Il voulait lui poser des questions et s'assurera en même temps de la docilité du nabot. Il lui entailla de nouveau le crâne. Ralph lui demanda s'il était obligé de tenir ses promesses. Atropos hésita à répondre, ce qui était bon signe. Ralph lui demanda de promettre de le laisser tranquille ainsi que Lois jusqu'à la fin de la manifestation au centre municipal. Comme Atropos atermoyait, Ralph fit courir la lame du scalpel le long du dos d'Atropos. Alors Atropos répondit que si Ralph arrivait à arrêter ce qui avait commencé lui-même serait puni par la créature que Ralph appelait le roi pourpre. Ralph coupa l'oreille droite d'Atropos.

Alors Atropos promit. Ralph était content mais il était également écoeuré d'avoir dû employer de telles méthodes. Il lança le scalpel aussi loin qu'il put. Atropos montra une image à Ralph. C'était l'avenir. Après quoi, Atropos dit à Ralph que s'il continuait à lui mettre des bâtons dans les roues, l'avenir qu'il venait de lui montrer se produirait. Ralph dut faire un choix terrible.

Chapitre 27.

1

Ralph rejoignit Lois qui l'attendait sous le vieux chêne. Il éprouva une immense gratitude à se retrouver dehors. Il rendit les boucles d'oreilles à Lois. Elle lui demanda comment il s'en était sorti. Il lui dit qu'il fallait retourner au parc. Dorrance s'y trouvait. Il regardait un petit appareil descendre vers la piste d'atterrissage. L'aura des joueurs d'échecs scintillait. Lois aspira un flot de l'aura vibrante. Ralph l’imita. Ils se sentirent immédiatement envahis par une énergie toute neuve. Dorrance et salua Ralph et Lois. Ralph demanda à Dorrance s'ils devaient aller à Strawford Park. Dorrance ne voulut pas se prononcer. Lois lui implora son aide. Mais il répondit que ce n'était plus de son ressort.

2

Ralph et Lois se rendirent à Strawford Park. Ils croisèrent M. Dugan, patron de la société de prêt Derry Trust’s Loan qui avait refusé à Ralph un prêt. Ralph se rendit compte que l'aura de Dugan était du même gris sinistre qu'un bâtiment de guerre. Comme ils étaient montés, Ralph put passer à travers le corps de Dugan. Sur le terrain de jeu, deux adolescents s'étaient installés sur des balançoires mais les petits-enfants et les mamans étaient tous partis.

Ralph se sentit envahi par une grande tristesse en pensant à Bill. Lois lui demanda pourquoi ils étaient venus ici. Ralph refusait de faire le choix que lui avait imposé Atropos. L'aura de Ralph brillait avec un tel éclat que Lois s'abrita les yeux de la main. Ralph appela Clotho et Lachésis.

3

Les adolescents prirent peur et s'enfuirent. Clotho et Lachésis sortirent des sanisettes. L'aura de Ralph flamboyait encore vivement. Il ordonna à Lois de rester assise sur le banc. Elle lui dit qu'elle essaierait d'arrêter Ed si Ralph n'y arrivait pas. Elle ne savait pas, cependant, ce que Ralph savait. Elle n'avait pas vu ce qu'il avait vu. Clotho et Lachésis levaient vers Ralph des yeux lumineux et pleins de frayeur.

4

Clotho annonça à Ralph que Deepneau était en route et qu'il fallait l'arrêter. Ralph répondit que sur le toit de l'hôpital Lachésis avait insisté pour que Ralph et Lois n'approchent pas de Deepneau. Lachésis reconnut s'être trompé. Ralph leur demanda des explications. Ils répondirent qu'ils n'étaient pas responsables des règles du jeu. Ils dirent que les gens mourraient à coup sûr s'il n'arrêtait pas Deepneau. Ralph voulait savoir ce qui concernait l'une de ces futures victimes, celle qui appartenait à l'intentionnel et à laquelle il ne pouvait renoncer sous prétexte qu'un enfoiré avait disjoncté et aller débarquer avec un avion chargé d'explosifs. Ralph voulait savoir qui était cette personne qu'on ne pouvait abandonner à l'aléatoire.. Lachésis montra une image à Ralph. C'était l'image du petit garçon que Ralph avait sauvé à High Ridge et qui l'avait pris pour un ange. Ralph était interloqué. Lachésis lui expliqua que la mère de l'enfant avait reçu un appel de la part de la personne qui devait garder l'enfant et qui s'était décommandée. Comme la mère de l'enfant était déterminée à voir Susan Day elle emmènerait son enfant. Ralph comprit que si la baby-sitter s'étaie décommandée, ce n'était pas le fruit du hasard. Quelqu'un était déterminé à ce que le petit garçon soit au centre municipal. Clotho apprit à Ralph que le petit garçon était assis au balcon du centre municipal avec un livre d'images à colorier et un livre d'histoires. Dans le livre d'histoire il y avait celle de 500 chapeaux de Bartolomew. Ralph n'en fut pas surpris. Lachésis annonça à Ralph que c'était le flanc nord du centre municipal que l'avion de Deepneau viendrait heurter.

Le petit garçon mourrait sur-le-champ si Ralph ne prenait pas des mesures pour empêcher cela. Ce garçon ne devait pas mourir avant ce qui avait été prévu pour lui.

5

Deepneau avait déjà pris l'air. Il serait bientôt trop tard pour l'arrêter. Mais Ralph dit aux deux docs que tout cela lui était égal tant qu'il n'aurait pas compris quel était le véritable enjeu. Alors Clotho lui expliqua qu'il existait des personnes d'exception qui servaient l'intentionnel. Si ces personnes mouraient avant leur heure, tout était changé. Et les plateaux de la balance n'étaient plus en équilibre. Le petit garçon que les deux docs voulaient sauver était encore plus important que Churchill d'après eux. Lachésis expliqua que Deepneau n'avait aucune assignation, ni de l'intentionnel ni de l'aléatoire. Il était le seul être humain à pouvoir faire du mal au petit garçon. Si Deepneau échouait, le petit garçon serait de nouveaux en sécurité et pourrait jouer son rôle d'une importance cruciale. Si le petit garçon mourrait, la Tour des Existences s'écroulerait et les conséquences d'un tel effondrement étaient au-delà de la compréhension de Ralph.

