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La création artificielle de la vie est un très vieux rêve de l'humanité.
Dans les légendes de la Grèce antique, Héphaïstos et Dédale étaient les inventeurs par excellence. Le premier fut ainsi crédité de la réalisation de plusieurs êtres artificiels comme le géant Talos et Pandore qui déchaîna tous les maux sur l'humanité. Aphrodite anima la statue d'ivoire dont Pygmalion était tombé amoureux. L'oiseau mécanique fabriqué par Archytas de Tarente volait vraisemblablement grâce à un dispositif utilisant de l'air comprimé.
Très souvent, les réalisations de ces ingénieurs hellénistiques trouvaient leur application dans les temples. Les divers automates mis au point durant l'époque hellénistique connurent deux sortes d'applications principales : ils ornaient les villes en divertissant les curieux et ils impressionnaient les fidèles en animant les temples.
Pendant le Moyen Âge, la science de la mesure du temps et l'ingéniosité des créateurs d'automates s'enrichirent mutuellement. Charlemagne reçut de Haroun al-Rachid une clepsydre somptueuse comportant notamment douze automates dont les apparitions étaient rythmées par le passage des heures.
C’est aux pouvoirs occultes que se rattache la silhouette du golem, cet être artificielle dont la création est attribuée au rabbin Judah Loew ben Bezalel qui vécut à Prague au 16e siècle. Après l’avoir façonné avec de l’argile, le rabbin l’avait animée par des incantations appropriées et en inscrivant le nom de dieu sur son front. Chargé d’espionner les Gentils et d’avertir la communauté juive des pogroms qui pouvaient se préparaient contre elle, le golem de la tradition ne se révolta jamais contre ceux qui l’avaient créé. Pour la cour de l’impératrice Marie-Thérèse à Vienne, Johann Nepomuk Maelzel mit au point l’appareil auquel Edgar Poe assura une gloire posthume par l’un de ses récits : le joueur d’échecs. Cet automate n’était nullement une véritable machine mais dépendait bel et bien d’un être humain pour son fonctionnement. Un opérateur était dissimulé dans le meuble présenté au public. C’est à Maelzel que l’on doit le premier orchestre mécanique pour lequel Beethoven écrivit la première partie de son opus 91.
En 1914, Leonardo Torres y Quevedo réalisa une machine capable de jouer correctement aux échecs. Jules Verne imagina un automate ayant l’aspect d’un éléphant dans La maison à vapeur en 1879. Villiers de L’Isle-Adam attribua au très réel Thomas Edison la réalisation d’un automate fort différent, restituant l’éternel féminin avec l’Eve future en 1889. C’est en 1921 qu’une pièce du romancier et dramaturge tchèque Karel Capek amena indirectement l’introduction du terme robot dans les langues latines et anglo-saxonnes. Le titre de la pièce était R. U. R. Universal Robots. Robota signifiait travail forcé en tchèque. Les créatures artificielles qu’il avait imaginées avaient une apparence tout à fait humaine. Par la suite, les écrivains firent intervenir d’autres êtres artificiels très perfectionnés fabriqués à l’aide de substances ressemblant aux tissus de notre corps et qui pouvaient être confondus avec des êtres humains ; on prit l’habitude de parler d’androïdes. Le terme automate vient d’un mot grec signifiant « qui se meut de lui-même ». Il est donc clair que les androïdes aussi bien que les robots sont des automates. Il appartenait à Isaac Asimov d’indiquer et d’explorer la voie de l’extrapolation fondée sur des prémisses scientifiques. Ce qu’il a postulé sur les robots s’applique à tous les types d’automates de création humaine comme le conditionnement de cet automate de façon qu’il reste fidèle à l’homme. Asimov imagina les trois lois de la robotique destinées à assurer la protection de l’homme par le robot, l’obéissance du robot envers l’homme et enfin l’autoprotection du robot. En octobre 1950, le mathématicien anglais Alan Turing fit paraître un article intitulé Computing machinery and intelligence dans lequel il proposait ce qu’on a depuis lors pris l’habitude d’appeler le test de Turing. Dans le cadre de ce test, un examinateur est complètement isolé d’une machine et d’une personne, qu’il interroge l’une et l’autre ; il ne peut ni les voir ni les entendre, mais il lui est possible de communiquer avec elle au moyen d’un téléscripteur. Turing propose de considérer que si l’examinateur est incapable de dire quel est son interlocuteur humain et quel est son interlocuteur machine, il faut admettre que la machine est en mesure de penser.
