Histoires d'automates III
La fourmi électronique (Philip K. Dick).
Garson Poole se réveilla dans son lit d'hôpital. Il se rendit compte qu'il n'avait plus de main droite mais il n'éprouvait aucune douleur. Il y avait un téléphone sur la table de chevet. Il s'en servit et l'instant d'après apparut sur l'écran devant lui Louis Danceman, chargé de la direction de Tri-Plan. Danceman fut heureux de le voir vivant. Mais Poole lui annonça qu'il avait perdu sa main droite. Danceman répondit que tout s'arrangerait. On lui en grefferait une autre. Garson voulu savoir depuis combien de temps il était à l'hôpital. Danceman lui apprit que cela faisait quatre jours. À l'usine tout allait à merveille. Ils avaient reçu des commandes époustouflantes de trois services de police différents, tous sur la Terre. Garson lui demanda de l'aider à sortir de l'hôpital. Mais Poole ne pouvait pas. Il fallait d'abord lui greffer une nouvelle main. Mais Garson souhaitait désespérément retrouver son milieu familier. Il se remémora son accident. Il avait eu de la chance. Danceman lui demanda si Sarah Benton était avec lui. Garson lui dit que non. Un médecin entra. Il était accompagné de deux infirmières. Garson raccrocha. Le médecin lui reprocha d'avoir téléphoné. Le médecin savait que Poole était un homme qui avait réussi puisqu'il était propriétaire de Tri-Plan électronique. Mais le médecin lui dit qu'il n'était pas un homme. Selon lui, Garson était une fourmi électronique. Il s'en était rendu compte en procédant à l'examen de sa main droite abîmée. Elle était remplie d'éléments électroniques. Poole demanda ce qu'était une fourmi électronique. Mais il le savait. Une infirmière répondit que c'était un robot organique. Le docteur lui annonça qu'il arrivait une fourmi électronique chaque semaine à l'hôpital. Certaines pensaient être réellement des humains. Le médecin lui annonça qu'un véhicule de l'hôpital le transporterait dans une installation où il serait possible de réparer sa main à un tarif raisonnable. Il pourrait ensuite retourner travailler à son bureau. Maintenant que Poole connaissait sa vraie nature, il se demandait si Danceman et Sarah étaient également informés. Il se demandait s'il avait réellement dirigé la société ou s'il était un homme de paille. Le médecin lui réclama les frais d'hôpitaux. Poole rétorqua qu'il ne devait rien payer puisqu'il n'était pas humain. Mais infirmière répondit qu'il avait fallu procéder à des examens pour découvrir qu'il n'était pas humain. À l'installation de réparation, Poole fit réparer sa main. Il était fasciné en la regardant car elle paraissait organique à l'extérieur. Du sang véritable emplissait les veines. Mais à l'intérieur il y avait des éléments électroniques miniaturisés. Il dut payer une semaine de salaire pour sa nouvelle main. Il demanda au technicien s'il y avait une garantie. La main était garantie 90 jours pièces et main-d'oeuvre. Sauf en cas de mauvais usage excessif ou volontaire. Un des techniciens lui demanda s'il se faisait passer pour un humain volontairement. Garson rétorqua que ce n'était pas le cas. À présent qu'il savait la vérité, il voulait continuer de passer pour un humain. Mais un des techniciens lui expliqua qu'il n'avait jamais deviné sa vraie nature parce qu'il avait été programmé de façon à ne pas la remarquer. À présent, Poole aurait tout autant de mal à découvrir pourquoi on l'avait construit et pour qui il travaillait. Poole pensait être un esclave et mécanique. Il paya et s'en alla. Il rentra chez lui. Il se versa une rasade de whisky. Il pensait être un objet inanimé qui singeait l'être animé. Il se sentait vivant et pourtant il avait une impression différente de lui-même. Il voulait se supprimer même s'il était probablement programmé pour ne pas le faire. Il n'était pas libre mais à présent il le savait et cela changerait tout. Il se déshabilla pour chercher la matrice de son programme. Il téléphona pour obtenir les services de l'ordinateur de classe BBB. Ce service était payant alors il plaça sa carte de crédit devant l'écran. Il ordonna à l'ordinateur de procéder sur lui à un balayage visuel. Puis il lui ordonna de trouver le mécanisme de programmation qui dirigeait son comportement. L'ordinateur lui recommanda de retirer son panneau de poitrine. Poole obtempéra. L'ordinateur distingua les modules de contrôle mais il devait examiner les données dont il disposait avant de répondre. Alors il raccrocha. L'écran