Atropos avait apparemment mis Deepneau en branle en s'appuyant sur une sorte de complexe du messie qui devait plus ou moins préexister chez lui. Ce que Deepneau ne croirait jamais était qu'Atropos et ses patrons avaient l'intention de se servir de lui non pas pour sauver le messie mais au contraire pour le tuer. Alors Ralph accepta d'essayer d'arrêter Deepneau. Clotho et Lachésis furent soulagés. Mais Ralph demanda quelque chose en échange.

6

Lois n'entendit pas les derniers mots prononcés par Ralph mais vit que Clotho et Lachésis secouaient négativement la tête. Ralph leur expliqua que pour lui ces deux vies se valaient. Ralph proposa un marché. Il acceptait de s'occuper de Deepneau mais en échange Clotho et Lachésis devaient promettre de sauver une vie. Soudain, le flanc de la colline s'illumina d'une lumière blanche éclatante. Une voix s'éleva pour dire qu'il pouvait en être ainsi. Clotho était terrorisé. Il tira des ciseaux de sa poche. Il les brandit en l'air et la voix répéta qu’il pouvait en être ainsi. La lumière s'abattit sur les ciseaux que Clotho tenait comme un paratonnerre. Les ciseaux brillaient toujours. Lois eut envie de crier à Ralph de laisser tomber son protégé, de leur donner le petit garçon pour que disparaissent enfin ses ciseaux.

Lachésis et Clotho entraînèrent Ralph vers le bas de la pente. Clotho murmura quelque chose. Ralph acquiesça et enleva son chandail qu'il posa sur le gazon. Clotho le prit par le poignet et lui fit tendre le bras puis il adressa un signe de tête à Lachésis. Lachésis déboutonna la manche de Ralph et la roula sur son bras. Clotho tourna le bras de façon à présenter le poignet au ciel. Lachésis dit à Ralph que c'était sa dernière chance. Ralph acquiesça. Clotho se pencha sur l'avant-bras de Ralph et ouvrit lentement la mâchoire des ciseaux.

7

Clotho entailla rapidement le milieu de l'avant-bras jusqu'au poignet.

Clotho fit lentement glisser sa main le long du bras de Ralph ; au fur et à mesure, la peau réapparaissait, intact, solide, simplement marquée par une cicatrice blanche en relief. Lois entendit une voix qui lui demandait de se tourner. Elle vit alors une lumière qui l'entourait. Loi pivota et entra dans la lumière.

Chapitre 28.

1

La douleur de Ralph ne lui paraissait plus qu'un mirage. Clotho lui dit qu'il portait un signe à présent. Ralph remercia Clotho et Lachésis. Ralph avait l'impression que l'aura habituellement gris perle de Ralph avait pris une nuance plus sombre. Elle lui dit qu'elle avait vu un homme vert. Il avait demandé à Lois de rendre à Ralph les boucles d'oreilles. Il lui dit qu'elle avait oublié les fermoirs. Mais elle les avait jetés comme le lui avait demandé l'homme vert. Clotho avait ramassé le chandail emprunté à Bill et le rendit à Ralph. Ralph demanda à Lois de lui emprunter un peu de son aura. Il respira l'aura de Lois. Il se rendit compte que l'aura de Lois était devenue pâle. Du gris était réapparu dans ses cheveux. Ralph culpabilisa. Il avait terriblement affaibli Lois. Lachésis demanda à Ralph de partir tout de suite. Lois resterait assise sur le banc en attendant que les forces lui reviennent. Ralph sortit l'anneau de sa poche et le déposa dans la paume de sa main puis il le plaça à l'annulaire sa main gauche. Il était dans la sanisette des hommes et se rendit compte que la paroi du fond avait disparu au moment même il mettait la bague sur son doigt.

2

Il découvrit un ciel de début du crépuscule et une portion de paysage. En bas à gauche de cette vision figurait un tableau de bord avec ses instruments. Il y avait également une photo d'Helen avec son bébé. Deepneau devait tenir à ce que ce soit la dernière chose qu'il verrait en ce bas monde. Ralph remarqua que Deepneau avait retiré son alliance. L'aura de Deepneau était prise d'une agitation frénétique.

Ralph salua Clotho, Lachésis et Lois. Puis il entra résolument dans la sanisette.

3

Ralph traversa la cuvette. Il se retrouva dans la carlingue de l'avion avec sa tête qui dépassait du fuselage. Alors il plia les genoux et sa tête glissa sans peine à travers le toit de la carlingue. Il fut submergé par une vague de regret. Deepneau avait perdu beaucoup de poids. Il avait noué le foulard de soie orné de caractères japonais à son front. Il affichait une détermination farouche. Ralph éprouva une sensation de déjà vu. Deepneau ne pouvait pas le voir. Malgré tout, Deepneau s'était rendu compte que quelque chose avait changé. Il reçut un appel radio lui demandant de s'identifier. Deepneau martela la radio du poing. Il se blessa le petit doigt et essuya le sang sur ses joues comme une peinture de guerre improvisée. Puis il poussa le manche à balai et l'avion descendit. Sur le siège du passager, il y avait un carton contenant une bombe. Ralph entendit une voix. C'était sa mère qui était morte 25 ans auparavant.

4

La mère de Ralph était en train de tricoter. Ralph n'avait jamais vu sa mère tricoter. Il voyait sa mère telle qu'elle était lorsqu'il avait 10 ans. Puis tout se solidifia. La maison de la mère de Ralph et le chat apparurent. Ralph fut surpris de voir que sa mère avait une moustache. Sa mère lui ordonna de ne pas se mêler des affaires des autres. Ralph ne voyait plus la carlingue mais la cuisine de sa mère. Il y avait des roses rouges dans un pichet. Mais Ralph se souvenait que sa mère était allergique à la plupart des fleurs. Ralph se rendit compte qu'il était dans la cour du roi pourpre.

Chapitre 29.

1

Sans y réfléchir, Ralph glissa une main dans la poche de son chandail et saisit maladroitement l'une des boucles d'oreilles de Lois. Sa main lui donnait l'impression d'appartenir à quelqu'un d'autre. Il prit aussi conscience de quelque chose de très intéressant : jamais, jusqu'à ce jour, il n'avait réellement connu la peur. L'homme vert était pratiquement le seul espoir qui lui restait.