Hemeac (E. G. von Wald)
L’instructeur émit une sorte de bref sifflement aigu et la salle de cours fut aussitôt plongée dans un silence angoissant. Chacun attendit, muet et rigide de terreur, que l’Instructeur finisse de proférer ses bégaiements étouffés. Hemeac était au fond de la salle et respirait lentement pour maîtriser sa peur. Il observait la surface lisse et brillante de l’objectif de leur Instructeur. Les bruits qu’il entendait indiquaient que quelqu’un allait être envoyé au bureau du Doyen pour y subir un examen spécial. Involontairement, son regard se porta sur le pupitre qui lui faisait face. La semaine précédente, Iac s’y tenait encore. Il était présent depuis 16 ans. Puis il avait commis une erreur sans pouvoir fournir une explication satisfaisante. Il avait donc été appelé au bureau du Doyen pour y passer un examen spécial. Il avait échoué. Il avait été aussitôt renvoyé de l’université. Des images confuses et menaçantes se formèrent dans l’imagination d’Hemeac à l’évocation du monde extérieur où se trouvait maintenant Iac. Au-delà des portes de l’université protectrice s’étendait la surface ravagée par la guerre d’une planète agonisante, une région peuplée de sauvages et gouvernée par des renégats imbéciles, un lieu où régnaient l’injustice et la bestialité. Hemeac se demanda si les sauvages avaient déjà dévoré Iac. Hemeac reçut l’ordre de fixer l’objectif Alors il obéit en disant : « Click ».On lui demanda de réciter la définition du terme « éducation ». Il répondit : « on entend par éducation la formation et le disciplinement des êtres susceptibles d’être ainsi perfectionnés, tels que les humains et certains des animaux supérieurs ».L’instructeur lui répondit que la définition était inexacte et incomplète. L’éducation consistait à guider un intellect organique vers des formes supérieures de perfection dans le savoir et la discipline. Le mot organique était important car l’intelligence robotique n’avait pas besoin d’être éduquée en ne pouvait pas être éduquée. Le mode d’action robotique était d’ores et déjà totalement parfait à sa première opération. Ceci était valable même pour les robots dont les circuits étaient munis d’un curioso-flex (un chercheur sélectif et d’information). Il y en avait dans tous les ordinateurs de contrôle primaire. Le seul exemplaire encore en service se trouvait ici à l’université. Les intellects organiques possédaient un système analogue pour L’étude sélective des informations potentiellement utiles. C’est ce que l’on appelait la curiosité. Mais la curiosité était sujette à un contrôle individuel volontaire ce qui la rendait moins efficace que le curioso. L’Instructeur rappela à Hemeac qu’il assistait à un cours de philosophie sociale et pas à un cours d’anatomie robotique. A l’avenir, il devrait s’en tenir au sujet. Un autre élève fut interrogé par l’Instructeur. L’esprit d’Hemeac reprit son vagabondage. Il se demanda à quoi ressemblait vraiment ce monde extérieur dépourvu de robots. Ce monde peuplé seulement d’animaux et de ruines. Il s’imagina franchissant la porte basse et tombant aux mains des sauvages vociférant qui n’attendraient que cette occasion. Depuis quelque temps, l’université renvoyait presque un élève par semaine dans le monde extérieur. Hemeac sortit de sa rêverie brusquement. Le cours était terminé. Les autres étudiants sortaient dans le couloir en une file bien ordonnée. Il prétendit que quelqu’un avait renversé de l’huile (de l’huile renversée constituait toujours un sujet de préoccupation justifiée) et l’Instructeur le congédia en lui demandant d’être plus attentif à l’avenir.