de son téléphone s'éclaira. On lui demandait de l'argent pour obtenir la réponse qu'il avait attendue. Le rouleau de ruban perforé au-dessus de son mécanisme cardiaque n'était pas une tourelle de programmation mais un relais d'apport de réalité. Toutes les stimulations sensorielles que Poole recevait provenaient de cet instrument. Il ne devait donc pas y toucher. Il ne semblait pas qu'il avait un circuit de programation. L'écran s'éteignit. Alors Poole se rhabilla. Il alluma une cigarette. Il savait que son univers reposait entre ses doigts. S'il retirait le ruban de réalité il perdrait le contrôle de celle-ci. Il téléphona à son bureau. Danceman apparu sur l'écran. Il lui demanda un jeu complet de micro outillage et un appareil agrandisseur. Une demi-heure plus tard, un des contremaîtres de l'atelier apporta ce qu'il avait demandé. Le contremaître installa le lourd écran d'agrandissement. Pendant ce temps, Poole se demandait si ce n'était pas un suicide qu'il envisageait. Le contremaître s'en alla. L'agrandisseur lui permit de voir ce qu'il y avait sur le ruban. C'était des milliers de perforations. Il comprit comment oblitérer les stimulations qu'il devait éprouver pendant plusieurs heures. Alors il utilisa un pinceau pour recouvrir une bonne partie du ruban avec du vernis. Il avait ainsi effacé les stimulations pour une demi-heure environ. Cinq heures et demie plus tard, il était assis chez Kracter, un splendide bar de Manhattan. Il buvait un verre avec Danceman. Danceman lui trouva mauvaise mine lui demanda s'il avait appris quelque chose sur son propre compte. Ainsi Danceman savait. Il le savait depuis que Poole avait pris la direction de la société. On lui avait expliqué que les propriétaires réels de Tri-Plan se trouvaient dans le système de Proxima. Ils avaient donc besoin d'une fourmi électronique pour les remplacer. Les propriétaires réels étaient 2000 actionnaires. Marvis Bey et son mari Ernan disposaient de 51 % des voix. Ils habitaient sur Proxima 4. Danceman était chargé de faire croire à Poole était seul à régir la société. En réalité, Danceman lui communiquer les instructions que les Bey lui transmettaient. Tout à coup, un pan du mur disparut et en même temps plusieurs personnes assises à des tables voisines. De l'autre côté de la grande baie vitrée du bar, les toits de New York cessèrent soudain d'exister. Il demanda à Danceman s'il avait remarqué des changements. Danceman répondit non. Ainsi chacune des perforations obturées signifiait la disparition d'un objet quelconque dans son plan de réalité. Alors il rentra chez lui. Il emprunta l'engin volant de Danceman qui se trouvait dans le parking du bar. Mais il ne voyait toujours pas les toits de New York. Il volait vers le néant. Puis tout à coup New York réapparut. Alors il fila vers son appartement. Chez lui il trouva Sarah qui regardait la télévision. Elle était venue chez lui car elle ne l'avait pas trouvé à l'hôpital. Elle avait gardé la clé qu'il lui avait laissée après leur affreuse dispute. Il se déshabilla et retira son panneau de poitrine. Il annonça à Sarah qu'il avait découvert qu'il était une fourmi électronique. Sarah se mit à pleurer. Elle le considérait comme un si bon patron et à présent tout allait changer. Il découpa une bande horizontale très étroite dans le ruban plastique qui comportait une marge non perforée puis il trancha le ruban même. Cela correspondait à quatre heures de déroulement avant la tête de lecture. Il disposa ensuite le tronçon détaché à angle droit par rapport à la tête de lecture et le rattacha à la bande originale. Cela lui permettrait d'avoir un temps mort de 20 minutes dans le courant continu de sa réalité. Cela commence à quelques minutes après minuit. Sarah lui demanda s'il était en train de se réparer et il répondit qu'il se libérait. Selon sa théorie, placer un ruban vierge, sans perforations, cela signifiait l'absence de stimulations. Sarah voulut partir mais il l'en empêcha. Il lui proposa de regarder la télévision. Il fallait apprendre à devenir sélectif pour percevoir ce qu'on voulait tout en rejetant ce qui ne nous intéressait pas. D'autant plus que les gouvernements avaient supprimé les stations privées de la télévision. Après avoir regardé la télévision, ils se mirent au lit. Mais Poole n'éteignit pas la lumière. Il attendait minuit. Il expliqua à Sarah ce qui allait se passer. Elle devait l'observer avec soin. Il lui conseilla