L'entité aux nageoires rouges vautrée dans le rocking-chair n'avait plus maintenant qu'une vague ressemblance avec sa mère. L'entité se transforma en poisson-chat. La créature lui ordonna de ne pas bouger en lui annonçant qu'il mourrait dans l'explosion. Ralph lui demanda s'il était le roi pourpre. La créature répondit que c'était le nom que lui avait donné Deepneau. Proposa à Ralph de lui trouver un nom. Il proposa le roi-poisson mais Ralph pensait que le roi-poisson véritable était une reine et avait vécu dans les Friches-Mortes.

2

Quand il avait sept ans, Ralph avait ferré un énorme poisson-chat pendant qu'il pêchait avec son frère John. Les poissons dans les Friches-Mortes étaient encore comestibles. John avait refusé de décrocher le poisson pour le mettre dans le seau d'eau plus tard, Ralph avait pris conscience que Johnny avait eu peur de l'énorme créature à l'aspect peu engageant qu'il venait de pécher. Ralph avait fini par trouver le courage de saisir le poisson et Johnny lui avait dit que le poisson était venimeux. Le poisson mordit Ralph au moment où Ralph retira l'hameçon.

Johnny poussa un cri de terreur alors Ralph supplia son aide mais Johnny avait battu en retraite. Ralph avait fini par frapper le poisson contre un arbre puis il l’avait écrasé d'un coup de pied. Un torrent gluant d’œufs ensanglantés en sortit. C'est à cet instant que Ralph comprit que le roi-poisson était en fait une reine. Il était rentré chez lui en courant. Il n'avait plus mangé de poisson pendant un an. Il n'avait plus approché de poisson-chat depuis ce jour.

3

Ralph entendit Lois qui lui demandait d'agir tout de suite. La créature continuait de parler à Ralph comme si elle était sa mère. Ralph lui demanda si elle connaissait l'homme vert. La créature répondit qu'elle le connaissait mais Ralph détecta une incertitude sur cette tête écailleuse.

La reine poisson dégageait une luminescence animée de pulsations de plus en plus brillante. Ralph sentit l'effet que cela faisait de se trouver dans cette lumière diffuse rouge. C'était comme s'il avait été pris dans un filet tissé de ses peurs les plus ignobles et de ses expériences les plus traumatisantes. Il n'y avait aucun moyen de s'en arracher. Ralph pensa qu'il fallait foncer à toute vitesse pour pouvoir déchirer ce nouveau linceul. Ralph tenait toujours la boucle d'oreilles à la main. Il la déplaça de manière que la pointe ouverte de l’attache dépasse des deux doigts que le poisson-chat avait essayé autrefois d'avaler. Puis il adressa une courte prière à l'homme vert que Lois avait vu.

4

Ralph avait peur que la reine-poisson soit venimeuse. Il entendit la voix de Lois qui lui demandait de se dépêcher. Ralph sentit le parfum de sa mère mélangé avec l'odeur de la reine-poisson. La créature lui dit qu'elle avait bien intention de tuer le petit garçon. Ralph s'avança d'un pas. Il vit alors apparaître une autre silhouette derrière celle de sa mère, derrière celle de la reine-poisson.

Il vit un homme qui ressemblait au Christ. La reine poisson fut surprise. La reine-poisson imita la mère de Ralph pour lui donner des ordres. Ralph hésita un instant puis il continua son mouvement. La reine-poisson se recroquevilla dans le rocking-chair. Il semble à Ralph que Lois était proche et cela le réconforta. La reine-poisson se transforma et Ralph vit un homme d'une beauté glaciale avec des cheveux blonds et des yeux rouges qui cherchaient à le foudroyer. Ralph enfonça la pointe aiguë du fermoir de la boucle d'oreilles dans l'un des yeux noirs exorbités.

5

L'entité émit une effroyable régulation. Elle s'affaissa dans le fauteuil qui se transforma en une sorte de trône. Le poisson-chat disparut complètement. À la place, c'était le roi pourpre qui siégeait grimaçant. Ralph arracha la couverture d’oeufs des genoux de l'entité. Il vit des ténèbres absolues. C'était le revers du linceul de mort. La sortie. Le roi pourpre se fit menaçant. Le roi pourpre mordit la main de Ralph. Il ressentit de piqûres dans son bras. Le roi pourpre était sur le point de lui trancher le poignet et de lui avaler la main.

Ralph ferma les yeux pour trouver le mécanisme de pensée qui permettait de circuler d'un niveau à l'autre. Clotho et Lachésis avaient placé un piège dans son bras et le moment était venu de s'en servir.

Ralph sentit le clignement intérieur et la cicatrice de son bras chauffa immédiatement pour atteindre une température critique. La chaleur ne lui brûla pas le bras mais en jaillit en une vague d'énergie. Il eut conscience d'un éclair vert titanesque. Il entendit un hurlement indéterminé puis un bruit d'explosion énorme. Un torrent d'énergie passa près de lui. Il vit que le roi pourpre avait perdu toute sa beauté et toute sa jeunesse. Puis quelque chose s'ouvrit au-dessus d’eux, une trappe des ténèbres dans lesquelles tourbillonnaient des rayons conflictuels de couleur. Le vent parut soulever le roi pourpre pour l'emporter dans ce conduit de cheminée. Les couleurs devinrent plus éclatantes et Ralph en détourna le visage, une main devant les yeux pour s'en abriter. Il comprit qu'un passage venait de s'ouvrir entre le niveau où il se tenait et l'un des niveaux inimaginables empilés au-dessus. Alors Ralph ferma son esprit. Puis en un instant tout cela a disparu. Ralph put voir le centre municipal juste au-dessous de lui. L'avion avait entamé son piqué de kamikaze.

6

Ralph resta un instant pétrifié sur place. Le cri de Lois retentit comme la détonation d’un fusil contre l'oreille de Ralph. Ralph se releva. Un instant, il vit la belle figure de Deepneau. Il le maudit car il savait que Deepneau avait le choix.