Il rejoignit les autres. Mais la terreur inavouée était toujours présente. Ils se rendirent dans les dortoirs. Il s’aligna avec ses compagnons dans une salle prévue pour des milliers de pensionnaires. Sous les yeux du moniteur auquel rien n’échappait, il se rendit craintivement jusqu’à son box. Il demeura immobile dans l’attente du commandement. Mais il le manqua et se fit réprimander. Une fois encore il utilisa l’excuse de l’huile renversée. Il affirma qu’il avait glissé à cause d’une tache d’huile dans le couloir. Le moniteur accepta l’excuse et ordonna à Hemeac d’aller chez le médecin après avoir fait le plein. Un bol de porridge attendait sur un plateau. Hemeac se mit à manger, droit et raide. Il essaya de se vider l’esprit mais il ne pouvait s’empêcher de réfléchir à l’excuse qu’il devrait fournir au médecin quand celui –ci s’apercevrait qu’il n’avait pas de muscle froissé. Au cours de la dernière année, la raison parfaite de l’intelligence robotique lui avait paru inexplicable. La pensée de son manque de progrès vers l’idéal requis le torturait presque autant que la peur du renvoi fatal qui risquait d’en découler. Il voulut se forcer à avoir l’esprit vide mais il n’arrêtait pas de penser à son compagnon Iac. Dans le couloir, les autres étudiants se rendaient au cours d’histoire de l’après-midi. Hemeac attendit un moment puis il les rejoignit. Ils se demanda à si son minutage était correct. Et une voix lui demanda s’il n’avait pas reçu l’ordre de se rendre en classe et il répondit qu’il avait reçu l’ordre de se présenter devant le médecin. Alors la voie lui dit qu’il pouvait disposer mais ajouta aussitôt qu’il devait justifier sa présence non autorisé dans le dortoir. Il chercha une réponse mais l’émotion avait rendu savoir trop aiguë. Avec sa présence inexpliquée dans le dortoir il venait d’enfreindre deux règles. Il reçut l’ordre de se présenter au bureau du Doyen pour un examen spécial. Le Doyen déciderait s’il devait ou non se présenter devant le médecin.
Il demanda à Hemeac de s’asseoir. Il était d’humeur bavarde, ce qui était mauvais signe. Hemeac s’assit sur un tabouret face à l’objectif du Doyen. Le Doyen lui reprocha de s’être attardé sans raison dans la salle de cours, d’émettre des sons d’un niveau tonal trop élevé et de ne pas s’être présenté devant le médecin. Hemeac eut envie de mentionner les ordres contradictoires du moniteur de dortoir mais il ne voulait pas dévoiler aussi clairement combien il était loin de l’intelligence idéale. Alors il se contenta de dire que c’était un accident. Le Doyen lui demanda si l’avait renversé de l’huile ce matin. Hemeac nia. Il expliqua qu’il avait simplement senti de l’huile qui avait été renversé par quelqu’un. Ledoyen remarqua alors qu’ Hemeac n’aurait pas été effrayé par l’odeur de l’huile pour la simple raison qu’elle était devenue rare. Il ajouta que le bon robot n’avait jamais peur. La peur était une réaction purement organique qui interférait avec la société des machines et des hommes. Cela n’était pas tolérable à l’université. Hemeac regarda la fenêtre qui surplombait l’objectif du Doyen. C’était la seule ouverture dans toute l’université qui permettait de voir directement le monde extérieur. Il aperçut les sauvages et les renégats errant à travers la clairière comme des enfants demeurés. Les sauvages avaient une sorte d’éducation rudimentaire. Ils étaient tous vêtus de la même façon à l’exception de certaines marques distinctives sur leurs épaules. L’un des sauvages regarda soudain la fenêtre et appela les autres pour leur montrer Hemeac. Hemeac était terrifié. Le Doyen était en train de consulter le dossier scolaire d’Hemeac qui est très bon. Il ne comprenait pas pourquoi Hemeac était devenu soudainement