de s'armer. Assise sur le lit, elle le contempla avec une frayeur folle alors il alla chercher le pistolet anti-agressions qu'elle avait dans son sac. Les dernières stimulations de Poole s'évanouirent. La pièce se referma et croula sur elle-même, comme arrachée de la réalité. Les ténèbres absolues remplacèrent tout. De plus, Poole n'entendait rien. La conscience de son propre corps avait disparu en même temps que le reste de l'univers. Pour se forcer à la patience, il tenta d'établir un dictionnaire en essayant de dresser la liste de tout ce qui commençait par la lettre A. Puis la lumière revint. Deux hommes se penchaient sur lui. C'était des ouvriers de l'entretien qui avaient travaillé sur son corps. Sarah avait eu si peur qu'elle avait appelé Danceman. Elle expliqua à Poole qu'il avait perdu connaissance. Elle avait attendu pendant deux heures et demie. Puis elle avait téléphoné à Danceman. Les des ouvriers étaient arrivés à 4:30. Ils avaient travaillé jusqu'à 6:15 pour réparer Poole. Un des ouvriers lui expliqua ce qu'il avait provoqué en trafiquant le ruban. La bande avait cessé d'aller de l'avant ce qui avait provoqué l'arrêt du mécanisme. L'ouvrier lui annonça ce que cela lui coûterait. Un des ouvriers lui conseilla de limer un peu l'épaisseur du ruban la fois suivante. Ainsi, le mécanisme ne se bloquerait pas. Poole demanda aux ouvriers ce qui arriverait s'il ne passait pas du tout de ruban sous la tête de lecture. Un des ouvriers lui répondit que tous les influx neuro-électriques franchiraient les coupures de sécurité et se mettraient en court-circuit. Ce serait la fin de la mécanique. Poole ne le croyait pas. Il était persuadé de pouvoir tout connaître simultanément et d'assimiler l'univers dans sa totalité. Aucun humain ne pouvait accomplir cela. Les ouvriers lui expliquèrent que cela le ferait griller d'un bout à l'autre. Puis les techniciens s'en allèrent. Sarah demanda à Poole s'il allait recommencer. Il répondit pourtant qu'il en avait bien l'intention. Il voulait la réalité ultime et absolue, durant une micro-seconde. Alors il perça plusieurs trous au hasard sur le ruban aussi près de la tête de lecture qu'il le put car il n'avait pas envie d'attendre longtemps. Il prévint Sarah que quelque chose pourrait se manifester. Tout à coup il vit apparaître un vol de canards au centre de la pièce. Puis ce fut un banc dans un parc sur lequel était assis un homme d'un certain âge qui lisait un journal déchiré. Évidemment, Sarah n'avait rien vu. Ce fut très court. Il pensait que Sarah elle-même n'était pas réelle. Elle en fut offusquée. Poole voulait couper tout le ruban pour connaître la réalité entièrement. Sarah regretta de ne pas être allée au bureau mais elle ne pouvait pas le laisser seul. Elle ne voulait pas passer le reste de sa vie à se demander ce qui serait arrivé si elle n'avait pas essayé de l'empêcher de se tuer. Il avait peur mais il mit son projet à exécution. Il lui restait 30 à 40 minutes avant de voir le résultat. Il lui demanda de s'en aller. Comme la tension était trop forte pour son système, il voulait recoller les deux bouts de la bande. Mais c'était trop tard, la bande était passée. Il appela Dieu en aide. Il vit des pommes, des pavés et des zèbres. Il sentit la chaleur puis le vent du Nord. Sarah était tout autour de lui de même que Danceman ; New York luisait dans la nuit. Du beurre se liquéfiait sur sa langue en même temps que l'assaillaient des odeurs et des saveurs diverses. Il se disait qu'il avait vécu et qu'il ne vivrait jamais et en même temps des pensées lui venaient avec tous les mots et tous les sons. Il voulut dire quelque chose à Sarah mais une spirale de fumée sortit de sa bouche. Puis ils s'affaissa sur les coudes et les genoux et s'écrasa lentement en un tas brisé. Sarah comprit qu'il était mort. Sarah téléphona. Elle savait que Poole avait imaginé qu'elle aussi disparaîtrait puisque selon lui elle n'était qu'un facteur de stimulations sur son ruban. Elle annonça à Danceman que Poole s'était détruit lui-même sous ses yeux. Danceman en était soulagé. Sarah lui dit que c'était merveilleux. Danceman lui ordonna de rentrer chez elle pour se reposer. Mais elle remarqua quelque chose. Elle pouvait voir à travers ses mains. Les murs de la pièce devenaient moins nets. Elle réfléchit et comprit qu'il fallait recoller les bouts de la bande mais elle ne savait pas comment. Elle commença à ne plus éprouver de sensations.