La tête de Ralph dépassa un instant de l'appareil et il s'agenouilla à nouveau. Il comprit qu'il était trop tard pour empêcher que Deepneau de faire quelque chose. Deepneau tenait dans sa main la sonnette de porte qui déclenchait la bombe. Ralph prit dans sa poche la boucle d'oreilles restante et laissa dépasser la pointe de l'attache. Il ferma les yeux et se concentra. Il se retrouva au niveau des michrones et Deepneau put le voir. Deepneau avait la voix pesante d'un homme que l'on vient de réveiller et il demanda à Ralph ce qu'il faisait là. Ralph referma la main sur les files et tira.

7

Deepneau comprit ce que Ralph voulait faire et il hurla qu'il allait tout gâcher. Ralph tendit son autre main vers le manche à balai pour éloigner l'avion du centre municipal. Mais Deepneau le frappa avec un marteau sur l'épaule. Il replaça l'avion au-dessus du centre municipal. L'apparition de Ralph dans le cockpit aurait dû complètement paralyser Deepneau. Il n'en était rien. Ralph implora Clotho et Lachésis de l'aider. Comme il était de retour sur le niveau des michrones, il devait se débrouiller tout seul. Le centre municipal ne se trouvait plus qu'à 500 m. En dessous, tout le monde leva la tête. Ralph s'élança de nouveaux sur Deepneau et essaya d'atteindre l'oeil de Deepneau avec la boucle d'oreille. La pointe de métal entailla Deepneau au-dessus de la pommette. Mais Deepneau était toujours solidement accroché au manche à balai de la main gauche.

Ralph tenta de nouveau de s'emparer de la commande mais Deepneau réagit par un coup de poing qui atteignit Ralph à l'oeil gauche. Lois ordonna à Ralph de se dépêcher. Alors il se jeta de nouveau en avant et visa la photo d'Helen et Natalie collée à l'altimètre. Deepneau hurla à Ralph de lui rendre les photos. Il en oublia le manche à balai et Ralph put revoir l'homme qu'il avait entraperçu le jour où Deepneau avait battu Helen, un homme terrifié par les forces qu'on avait lâchées sur lui. Deepneau se mit à pleurer. Ralph le frappa à la gorge. Deepneau porta ses mains à la gorge. Ralph se précipita sur les genoux de Deepneau et fit pivoter une fois de plus le manche sur la gauche. Il sentit une odeur familière. Il vit le véhicule du marchand de crèmes glacées. Le parfum se faisait plus insistant et Ralph se rendit compte que c'était celui de Lois. Elle lui ordonna de se bouger. La chose à l'intérieur de sa tête cligna et il entendit la suite de ce qu’elle lui disait de cette manière surnaturelle plus proche de la pensée que du langage. Lois lui ordonnait de pousser avec les pieds pour que l'avion remonte. Ralph obéit et il se sentit Lois s'élever avec lui dans la colonne d'existence tandis que l'avion parcourait les 50 derniers mètres qui le séparaient du sol. L'avion repris de l'altitude et Ralph sentit une bouffée puissante d'énergie venue de Lois l'envelopper et le tirer en arrière comme une corde de saut à l'élastique. Il aperçut une dernière fois Deepneau affalé contre la paroi de la carlingue mais Deepneau avait disparu dans un linceul de mort. Ralph et Lois se retrouvèrent en train de tomber et de planer.

Chapitre 30.

1

juste avant l'explosion, Suzanne devait déclarer qu'il n'était pas venu à Derry pour prodiguer des soins mais pour partager le chagrin des victimes de la violence. Elle demandait aux habitants de Derry de trouver un moyen de s'aider mutuellement. Les hautes fenêtres de la façade de l'auditorium furent soufflées vers l'intérieur du bâtiment.

2

L'avion rata le camion du marchand de glaces mais cela ne le sauva pas. Il s'écrasa dans le parking et explosa. La bombe fit exploser les installations de l'hippodrome et transforma le parking en un ouragan de lumière blanche. Leydecker qui se tenait sous la marquise et parlait avec un flic de la police d'État fut propulsé à travers l'une des portes ouvertes jusque dans le hall d'entrée. Il heurta le mur du fond et s'effondra, inconscient.

Le flic de la police d'État fut tué sur le coup. Cependant, les voitures alignées protégèrent le centre municipal du gros de l'effet de souffle. La féministe la plus célèbre des États-Unis avait été décapitée par un énorme éclat de verre volant.

La panique ne se déclencha que lorsque les lumières s'éteignirent.

3

71 personnes moururent piétinées pendant la ruée effrénée vers les issues. Ralph aurait pu expliquer aux journalistes que, tout bien considéré, les gens avaient eu beaucoup de chance

4

Au balcon côté nord, Sonia Danville était restée assise pour protéger de ses bras son fils Patrick. Patrick avait fait un superbe dessin représentant une tour sombre dans un ciel bleu pommelé de nuages blancs ventrus. Au pied de la tour s'étendait un champ de roses d'un rouge tellement intense qu'il donnait l'impression de hurler. Sur un côté, se tenait un homme en jean délavé, portant autour des hanches deux ceinturons d'où pendaient deux étuis à revolver. Tout en haut de la tour, un autre homme, en robe rouge, regardait l'assaillant avec une expression de peur et de haine sur le visage. Sonia savait que son fils était un surdoué mais en regardant le dessin, elle eut un frisson glacé dans le dos. Elle avait demandé qui était le personnage en haut de la tour. Patrick avait répondu que c'était le roi rouge. Elle demanda qui était le personnage avec les revolvers. Il répondit. La foule était en train d'applaudir. Sonia n'entendit pas la réponse. Patrick avait dit qu'il avait dessiné Roland, un roi dont il avait rêvé aussi.