défaillant. Alors Hemeac répéta encore son expulsion de l’huile renversée. Le doyen annonça qu’effectivement de l’huile avait été renversée ce matin car le Gardien avait eu un accident à cause de réparations importantes dont il avait besoin. Le doyen regrettait qu’il n’y ait qu’un seul gardien dans l’université. Depuis les troubles, époque à laquelle les renégats avaient détruit les usines qui fabriquaient et les pièces de rechange, l’entretien laissait de plus en plus à désirer. C’était il y a longtemps. Hemeac n’avait pas encore 20 ans. Il ne pouvait donc pas être au courant. Le doyen demanda à Hemeac pourquoi il avait répandu toute cette huile. Hemeac répondit que c’était le gardien qui l’avait renversée. Le Doyen se plaignit de ses circuits défaillants qui l’empêchait de réfléchir normalement. La Doyen évoqua le problème de tonalité d’Hemeac. Hemeac prétendit n’être au courant de rien à ce sujet. Alors le doyen accepta d’effacer simplement cette information du dossier d’ Hemeac. Hemeac émit un soupir de soulagement. Le doyen s’en aperçut aussitôt. Le doyen lui demanda s’il n’avait pas d’ennuis personnels. Hemeac répondit non. Alors le Doyen conclut qu’ Hemeac avait juste un problème de synchronisation. Il aurait été dommage de devoir exclure un garçon qui portait le nom d’Hemeac. Ledoyen lui demanda s’il avait déjà vu son homonyme. Hemeac répondit qu’il avait vu des photographies. Il le trouvait très beau. Le doyen le corrigea en disant que son homonyme était très méthodique et discipliné. Si Hemeac était né quand son homonyme fonctionnait encore, cela aurait été de toute façon impossible d’apprécier sa véritable organisation interne car l’un et l’autre n’auraient pas pu être connectés directement. Il n’y avait pas de connexion avec les intellects organiques. Le doyen considérait que les renégats avaient commis un acte barbare en détruisant l'homonyme d'Hemeac. Il resta silencieux un moment puis il crépita tandis qu'un circuit vieillissant se mettait à la masse avant de se couper définitivement. Hemeac attendit, soudain terrifié à l'idée qu'il avait peut-être été congédié d'un ordre silencieux. Mais le doyen se ranima. Il lui demanda ce qu'il désirait savoir à propos des Troubles. Hemeac voulait apprendre ce qui s'était passé au moment des Troubles. Le doyen répondit qu'on ne savait pas ce qui avait provoqué les Troubles. À l'université, on formait des étudiants dont l'esprit atteignait une perfection quasi robotique même s'il fallait en garder certains jusqu'à 50 ou 60 ans pour y parvenir. Sans l'homonyme d'Hemeac, l'université n'aurait sans doute pas survécu à ce grand bouleversement. Mais l'homonyme était parvenu à installer un fusible sur la centrale énergétique de la base. Les renégats savaient ce qui leur arriverait sur cette partie de la planète si la centrale énergétique explosait. Alors ils avaient détruit l'homonyme d'Hemeac. Le doyen avait réussi à prendre sa place car il était en liaison directe avec lui au moment de la destruction. Malheureusement, la plupart de ses bandes mémoires étaient rédigées dans un code que le doyen n'était pas parvenu à déchiffrer. Le doyen avait du moins réussi à sauver l'université. Il devait entrer en contact avec le gardien de façon urgente sinon il lui serait impossible de continuer à fonctionner très longtemps. Il demanda à Hemeac quelle était la raison de sa présence dans son bureau. Hemeac lui répondit que c'était son moniteur de dortoir qui lui avait ordonné de se présenter au doyen. Le doyen ne parvenait pas à contacter le moniteur d'Hemeac. Il voulut rassurer Hemeac en lui disant que si les renégats attaquaient, il couperait tout simplement le fusible de la centrale énergétique ce qui contaminerait l'atmosphère