Le robot vaniteux (Henry Kuttner et C. L. Moore).
Gallegher pratiquait les sciences comme un musicien qui joue d'oreille. Il aimait répéter qu'il était un génie intuitif. Quelquefois les résultats qu'il obtenait étaient franchement extravagants, comme ce qui s'était passé lors de l'affaire de l'armoire temporelle. Affalé sur le divan du laboratoire, il manipulait son orgue à liqueurs. Jaillissant d'un tube, une giclée de vermouth coula lentement dans sa bouche béante. Il essaya de se rappeler quelque chose qui avait un rapport avec le robot. Enfin, cela n'avait pas d'importance.
Joe, le robot, lui demanda de parler moins fort quand il lui adressait la parole. Il lui ordonna de se débarrasser du chat. Harrison Brock entra. Gallegher connaissait probablement cet homme. Mais il n'en était pas sûr. Harrison voulait savoir si Gallegher avait accompli la tâche qu'il lui avait commandée.
Il était venu avec un chèque en poche. La mémoire de Gallegher lui revenait. Il avait vu Harrison la semaine précédente. Il reconnut s'enivrer fréquemment prétextant que cela libérait son subconscient. Ce qui lui permettait de travailler. Il prétendait que ses meilleures inventions avaient été réalisées après ses plus grandes cuites. Tout à coup, il perdit le fil de ses pensées et considéra son visiteur avec hébétude. Le robot réclama le silence. Gallegher demanda à Harrison de ne pas y prêter attention. Il venait d'achever ce robot cette nuit. il avait fabriqué ce robot sous l'emprise de l'ivresse mais il ne savait pas pourquoi. Ce robot passait son temps à s'admirer. Harrison commençait à s'énerver. Si Gallegher ne l'aidait pas alors il serait ruiné.
Mais Gallegher se vantait de son ivresse puis au réveil il constatait qu'il avait fabriqué un robot sans avoir la moindre idée des fonctions de sa créature. Il n'avait jamais pris aucune leçon de son existence. Il prétendait être un enfant prodige de la science.
Agacé, Harrison se sentit obligé de rappeler à Gallegher qu'il était le propriétaire de Vox-View Pictures mais le robot lui dit qu'il était inutile d'insister. Puis des rouages, s'engrenèrent dans son cerveau transparent et il se mit à saluer Harrison poliment. Puis il déclara qu'il était inutile d'insister car l'argen ne l'intéressait pas. Il ne voulait pas travailler pour Harrison. La conscience de sa beauté lui suffisait. La gloir ne signifiait rien pour lui. Harrison rétorqua qu'il n'était pas venu ici pour propose un rôle à un robot. Harrison prétendit que le robot était dingue. Mais Joe lui ordonna de ne pas parler aussi fort tout en continuant de s'admirer dans son miroir. Gallegher se rendit compte qu'il avait dû doter d'un certain nombre de facultés remarquables son robot. Il aurait tant voulu se souvenir pourquoi il avait fabriqué ce robot.
Harrison voulut rappeler à Gallegher pourquoi il était venu lui proposer un marché une semaine plus tôt. Il lui avait proposé 10 000 crédits pour une solution qu'il cherchait. Alors Gallegher proposa de lui vendre le robot pour les 10 000 crédits. Harrison pourrait faire jouer le robot dans un de ses films. Mais Harrison répondit qu'il ne pourrait plus jamais tourner un seul film si Gallegher ne lui apportait pas la réponse qu'il lui avait demandée.