5

Sonia regrettait d'avoir emmené son fils. L'enfant protestait car Sonia écrasait son dessin. Alors elle desserra son étreinte. Un terrible hurlement de douleur domina tout le tapage de la salle. Sonia sursauta. Sonia et son fils entendirent des détonations des voitures qui éclataient comme des pétards dans le parking. Sonia tenta de calmer son fils. Sonia avait eu le regard attiré vers la lumière éclatante des fenêtres et ne put voir la décapitation de Susan. Sonia refusa de paniquer. Patrick demanda si les anges viendraient encore les sauver. Sonia répondit qu'ils pourraient s'en sortir tous seuls. Elle attendit que les gens arrêtent de courir partout. Elle étreignit Patrick et lui donna un baiser. Tout à coup, un homme lancé au pas de course fonça sureux. Les mains de Sonia se crispèrent sur les épaules de son enfant puis elle l’écarta brusquement de la trajectoire de l'homme. L'homme disparut et Patrick reprit sa marche. Sonia sentait que son fils restait calme. Elle lui pressentiment que son enfant différent subirait le monde qui n'aimait pas les gens comme lui. Sonia et Patrick réussirent à sortir de l'auditorium sans une égratignure. Les affaires reprirent leur cours ordinaire. Des mondes qui avaient un moment tremblé sur leur orbite reprirent leur assiette et dans l'un de ces mondes, au milieu d'un désert, un homme du nom de Roland se retourna sur sa couche et se rendormit d'un sommeil paisible sous des constellations inconnues.

6

La porte de la sanisette Messieurs s'ouvrit violemment et Lois et Ralph en jaillirent à reculons, accrochés l'un à l'autre, dans un nuage de fumée. De l'intérieur leur parvint le bruit de l'avion qui s'écrasaitpuis de la bombe qui explosait. Il y eu un éclair de lumière blanche et les parois des toilettes se déformèrent. Une seconde plus tard, ils entendirent de nouveau l'explosion. Lois s'effondra sur l'herbe en poussant un cri. Ralph atterrit à côté d'elle. Ils regardèrent le centre municipal. Lois paraissait de nouveau rajeunit. Ralph lui demanda tout allait bien. Il voulut savoir pourquoi elle était venue l'aider. Elle répondit qu'elle n'était pas comme ces héroïnes de romans de gare qui s'évanouissaient pour un lien. Ils s'enlacèrent. Un instant, Ralph se fit la réflexion qu'il existait une similitude entre la solitude et l'insomnie : deux phénomènes insidieux, cumulatifs, sources de discorde, amis du désespoir, ennemis de l'amour. Clotho et Lachésis les attendait au sommet de la petite hauteur. Ils se précipitèrent vers le couple. Ralph entendit le bruit sourd des voitures qui explosaient. Il pensa que la sienne était abandonnée quelque part dans la nature. De toute façon, il était trop vieux pour conduire.

7

Clotho leur demanda s'ils allaient bien. Ralph répondit que c'était Lois qui lui avait sauvé la vie. Lachésis avait trouvé Lois très courageuse. Ralph eut pitié des deux docs car il avait compris leur incapacité à comprendre les émotions des michrones. Ralph tendit la main à Lachésis qui eut un mouvement de recul. Il leur demanda si le garçon était en sécurité. Clotho répondit que c'était le cas. Il leur annonça que huit ans plus tard, Patrick sauverait la vie de deux hommes et que l'un de ces deux hommes ne devait pas mourir pour que persiste l'équilibre entre l'intentionnel et l'aléatoire. Mais Patrick mourrait. Lachésis leur apprit qu'ils devraient redevenir des michrones comme les autres. Ralph rappela à Lachésis et Clotho qu'ils avaient fait une promesse. Clotho répondit que cette promesse ne serait pas oubliée. Lachésis et Clotho saluèrent Ralph et Lois en leur disant qu'ils n'oublieraient jamais le service qu'ils leur avaient rendu. Ralph leur demanda s'ils ne se seraient jamais la main. Les deux docs connaissaient cette coutume mais ils ne la pratiquaient pas. Ralph tendit d'abord sa main à Lachésis car celui-ci paraissait moins nerveux que son collègue. Lachésis tendit sa petite main et les laissa à Ralph l'enfermer dans la sienne. Ralph ressentit un léger picotement tandis que leurs auras se mélangeaient puis se confondaient. Lachésis lui sourit. Clotho tendit à son tour une main hésitante et ferma les yeux comme s'il se préparait à recevoir une piqûre désagréable. Lachésis serra la main de Lois. Clotho en fit de même.

Ralph leur demanda s'ils allaient revenir le voir. Ils acquiescèrent. Il les regarda partir pour le pied de la colline. Ils ouvrirent la porte légèrement déformée de la sanisette saluèrent de la main à Ralph et Lois. Ralph et Lois reprirent leur place ordinaire dans le cadre normal des choses.

8

Un vent de panique soufflait sur Derry tandis que montait l'agitation. Les gens se regroupaient pour regarder l'incendie. Ralph et Lois ne prêtaient aucune attention au tapage. La fatigue semblait s'empilée doucement en eux. Chapin, Don Veazie et Stan Eberly vinrent à leur rencontre. Faye annonça à Ralph ce qui venait d'arriver croyant qu'il y avait eu un millier de morts. Ralph répondit que lui et Lois revenaient tout juste du parc. Il prétendit qu'ils voulaient rentrer chez eux pour regarder les informations à la télévision. Faye remarqua que Ralph était blessé. Lois prétendit que Ralph s'était cogné un arbre. Stan remarqua la chaussure de tennis que Lois avait accrochée à son poignet. Ralph se demanda comment ils allaient expliquer leur aspect quand ils ne pourraient plus se réfugier dans l'ombre, entre les lampadaires. Lois demanda à Ralph si Helen ne craignait plus rien et il la rassura. Il remarqua que l'alliance de Deepneau avait disparu. Lois et échangea la tennis contre ce que Ralph tenait à la main : la photo d'Helen et Natalie. Elle déplia la photo. Ralph pensait que cette photo devait être dans le portefeuille de Deepneau. Ralph reprit la photo et la froissa de nouveau pour la jeter dans une corbeille. Il expliqua à Lois qu’ils pourraient se procurer une autre photo d'Helen et Natalie pour mettre sur le manteau de leur cheminée. Mais le vent emporta la photo. Lois demanda à Ralph s'il l’avait demandée en mariage d'une manière détournée.

9

Lois emmena Ralph chez elle. Il sentit se produire le clignement familier et put voir l'aura de Lois. Elle lui demanda s'il avait envie de faire des galipettes et c'était le cas. Avant de se coucher, Ralph eut du mal à se déshabiller et Lois l’aida. Ils descendirent de niveau tous les deux. Ralph eut la conviction que Lois pensait exactement la même chose que lui : Atropos était sans doute en train de rôder dans le secteur. Ralph dit à Lois qu'il avait perdu définitivement ses boucles d'oreilles mais elle ne lui en voulait pas. À présent, elle n'avait plus peur de son fils et de sa belle-fille parce qu'elle avait un ami pour l'aider. Elle lui demanda de se doucher car il avait sur lui une odeur de poisson.