pendant des siècles. Puis le doyen lui dit qu'il ne devait pas perdre son temps à bavarder avec lui. Alors Hemeac se leva pour sortir sans perdre un instant. Le doyen bourdonna et marmonna pendant un moment puis ce fut le silence. Hemeac suivit le couloir en se disant qu'il avait apparemment réussi. Il entra au cours d'histoire. Obsic achevait de réciter sa leçon. Le professeur demanda à Hemeac où il était. Hemeac répondit qu'il était dans le bureau du doyen. Il avait passé un examen spécial qu'il avait réussi. L'instructeur demeura silencieux et chercha à entrer en contact avec l'ordinateur du doyen. Puis il annonça que le doyen n'avait aucune trace de la présence d'Hemeac dans son bureau. Cela terrifia Hemeac. Le doyen n'avait aucune trace de la présence d'Hemeac dans l'université. L'instructeur conclut qu'Hemeac avait été renvoyé puis il s'interrompit soudain pour émettre une joyeuse succession de grésillements. Il finit par demander à Hemeac s'il connaissait sa leçon. Alors Hemeac récita sa leçon. Il dit qu'au cours des troubles, le central de l'université, appelé Hemeac pour Hélio-Electro-Mobile-Educational-Activator-Computer fut en grande partie détruit par les renégats, mais seulement après avoir informé ceux-ci qu'il avait installé un fusible automatique sur la centrale énergétique. Ce fusible était à présent sous le contrôle du doyen qui protégeait l'université à condition de bénéficier d'un service de maintenance adéquat. Au cours de la trêve qui avait suivi, les renégats avaient accepté d'approvisionner l'université en carburant pour les humains et de lui fournir toutes les pièces détachées que pourraient fabriquer les sauvages. Mais ils n'étaient pas encore parvenus à résoudre le problème des pièces détachées. Tout à coup, l'instructeur devint silencieux. Les étudiants attendirent et le silence grandit. Après plusieurs minutes, les étudiants s'agitèrent car il était beaucoup trop tôt pour que le cours soit terminé. Hemeac prit la direction de la sortie et les 37 autres étudiants suivirent le mouvement. Des bruits violents et insolites leur parvenaient de la porte principale mais ils continuèrent leur chemin. Ils arrivèrent au dortoir et ils s'aperçurent qu'il y avait des étrangers. C'était cinq renégats. Sans la moindre hésitation, Hemeac conduisit la classe au milieu des renégats qu'ils dépassèrent en suivant le couloir qui menait à leurs boxes particuliers. Il s'arrêta et les étudiants l'imitèrent. Aucune nourriture ne se trouvait dans les boxes. Alors Hemeac il sortit dans le couloir. C'était un événement nouveau et sans précédent. Mais il savait très bien que le Bon Robot ne tenait aucun compte des situations nouvelles jusqu'au moment où les instructions appropriées parvenaient du Central. Hemeac attendit ses instructions et les autres étudiants aussi. L'un des renégats s'approcha de lui. Il demanda si les étudiants allaient résister. Mais un autre renégat savait que les étudiants ne savaient pas se battre. Un groupe de renégats en uniforme apparut. Ils avaient démonté le fusible et coupé l'alimentation partout sauf pour l'air conditionné et le circuit général d'éclairage. L'ordinateur du doyen ne fonctionnait plus, il avait fini par tomber en panne. Le capitaine des renégats annonça que c'était terminé. Tout ce qui restait à faire c'était de rééduquer les humains. Hemeac était terrorisé et déconcerté. Il ne bougeait pas. Il attendait les instructions. Un des renégats était effrayé. Il se rendait compte que les humains étaient devenus des robots vivants. Hemeac voulait exprimer une vague d'orgueil en entendant ce compliment suprême de « robots vivants" mais son entraînement l'en empêcha. Il demeura immobile, l'esprit vide. Enfin, presque vide.