Mais Gallegher avait tout oublié à cause de son ivresse. Alors il lui demanda de tout expliquer à nouveau. Harrison lui parla de sa société de télévision qui était la plus grosse. Mais son concurrent Sonatone était en train de l'acculer à la faillite. Gallegher il arrivait pas à y croire car il pensait que Vox-View Pictures proposait des productions qui surclassaient toutes les autres. Alors Harrison lui expliqua que son concurrent avait usé de son influence pour faire élire l'administration actuelle. Harrison voulait faire interdire les clandéramas qui diffusaient les programmes de Sonatone dans les anciennes salles de cinéma qui avait été fermées avec la démocratisation de la télévision. Les clandéramas consistaient à projeter une image de télévision tridimensionnelle sur grand écran. Mais Sonatone avait interdit que son système soit monté sur d'autres appareils que les siens. Les clandéramas diffusaient les programmes de Vox View Pictures pour un prix très faible. Et les gens rendaient leur récepteur individuel. C'était la faillite assurée pour Harrison. Il ne pouvait pas baisser son prix de location des récepteurs individuels. Sonatone commanditait les clandéramas. Une semaine plus tôt donc, Gallegher avait accepté d'aider Harrison. Le robot se mit à nouveau à parler pour dire qu'il ne travaillerait jamais pour Harrison. Gallegher lui ordonna de se taire. Puis il demanda à Harrison de visiter ses studios. Harrison lui fournit un laissez-passer. Gallegher prétendit qu'il avait la situation en main. Harrison lui dit alors qu'il ferait tout ce qu'il voulait en échange. Gallegher demanda de rencontrer une vedette qui travaillait pour Harrison, Silver O'Keefe. Harrison s'en alla pendant que Joe lui dit qu'il espérait ne jamais le revoir car il le trouvait trop laid. Gallegher se demandait pourquoi il avait conçu son robot transparent avec son cerveau dans le ventre. Joe se mit à chanter. Tous les chiens du voisinage se mirent à hurler. Gallegher voulut sortir mais à ce moment-là Kennicott arriva. Gallegher lui proposa à boire mais Kennicott était venu chercher son argent. Il avait vendu des diamants à Gallegher qui l'avait payé avec un chèque sans provision. Gallegher ne pouvait pas lui rendre ses diamants car il s'en était servi pour une expérience. Il avait oublié laquelle. Comme Joe continuait de se plaindre, Gallegher s'empressa de pousser Kennicott dans la rue et referma la porte derrière lui. Il tenta de lui expliquer qu'il venait de conclure un contrat important et quand il serait payé, il pourrait rembourser Kennicott. Kennicott ne le croyait pas. Il lui donna deux jours pour le rembourser. Gallegher lui demanda au il pouvait trouver un clandérama et Kennicott lui répondit qu'il n'avait qu'à descendre en ville. Gallegher aurait bien mais savoir pourquoi il avait acheté des diamants car il avait oublié. En réalité, il s'était servi des diamants pour fabriquer Joe. Il se rendit dans un bar pour boire un trois gins. Puis il demanda au barman où il pouvait se procurer des billets de clandérama. Le barman lui indiqua une adresse. Il entra dans le clandérama qui rappelait les salles de cinéma de 1980. La salle était presque pleine. L'atmosphère était nauséabonde et la direction faisait manifestement des économies de bouts de ficelle. Il fallait vraiment le frisson de l'illégalité pour inciter les gens à entrer. On utilisait manifestement un agrandisseur Magna pour agrandir l'image d'un téléviseur Vox-View. Les téléviseurs Vox-View n'étaient pas protégés par une licence. Une des plus célèbres vedettes de Brock s'exhibait au bénéfice