10

Ralph alla se coucher avec Lois. Il demanda à Lois si elle croyait qu'ils réussiraient à dormir normalement. Elle répondit que oui sans hésiter. Et elle s'endormit aussitôt.

11

Ralph pensa que de toutes les choses qui composaient nos vies, le sommeil était certainement la meilleure. Il réussit à s'endormir et rêva qu'il faisait l'amour avec Lois. Ils dormirent environ 22 heures. Au réveil, Ralph ne réussit pas à monter de niveau et Lois non plus. Ralph eut l'impression d'avoir perdu un objet minuscule mais essentiel à sa vie.

12

Après encore deux nuits d'un sommeil profond et ininterrompu, les auras commencèrent aussi à se dissoudre. La semaine suivante, elles avaient disparu et Ralph commença à se demander s'il n'avait pas simplement fait un rêve étrange. Il lui devenait de plus en plus difficile de croire ce qu'il savait. Il croyait encore, tout au fond de son coeur, que la vieillesse était un mythe ou un sort réservé à des gens différents de lui.

Épilogue : le temps des heures comptées (II).

1

Le 2 janvier 1994, Lois et Ralph se marièrent. Son fils, parole, la conduisit à l'autel. Sa belle-fille n'assista pas à la cérémonie à cause d'une bronchite que Ralph trouva hautement suspecte. Leydecker, le garçon d'honneur de Ralph, portait encore un plâtre au bras droit. Il avait passé quatre jours dans le coma et savait qu'il avait eu beaucoup de chance. Deux membres de son escouade étaient morts. La dame d'honneur de Lois était son amie Simone Castonguay. Joe Plussaj et Trigger Vachon firent des discours. Lorsque Ralph et lois quittèrent la réception, Dorrance les félicita. Il avait été invité mais n'aimait pas trop aller à des cérémonies. Il leur offrit un livre de poésie de Stephen Dobyns. Avant de partir il leur dit qu'ils avaient fait quelque chose de sensationnel et que les maîtres du temps étaient très contents.

Ralph ne savait pas ce que Dorrance avait voulu dire. Il avait l'impression qu'il aurait dû savoir. La cicatrice de son bras avait commencé à le picoter. Ralph pensait que Lois devait savoir.

2

Le jour du mariage de Ralph et Lois, un certain clochard ivrogne doté d'une aura d'un vert éclatant parcourait d'un pas lourd Strawford Park. Comme toujours, il était à la recherche de bouteilles consignées et de produits de récupération. Près de la sanisette Messieurs, il vit luire quelque chose de métallique. C'était l'alliance de Deepneau. Lorsqu'il traversa d'un pas précipiter le carrefour, le clochard fut renversé par un bus. L'alliance roula dans le caniveau puis dans les égouts. À Derry, les choses qui disparaissaient dans les égouts avaient l'art de réapparaître un jour.

3

Ralph et Lois, par la suite, ne vécurent pas éternellement heureux. Ils vécurent cependant très heureux pendant pas mal de temps. Ils se souvenaient tous les deux de leur premier conjoint avec amour et tendresse mais au fond de leur coeur, ils considéraient pourtant que c'était leur plus belles années. Pour leur premier Noël en tant qu'époux, Lois offrit à Ralph un chiot. Ralph l’appela à Rosalie.

4

Les cinq années suivantes se passèrent bien pour Helen et Natalie. Quelle manière frugale dans un appartement du quartier est de la ville. Puis, en juin 1994, Helen avait fini par toucher quelque chose des assurances grâce à Leydecker. La compagnie d'assurances de Deepneau avait commencé par refuser d'honorer le contrat de Deepneau sous prétexte qu'il s'était suicidé. Puis ils avaient proposé un arrangement substantiel. Un ami avocat de Leydecker avait réussi à les persuader de payer. Leydecker avait revu Helen chez Lois et Ralph et il l'avait présenté à son ami avocat Howard Hayman. Helen reçut 60 000 $. Elle s'acheta une maison sur Harris Avenue. Helen et Leydecker se virent pendant une bonne partie de l'été mais ni Lois ni Ralph ne furent particulièrement surpris lorsque Leydecker cessa brusquement de lui faire la cour.

5

Ralph et Lois gardèrent souvent Natalie avec un immense plaisir. Helen s'était acheté une Volvo d'occasion. A l'arrière, elle avait placé un autocollant qui proclamait : une femme a besoin d'un homme comme un poisson d'un vélo. Ce sentiment ne surprit par Ralph. Il se disait souvent que cette formule cassante résumait ce que Deepneau avait laissé de plus sinistre à sa veuve. Il pensait qu'Helen avait été trahie de quelque manière obscure et qu'elle ne le savait même pas.

6

Faye fit victime d'une crise cardiaque pendant qu'il établissait le calendrier de son futur tournoi d'échecs. Il mourut à l'hôpital. Il était dans la chambre 315. Ralph fut envahi par un sentiment violent de déjà vu quand il se rendit à l'hôpital pour voir son ami. En tenant la main de son ami, Ralph eut une pensée étrange à l'esprit : ils se tiennent ici, dans le coin, et nous observent.

7

Entre 1994 et 1998, la vie continua comme elle faisait toujours dans des villes comme Derry. C'était la vie, souvent peu satisfaisante, fréquemment cruel, en générale ennuyeuse, parfois belle, exceptionnellement captivante. Les principes fondamentaux continuaient à s'appliquer.

Au début de l'automne 1996, Ralph se convainquit qu'il avait un cancer du côlon. En fait de cancer, il s'agissait en réalité d'une hémorroïde. Le docteur lui fit une ordonnance avec laquelle Ralph alla revoir Plussaj. Un jour, pendant l'hiver 1997, Lois descendit une des pentes de Strawford Park sur la soucoupe volante en plastique de Natalie. Elle s'écrasa sur le côté de la sanisette des dames. Elle se fit une entorse au genou et mal au dos, ceux-là firent rire Ralph même s'il savait que son comportement était fort peu charitable.