La Cité des robots (Carol Emshwiller)
Les robots le nommaient Bébé. Il mesurait 1 m 80 et ressemblait à un animal perpétuellement affamé. Quelqu'un avait soigneusement écrit autrefois sur une feuille de papier, dans un volume, un nom choisi avec réflexion : Christophe John Correy mais il n'existait plus personne pour affirmer que ce nom était bien celui de l'homme appelé Bébé par les robots. Jusqu'à ces dernières années, la cité avait possédé assez de nourriture pour assurer le développement complet de l'homme mais à présent ses hanches saillaient sur son estomac creux et on on voyait ses côtes. Il était nu, dans la salle à manger. Il réclamait à manger. Mais il n'y avait personne dans la pièce à part lui. Un serviteur de modèle B arriva. Il apporta de la poudre brune dans des assiettes à soupe. Les conduites d'eau du bâtiment 76 avaient crevé à cause du gel de la saison et du manque de chauffage. Bébé attendait qu'on lui serve de la viande. Le second plat qui lui fut apporté avait été de la viande mais quelque chose n'avait pas fonctionné et le rôti n'était plus qu'un ensemble de débris calcinés. La viande était immangeable mais Modèle B la découpa avec ses doigts couteaux. Il servit dans chaque assiette une portion de cette viande carbonisée en y ajoutant quelque chose qui ressemblait à un légume trop cuit. Puis il emporta les assiettes intactes et revint avec le dessert, une tarte au chocolat avec de la crème fouettée. Il y avait encore du lait qui provenait des fermes souterraines ou les robots soignaient les vaches. Bébé s'empara du gâteau avant que le surveillant Rob 10 et il s'enfuit en courant. Bébé pénétra dans la cour négligée d'une maison qui avait perdu son gardien six ans auparavant. Il se réfugia derrière de jeunes arbres et mangea le gâteau au chocolat. Il avait envie de viande ou de lait à présent. Il perdait confiance en S'il vous plaît. Cela ne marchait plus comme autrefois. Et il perdait aussi confiance en Nurse. En dépit de ce qu'elle était devenue, ses bras restaient aussi longs et son oeil aussi vif. Bébé n'était vraiment en sécurité que loin de Nurse à des kilomètres de la maison. Bébé était derrière le 75. Sa propre maison se trouvait la porte à côté. Nurse découvrit brusquement la cachette de Bébé. Elle leur rattrapa et le prit délicatement à la taille. Il se laissa faire. Elle lui proposa un verre vide en prétendant qu'il contenait du lait. Depuis quelque temps, Bébé ne se portait plus bien et cela empirait. Il ressentait un besoin irrésistible d'une chose inconnue. Cela l'avait amené à effectuer de lointaines incursions à travers la Cité. Il voulut dire à Nurse que le central s'était arrêté et qu'il n'y avait plus de S'il vous plaît. Elle l'attira néanmoins à elle en lui disant de ne pas s'inquiéter. Il lui dit encore qu'il n'y avait plus de lait et d'aller chercher Rob 6. Elle obéit. Il savait que les robots étaient en train de se parler et cela le frustrait de ne pouvoir les entendre. Il y aurait voulu être Rob 6 pour être aussi robuste que lui. Il ne voulait plus être un bébé. Un jour, il était monté en haut d'une statue et avait implorer le soleil et le Central. Il avait sauté du haut de la statue dans l'espoir de se transformer en robot. Nurse avait mis presque une journée à retrouver son corps inerte. Il fut soigné par le robot Docteur. Il avait compris qu'il ne pourrait jamais devenir Rob 6 mais au moins il aurait bien voulu être un homme. Nurse lui avait dit qu'il en serait un, plus tard. Nurse emmena Bébé au centre moteur de la maison 74. Le cerveau était peu encombrant. L'appareil qui dirigeait la vie de toute la maison n'était pas plus grand qu'une boîte à pain. Rob 6 était installé devant le cerveau. Il était pourvu de mains mécaniques. Nurse lui apprit que Bébé prétendait qu'il n'y avait plus de lait. Elle pensait qu'il se moquait de lui. Elle savait qu'il était devenu un grand garçon. Elle avait 38 ans de service. Elle aurait dû être remplacé. Elle voulut savoir s'il y avait encore du lait. Rob 6 en doutait. Même si le contrôle était en ordre, Rob 6 savait que quelque chose ne marchait pas au 74. Il savait qu'il ne pourrait rien faire sans l'intervention d'êtres humains. Papa et maman reviendraient un jour avait dit Bébé. Mais nurse 16 avait