des amateurs de clandérama. Au bout d'un moment, Gallegher s'en alla. Il remarqua qu'il y avait un policier parmi les spectateurs. Puis Gallegher entra dans une salle de Sonatone. Évidemment, comme cette salle était légale le tarif était beaucoup plus élevé. Il avait envie de faire une comparaison. Le Magna qui équipait cette salle était le même que celui du clandérama qu'il venait de quitter. Mais la salle était un véritable palais qui dispensait gratuitement des liqueurs en quantité raisonnable. Gallegher comprenait pourquoi Brock serait obligé de déposer bientôt son bilan. Alors, Sonatone s'emparerait du marché et augmenterait ses tarifs. Les gens seraient obligés de payer car ils étaient conditionnés par la télévision. Ils payeraient pour quelque chose de médiocre une fois que Sonatone établirait son monopole. Gallegher prit un taxi pour se rendre chez Brock espérant lui soutirer une avance. Grâce à la carte de visite que Brock lui avait donnée, il put se rendre sans difficultés dans le bureau du grand patron. Brock était absent. En attendant, Gallegher regarda les photos en trois dimensions des vedettes Vox-Vien et admira celle de Silver O'Keefe. Il avait également une photo d'une actrice brune avec laquelle Gallegher put entrer en communication. Celle-ci lui expliqua que Silver voulait quitter Vox-View pour Sonatone. La brune s'appelait Patsy Brock, c'était la fille du grand patron. Gallegher engagea la conversation avec elle. Il voulait voir les techniciens pour se faire une idée des procédés d'agrandissement qu'ils avaient imaginés. Patsy lui dit qu'il n'en tirerait pas grand-chose. Selon elle, il était impossible de fabriquer un agrandisseur sans empiéter sur un brevet Sonatone. Elle lui offrit un whisky. Elle lui apprit que son père avait été perturbé par Joe. Gallegher répondit que son robot avait des tas d'aptitudes mais il n'avait pas la moindre idée de l'usage qu'il pouvait en faire. Surtout, Joe ne savait que s'admirer dans la glace. Patsy avait envie de le voir. Patsy lui expliqua que le propriétaire Sonatone s'appelait Elia Tone. C'était un grigou. Il avait un fils nommé Jimmy. Jimmy voulait épouser Patsy mais elle ne voulait pas. C'était Jimmy qui avait eu l'idée sur les brevets, le monopole et le clandérama. Il était brillant. Patsy pensait qu'il faisait ça pour pouvoir la séduire.Gallegher promit de faire l'impossible mais il lui fallait une avance. Patsy accepta de lui signer un chèque. Mais la somme qu'elle lui lui offrit était bien inférieure à ce qu'il avait espéré. Elle savait qu'il était irresponsable et ne voulait pas lui donner davantage pour qu'il ne se désintéresse pas de toute l'affaire. Elle est demanda un compte détaillé de ses dépenses. Tout à coup, le vidéophone bourdonna. C'était Joe. Il apprit à Gallegher qu'il ne travaillait désormais plus pour Brock mais pour Sonatone. Elia et James Tone étaient venus chez Gallegher et Joe avait accepté le chèque qu'ils avaient apporté. Joe s'était fait passer pour son maître. Il avait réussi à les hypnotiser. Joe avait donc signé un contrat d'exclusivité pour Sonatone à la place de son maître. Puis le robot avait envoyé le chèque à Kennicott pour lui rembourser les diamants perdus. Il y avait 12 000 crédits sur le chèque. Mais Sonatone en offrait 100 000 plus un salaire de 2000 par semaine pendant cinq ans. Joe avait simplement accepté les 12 000 pour rembourser Kennicott. Les Tone avaient eu l'air satisfait quand Joe leur avait dit que 12 000 crédits suffisaient. Patsy estimait que la justice déclarerait cet engagement entaché de nullité. Le robot raccrocha.