8

Ralph garda des rapports d'amitié avec Leydecker et Plussaj. Mais avec Lois, ils allaient presque partout ensemble. Ralph était en bonne santé et il en profita avec sérénité jusqu'à la mi-mars 1998. Puis il s'éveilla un matin à 5:49. Il entendit le tic-tac du compte à rebours.

9

Le lendemain matin, il s'éveilla à 5:47, le surlendemain à 5:44. Son sommeil continua de s'amenuiser. Il accepta ce qui se passait avec calme. Lois se rendit compte que Ralph avait les yeux cernés. Il mentit en disant qu'il avait tout le sommeil dont il avait besoin. Un jour il se réveilla à 4:42 avec une intense chaleur qui courait comme un filament dans son bras. Il sentit que le moment de la promesse était presque arrivé. Il ne se souvenait plus de quelle promesse il s'agissait.

10

Au début de juin, Helen et Natalie débarquèrent un jour à l'improviste pour raconter à Ralph et Lois qu'elles étaient allées à Boston avec Mélanie, l'amie intime d’Helen. Helen et Mélanie avaient assisté à une sorte de congrès féministe. Helen avait remarqué que Ralph n'allait pas bien. Helen et sa fille portaient des casquettes des Red Sox de Boston. Cela fit penser à Ralph à la façade sur Red Apple sans qu'il comprenne pourquoi.

Ralph se réveilla encore plus tôt avec le nom d'Atropos à l'esprit. Il se rappela qu'Atropos avait volé le chapeau de Bill mais ne se rappelait plus qui était Atropos. Il se rappelait juste qu'Atropos possédait un scalpel rouillé.

11

Au cours de la troisième semaine de juin, alors qu'il faisait une chaleur torride, Ralph vit de nouveau les auras.

12

Au mois de juillet, Ralph se surprit à éclater en sanglots de plus en plus souvent et sans raison apparente. Une voix intérieure lui disait que c'était bientôt terminé.

13

Alors qu'il était assis sur un banc, Ralph demanda à la voix intérieure pourquoi c'était presque terminé. Il se réveillait maintenant vers 3:30 du matin. Il avait repris les longues marches en ayant le sentiment de faire des pèlerinages en visitant une dernière fois les endroits de Derry qu'il aimait. Tout au fond de la tête de Ralph, la sensation de clignement intérieur se produisit soudain. Un observateur d'oiseaux qui vivait sans le savoir au milieu d'une superbe aura d'or s’approcha de Ralph, un instrument contondant à la main. Ralph se rendit compte que l'homme était sous le choc. Il ne voyait plus Ralph parce que celui-ci était monté suffisamment haut pour disparaître de ce niveau. Tout d'un coup, les pièces du puzzle se mirent à virevolter dans l'esprit de Ralph.

14

Six jours plus tard, Ralph se réveilla à 3:15 du matin et il sut que le moment de tenir sa promesse était venu.

15

C'était la première semaine du mois d'août. Ralph dit à Lois qu'il avait envie de s'acheter un esquimau au Red Apple. Lois voulut l'accompagner mais il refusa. Alors elle comprit que quelque chose n'allait pas. Loi saisit le bras droit de Ralph pour l'examiner. La cicatrice brillait, rouge, éclatante.

La mémoire de Lois lui revint. Elle demanda à Ralph ce qu'il devait faire. Ralph s'en alla et Lois courut après lui et le prit par le bras. Elle se mit à pleurer. Ralph saisit Lois par les avant-bras. Il lui expliqua qu'il fallait absolument qu'il s'en aille. Lois ne voulait pas le perdre. Ralph accepta que Lois l’accompagne un moment. Ralph lui dit que Natalie devait mourir ce matin et il n'avait pas l'intention de laisser cela arriver. Elle ne voulait pas le laisser partir. Mais il avait fait une promesse et il avait tout juste à temps. Elle lui demanda de ne pas tenir sa promesse. Elle préférait qu'il brise sa promesse plutôt que son coeur.

Ralph voulait tenir sa promesse. Lois le regarda, désespérée, mais ne fit pas d'autre tentative pour le retenir. Elle se mit à pleurer. Il lui demanda de venir avec lui et elle accepta. Elle demanda ce qui allait arriver à Natalie et Ralph répondit qu'elle serait renversée par une Ford verte. S'il ne prenait à sa place, Natalie serait écrabouillée sur Harris avenue sous les yeux de sa mère.

16

lois avaient quelques pas de souvenir de ce qui s'était passé sous le chêne foudroyé. Ralph lui expliqua ce qui s'était passé avec Atropos. Atropos avait menacé de faire payer Natalie si Ralph continuait à se mettre en travers de son chemin. Il expliqua à Lois comment il avait arraché à Clotho et Lachésis la promesse de faire échec à Atropos afin que Natalie fût sauvée.

Ralph apercevait déjà le Red Apple. Mme Perrine attendait à l'arrêt de bus. Aucun signe d'Helen et Natalie.

17

Mme Perrine raconta la scène aux journalistes du Derry News. Elle leur dit que Ralph était quelqu'un de très bien. Elle avait reconnu le conducteur de la Ford verte. Pete Sullivan avait distribué le journal pendant six ans. Le chauffeur était au volant avec sa mère à ses côtés, en conduite accompagnée. Perrine pensait que ce n'était pas de sa faute. Mme Perrine était convaincue que Ralph était sorti de nulle part pour sauver la petite fille.

18

L'accident fit la une du Derry News. Esther Perrine s'était montrée suffisamment pittoresque pour avoir droit à un entrefilet et une photo. L'article était titré : c'est comme s'il était sorti de nulle part. Quand elle le lut, Mme Perrine ne fut nullement surprise. Le journaliste n'avait pas compris que ce n'était pas qu'une impression. Ralph était réellement sorti de nulle part.

19

Ralph expliqua à Lois qu'il avait eu ce qu'il voulait parce que Clotho et Lachesis ainsi que les forces qu'il y avait derrière au niveau supérieur voulaient désespérément arrêter Deepneau.

Les niveaux supérieurs voulaient arrêter Deepneau parce qu'il y avait une personne dont ils tenaient à préserver la vie à tout prix dans le centre municipal. Ralph avait pu leur faire comprendre qu'il éprouvait pour Natalie le même sentiment qu'ils éprouvaient pour leur môme.