aidé elle-même à enterrer les humains après que l'ennemi avait répandu la maladie. Bébé dit à nurse qu'elle n'existait même pas. Elle répondit que pendant une année entière elle l'avait protégé et gardé comme l'avaient demandé papa et maman et à présent il était en train de grandir pour devenir un jeune gentleman. Alors bébé trait Nurse et Rob 6 de bons à rien. Il affirma qu'il n'existait ni de Central ni de S'il vous plaît. Bébé se souvenait d'une époque où Nurse et Rob 6 ils étaient suffisants pour tout mais c'était lui qui changait à présent et il changeait chaque jour davantage. Bébé annonça à Rob 6 que le Central ne répondrait jamais plus. Il lui demanda ce qu'il comptait faire. Puis il s'énervera alors Nurse l'emporta sans se presser tout en lui murmurant des paroles apaisantes. Il devait apprendre à être un bon petit garçon et à ne pas se battre. Les robots protégeaient la Cité contre l'ennemi qui existait au loin. La cité était une forme de vie, un modèle de vie civilisée et c'était aux robots de la sauvegarder. Nurse déposa bébé doucement dans son lit. Il éclata de rire. Elle s'éloigna et la porte se referma. Le lit était conçu pour un enfant. Bébé avait conscience que le lit était trop petit pour lui alors il donna un coup de pied dans un panneau en bois pour pouvoir s'étendre de tout son long. Il avait brisé depuis longtemps les leviers des panneaux mobiles du mur. La maison ne s'en était pas aperçue et personne n'était venu les réparer. Il fit glisser le panneau de verre sur le côté pour sortir. Il n'y avait personne en vue. Il galopa derrière la maison et enjamba le lit pierreux et à sec d'un ancien ruisseau artificiel. Il escalada les rocailles et se retrouva sur le trottoir en contrebas. Il s'engouffra dans le métro. Le couloir brillamment éclairé était vide à l'exception de quelques robots. Fuir les robots était une nécessité. Il émergea dans un large passage. Il contempla le soleil. Il voulait ne pas appartenir à une maison ou à un surveillant. Il traversa le trottoir bordé d'arbres en direction d'un mur lisse et gris. Il passa au-dessus et se laissa tomber en souplesse. Il n'essaya même pas de se cacher des possibles Surveillants. Il y avait un bassin entouré de fausse rocaille. Au centre du bassin, il y avait une statue représentant une femme. Elle tenait la tête d'un serpent d'où jaillissait l'eau. Bébé se pencha pour boire. Il caressa la statue. Il vit une autre statue dans l'allée. Mais celle-là n'était pas une statut de pierre, elle vivait. Il s'avança vers elle. Elle semblait craintive. Elle allait s'enfuir mais il la rattrapa. Il toucha sa poitrine. Elle lui demanda s'il était humain. Il lui dit son nom. Elle répondit qu'elle s'appelait Chérie. Il trouvait qu'elle n'avait pas une apparence normale car elle avait les cheveux longs. Elle lui répondit qu'elle était comme les gens normaux. Elle paraissait gentille. Une nurse s'approcha. Bébé vit qu'elle ressemblait tout à fait à sa propre nurse. Elle lui demanda ce qu'il faisait ici. Il répondit comme on le lui avait appris. Il déclina son identité et celle de son surveillant. Quelques minutes plus tard, un Surveillant arriva. Le robot examina Bébé et Chérie et déclara que rien n'était arrivé. Il saisit Bébé avec fermeté et l'emmena. Il le conduisit dans une maison tout en verre avec des plantes grimpantes et quelques pans de pierre. Il fut enfermé dans une pièce. Le surveillant lui apporta du lait froid et de la viande parfaitement cuite. C'était le meilleur repas que Bébé avait pris depuis longtemps. Chérie le rejoignit. Il se palpèrent l'un l'autre. Il la secoua tout d'un coup avec violence pour essayer d'obtenir d'elle cette réponse tant désirée. Alors le panneau s'ouvrit et Chérie s'en alla. Rob 6 arriva. Bébé avait une égratignure qui lui balafraie toute la joue et des bleus sur les jambes. Il suivit le robot sans rien dire. Nurse le baigna et le mit dans sa chambre à son retour. Elle espérait qu'il allait devenir un peu raisonnable. Il dormait profondément durant un petit moment puis s'enfuit de nouveau. Il partit à la recherche de Chérie. La réponse était là quelque part dans la vaste cité mourante, la réponse aux robots et à la ruine, à la Cité et au monde et principalement à lui, mais elle était... perdue.