Comme le robot avait réussi à retrouver son maître, Gallegher se demanda quels sens supranormaux il avait pu lui donner. En effet, Joe avait non seulement pu retrouver l'endroit où elle était Gallegher mais de plus il avait réussi à hypnotiser des gens pour leur faire croire qu'il était Gallegher. Patsy se demandait si ce n'était pas parce que Gallegher avait déjà signé avec Sonatone qu'il avait monté ce gag. Gallegher nia. Alors Patsy lui dit qu'elle lui donnerait autant que les Tone à condition qu'il travaille pour Vox-View. Gallegher accepta. À présent, il était coincé. S'il y avait un procès et que Sonatone gagner, il serait contraint de travailler pour eux pendant cinq ans. Il fallait qu'il se débrouille pour rompre ce contrat. Comme c'était Joe qui l'avait mis dans ce pétrin, c'était à lui de l'en sortir. Il demanda à Patsy de le conduire au service technique. Il est encore un verre de whisky. Puis il alla regarder les plans avec attention. Il y avait également des reproductions des brevets Sonatone. Actuellement, l'attrait du public était le facteur déterminant. C'était un élément qui méritait considération. Le problème n'était pas d'ordre strictement scientifique. Il y avait aussi une équation humaine. Gallegher mémorisa les données qui lui étaient nécessaires. Il voulut parler avec les Tone et Patsy lui recommanda de faire la tournée des boîtes de nuit pour les trouver. Silver O'Keefe entra. Elle avait écouté à la porte. Elle dit à Gallegher que les Tone étaient au Castle Club. Elle proposa de l'y emmener. Gallegher laissa un mot à Patsy. Dans le taxi, Silver lui dit que Jimmy Tone lui avait donné rendez-vous. C'était pour ça qu'elle savait où le trouver. Elle croyait savoir pourquoi Brock avait embauché Gallegher. Elle pensait que Vox-View allait faire faillite. Sonatone emporterait le morceau. Elle ne voulait pas se retrouver du mauvais côté de la barrière. Alors elle demanda à Gallegher de la prévenir quand il serait quel camp serait le gagnant. Ils arrivèrent au Castle club. Gallegher est un verre de whisky. Revigoré par l'alcool, il observa les Tone. Il leur parla du contrat qu'il avait signé avec eux. Jimmy lui en montra une copie. Il reconnut sa signature. Il déclara que c'était un faux. Mais Jimmy lui dit qu'il avait signé en présence de témoins. Alors Gallegher essaya de leur faire comprendre que c'était Joe qui les avait hypnotisés. Elia Tone répondit que les robots étaient incapables de faire une chose pareille. Gallegher devrait prouver le contraire devant un juge. Gallegher voulut obtenir plus que les 12 000 crédits du contrat. Alors Jimmy accepta de lui verser une prime pour chaque produit utilisable qu'il fabriquerait pour Sonatone. Agacé, Gallegher dit à Silver qu'il voulait partir. Mais Silver resta. Gallegher rentra chez lui pour avoir une conversation avec Joe. Gallegher menaça son robot si celui-ci ne lui apportait pas son concours. Joe répondit que son maître était jaloux de sa beauté. Gallegher lui demanda des explications sur le contrat. Le robot répondit qu'il ne voulait plus être importuné par Kennicott. Gallegher demanda à Joe de venir avec lui au tribunal pour faire une démonstration de ses capacités d'hypnotiseur. Mais le robot refusa car il ne voulait pas gâcher son temps. Il voulait pouvoir continuer à admirer sa beauté. Gallegher alla se coucher. Il éteignit la lumière mais pour le robot cela n'avait aucune importance. Il pouvait aussi voir dans le noir. Le lendemain, Gallegher voulut en appeler à la justice. Certes, la déposition d'un robot n'était pas juridiquement valable. Mais il fallait prouver que Joe était une machine capable d'hypnotisme. La cour pourrait déclarer nul le contrat Sonatone. Il demanda l'intervention d'Harrison et l'audience fut fixée dans la journée. Gallegher se rendit à l'évidence : il était incapable d'imaginer un moyen d'obliger Joe à faire ce qu'il voulait. Il aurait bien voulu se rappeler pour quelles raisons il avait créé ce robot. Le robot refusa de sortir mais deux gaillards musclés entrèrent et l'emmenèrent. Gallegher partit avec lui au tribunal. Il expliqua au robot que des tas de gens allaient pouvoir l'admirer au tribunal. Les gens admireraient encore plus Joe s'il pouvait leur démontrer qu'il était capable d'hypnotiser les foules. Mais le robot prétendit ne pas avoir besoin de confirmation de sa beauté. Au tribunal, il fut entendu que Joe serait considéré comme la pièce à conviction numéro un. La salle du tribunal était pleine. La partie adverse était présente. Elia et Jimmy Tone affichaient une assurance inquiétante. Patsy et son