C'est à ce moment-là qu'il avait fait sa promesse et qu'on lui avait entaillé le bras. Il parlait de cela dans son sommeil et Lois l'avait entendu. La promesse était d'échanger sa vie contre celle de Natalie. Ralph transpirait énormément. Rosalie se tenait de l'autre côté de la rue en face de la maison où Helen et Natalie avaient habité. Lois éprouva soudainement de la terreur. Natalie arriva, une corde à sauter au bras droit. Nathalie aperçut Rosalie.

20

Ralph pensait qu'Atropos ne pouvait pas le voir car il était concentré sur Rosalie et sur Natalie. Atropos portait une casquette des Red Sox, celle de Natalie.

La chienne avait peur d'Atropos, tout comme la première Rosalie. Atropos essayait d'empêcher Rosalie de détaler avant le moment voulu. Natalie avançait en direction du chien.

Ralph pensa que cela arrivait trop vite. Il pensa que la vie était une roue. Tôt ou tard, tout ce que l'on croyait avoir abandonné en cours de route faisait sa réapparition. Pour le pire ou le meilleur, les choses revenaient. Nathalie s'agenouilla à côté de la chienne et se mit à la caresser. Puis il décida de la ramener chez elle. De l'autre côté de la rue, Helen sortit du Red Apple et le dernier élément de la vision que Atropos avait montré à Ralph se mit en place.

Hélène tenait une miche de pain sous le bras. Elle avait sa casquette des Red Sox sur la tête.

Ralph prit Lois dans ses bras et l'embrassa avec fougue en lui disant qu'il l'aimait de tout son coeur et de ne pas l'oublier. Alors loi hurla à Atropos de leur ficher la paix. Natalie s'immobilisa brusquement et regarda Lois avec de grands yeux étonnés. Rosalie s'arrêta derrière la petite. Ralph disparut comme une fumée.

21

Atropos, entendant ces cris, se tourna et il vit Lois et Ralph de l'autre côté de la rue. Il envoya Ralph se faire foutre en prétendant que la petite fille était à lui. Ralph entendit la voix de Lachésis qui lui demandait de monter aussi haut que possible. Ralph sentit le clignement au milieu de sa tête et soudain le monde s'emplit de couleurs et d'éclat. Il fut entraîné loin de Lois. Il comprit vaguement que s'il existait quelque chose comme un Intentionnel supérieur, il venait de le rejoindre. La fillette ne jeta un regard dubitatif à Lois, puis il lui fit un signe hésitant de la main. Tandis que la petite fille s'engagea dans la rue elle lança à sa mère qu'elle n'avait pas retrouvé sa casquette. La voiture verte se dirigeait vers la fillette, mais très lentement. Ralph reconnut le chauffeur et il ne douta pas de ses sens. Il trouva parfaitement logique que l'homme au volant du véhicule fût celui qui lui livrait naguère son journal.

Atropos bondit et donna une claque sur le derrière de la chienne. Puis il adressa un dernier ricanement mauvais à Ralph tandis que Rosalie se jetait dans la rue dans la trajectoire de la Ford. La fillette comprit ce n'était pas après elle ni après la chienne que criait la vieille dame, mais après quelque chose de tout à fait différent. Pete ne vit pas la fillette. Il donna un coup de volant pour éviter la chienne, manoeuvre qui eut pour effet de braquer la voiture dans la direction de la fillette. Atropos sauta de joie. Helen, dans un mouvement de ralenti, laissa tomber son pain et hurla à sa fille de faire attention. Ralph courut. Il provoqua le clignement dans son esprit et revint pour la dernière fois dans le monde des michrones. Il poussa Natalie à la hauteur de la poitrine et de l'estomac aussi fort qu'il le put et envoya rouler d'où elle venait. Ralph entendit Atropos s'égosiller, furieux et incrédule. Ralph eut le temps de voir Natalie assise dans le caniveau, en larmes mais indemne et de sentir Atropos sur le trottoir secouant les poings. La voiture l'écrasa mais il ne ressentit absolument rien.

22

Lois ne put jamais oublier le bruit affreux que produisit le retour de Ralph dans Harris Avenue, ni les traces sanglantes qu'il laissa derrière lui avant que la voiture ne s'arrête. Elle n'avait qu'une envie, hurler, mais une voix intérieure profonde lui dit que si elle s'y laissait laisser-aller, le choc de l'horreur et la canicule la feraient s'écrouler sur le trottoir et que lorsqu'elle reviendrait à elle, Ralph ne serait plus. Au lieu de cela elle courut donc et arriva près de Ralph. Il avait les yeux ouverts et le regard conscient. Elle le prit dans ses bras en lui disant qu'il avait réussi son coup, cette fois. Elle l'embrassa sur la joue et se mit à pleurer. Ralph lui dit qu'il l'aimait et Lois lui dit qu'elle l’aimait aussi. Ralph vit Lachésis. Il agita sa main droite par deux fois en l'air. Il salua Clotho. Il eut le temps de dire à Lois que chaque matin en se réveillant auprès d'elle, c'était comme se réveiller jeune et tout voir de neuf. Elle lui dit que c'était aussi comme ça pour elle. Il lui dit que le tic-tac s'était arrêté et Ralph s'arrêta.

23

Clotho et Lachésis restèrent à regarder Lois qui pleurait sur Ralph. Lachésis trouvait que Ralph était un homme merveilleux. Clotho demanda à Lachésis s'ils devaient la lui rendre.

24

Natalie demanda à sa mère qui était petits hommes et pourquoi ils touchaient Lois.

25

loi releva brusquement la tête, les yeux agrandis par la surprise et son chagrin oublié. Elle ressentit la paix. Elle se retrouva dans un lieu obscur, rempli de l'odeur douce du foin et des vaches, un endroit transpercé par des centaines de rayons de lumière éclatante. Elle comprit qu'elle voyait représenté un univers que Ralph voulait lui faire connaître. Pete dit à Lois qu'elle ne pourrait jamais le pardonner et elle répondit que si. Lois passa une main sur le visage de Ralph, ferma les yeux et garda sa tête sur les genoux jusqu'à l'arrivée de la police. Pour elle, il paraissait s'être endormi. Elle vit alors que la longue cicatrice qui courait sur son bras droit avait disparu.

 

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