père avaient l'air anxieux. Silver, avec sa prudence habituelle, avait trouvé une place à mi-chemin des représentants de Sonatone et de ceux de Vox-View. Hansen, le juge, était un magistrat pète-sec. Il demanda à Gallegher s'il avait bien signé le contrat. Gallegher acquiesça. Le magistrat demanda à Harrison et aux Tone de déposer. Le magistrat demanda à Harrison si Gallegher était sous l'emprise de l'alcool quand il avait accepté d'accomplir un travail pour lui. Brock répondit qu'il n'avait pratiqué aucun test à ce moment-là et qu'il était incapable de répondre à la question. Il n'existait aucune preuve légale tendant à démontrer qu'un accord avait été contracté entre Harrison et Gallegher. Mais il existait un contrat authentifié entre Gallegher et Sonatone. Le magistrat demanda à Gallegher de prouver qu'il n'avait pas signé ce contrat. Gallegher affirma qu'il n'était pas au laboratoire au moment où le contrat avait été signé. Mais le magistrat avait fait appel à des experts qui avaient déclaré que les robots étaient incapables d'hypnotisme. Gallegher affirma que le sien en était capable alors le magistrat demanda une preuve. Alors Gallegher demanda à Joe d'hypnotiser le magistrat. Mais le robot refusa. Hansen accepta de donner du temps à Gallegher pour prouver que son robot était capable d'hypnotiser des humains. La séance fut levée. Silver partit avec les Tone. Elle savait à présent de quel côté de la barricade se trouvait la sécurité. Harrison pensait qu'il était un homme ruiné. Alors Patsy proposa d'épouser Jimmy. Son père refusa. Il voulait trouver lui-même un moyen. Gallegher retourna dans son laboratoire avec l'intention de se saouler. Il pensait qu'en se saoulant il découvrirait une solution. Galleher s'enivra dit que Joe était planté devant son miroir. Alors actuelle, le robot était en somme en état de démence. Mais si on lui ordonnait d'accomplir la tâche pour laquelle il avait été fabriqué, son équilibre psychologique se rétablirait. Gallegher essaya de se souvenir ce qu'il s'était passé quand il avait créé son robot. Il avait ému de la bière. Brock était venu puis reparti. Et après, Gallegher avait créé son robot. Il fallait donc recréer les conditions. Puis il dit à Joe qu'il n'était pas beau. Après avoir bu de nombreuses bières, Gallegher comprit que la solution était l'auto-hypnotisme. De plus le talon d'Achille du robot était son complexe de Narcisse. Alors il expliqua à Joe que quand il buvait, il pouvait voir le robot sous une lumière différente car son subconscient faisait surface et alors il ne trouvait pas Joe beau. Le robot réalisa qu'il n'avait jamais considéré sa beauté avec son subconscient. Alors il décida de s'hypnotiser lui-même. Quand cela fut fait, Gallegher lui demanda pourquoi il l'avait créé. Le robot répondit que Gallegher voulait fabriquer un ouvre-boîtes plus grand et plus efficace pour les bières. Et l'ouvre-boîtes, c'était Joe. Joe était un ouvre-boîtes parfait. Il pouvait ouvrir une boîte de bière avec une dextérité incroyable. Alors Gallegher lui ordonna d'ouvrir une boîte de bière. Le robot obéit. À présent, le robot était à sa place. Il serait obligé de faire la tâche pour laquelle il avait été conçu. Il n'aurait plus son libre arbitre. Il pouvait donc être amené au tribunal. Le robot lui apprit comment m'en de sa fabrication, Gallegher lui avait incorporé la solution de son problème. Alors Gallegher lui demanda quelle était la solution. Joe répondit que c'était les infrasons. Joe serait capable d'émettre des ondes infrasoniques que Brock n'aurait qu'à diffuser à intervalles irréguliers dans ses programmes. Les familles installées dans leur salon pour suivre le spectacle sur le petit écran de remarqueraient pratiquement rien. Par contre, dans les clandéramas où les téléviseurs de contrebande étaient couplés au dispositif Magna, cela provoquerait un malaise grandissant pour le spectateur. Alors les foules atteintes de frénésie désertèrent les clandéramas quand Vox-View commença d'injecter régulièrement des infrasons dans ses émissions. Les ventes d'appareils Vox-View remontèrent et les clandéramas perdirent leurs clients. Et conséquence inattendue de l'expérience, personne ne voulut plus mettre les pieds dans les salles tout à fait légales de Sonatone. Les salles Sonatone disparurent également. Brock remit un chèque d'un montant ébouriffant à Gallegher. Mais l'inventeur était morose. Pour satisfaire la majorité de la clientèle, il n'y aurait plus de bière en boîte. Dans ces conditions, Joe ne lui était plus utile. Alors il songea à former un duo de chant avec son robot.