Dialogues avec Katy (Ron Goulart).
Katy Pri n'avait pas fait un bon film depuis si mais on l'ignorait sur Panam. Le robot-sosie du service relations publiques provoquerait un vif engouement à l'égard de Vive la Terre, vive Mars. Ben Hollis s'était rendu sur Jupiter pour prendre en charge du matériel. Larson avait déclaré que le robot avait réussi à merveille sur cette planète. Ben était persuadé que sur Panam, cela marcherait. L'appareil des Entreprises générales de la capitale se dirigeait vers l'astroport de la capitale quand il heurta le sol. Ben perdit connaissance. Il se réveilla et envoya un message au bureau des entreprises. Il était chargé de rapporter à la capitale le robot de Katy Priestly et les bandes magnétiques à temps pour la grande première. Il devait faire ses preuves.
Il apprit que la première était remise à plus tard. Les indigènes de Panam s'étaient soulevés. Ils avaient déjà rôti les gars de l'ambassade de Coca-Cola. Ben devrait donc prendre des vacances et veiller sur le robot.
Il regarda le robot de Katy deux fois par jour au cours de sa première semaine. Il vécut sur les rations de sa trousse de secours et il étudia son manuel de secours. Il explora la vallée. Le soir, il lisait Espèces martiennes et se couchait. Personne ne venait à son secours. Le manuel des entreprises générales était en vérité un excellent bouquin. Il apprit à Ben quelles plantes étaient comestibles et lesquelles étaient vénéneuses. Avant d'être affecté à la vente des LP, Ben avait suivi un stage de formation dont un cours de cuisine vénusienne. À la troisième semaine dans la vallée, il pouvait se préparer tous ses repas à la mode de Vénus. Il surveillait la radio une ou deux heures par jour mais personne ne l'appelait.
Il attendait en veillant sur le robot. Grâce au manuel, il apprit à fabriquer une hutte. Il y transporta la plupart de son matériel ainsi que la caisse contenant Katy Priestly. Il fallait que le robot soit en parfait état au moment de la première. Au bout de la quatrième semaine, Ben adopta les recettes martiennes. La saison des pluies commença et les animaux furent plus durs à capturer alors il se mit à consommer davantage de fruits et légumes. Il avait construit une cheminée de pierre en se conformant à une lettre d'un lecteur du supplément annuel au Manuel. Il se faisait du souci pour le robot car il ne savait pas si Katy pouvait rouiller. Il déballa le robot et l'installa sur le fauteuil qu'il avait fabriqué. Katy avait une bosse sur le front mais cela ne se voyait pas. Larson avait expliqué à Ben qu'au sommet de sa carrière, Katy avait eu 25 répliques en circulation pour la publicité de ses films. Ben trouva la fente invisible sous les cheveux, dans le cou du robot et il y inséra la première bande. Il trouva le fascicule contenant les questions à poser par l'interrogateur. Entre chaque réponse était indiqué le temps nécessaire pour exposer la question, puis la durée de la réponse. Il enclencha Katy et posa les questions. Elle avait une voix jeune et féminine. Elle répondit aux questions sur le film Vive la Terre, vive Mars. Elle répondit chaque fois avec conviction à toutes les questions. Alors Ben des brancha le robot. Il enfila son manteau et courut jusqu'à l'astronef. Il réussit à arranger le toit de son abri. Il vérifiait le robot chaque matin. Il apprit très rapidement les questionnaires. Grâce à ce travail, les matins étaient toujours agréables. C'était la pluie incessante qui l'énervait parfois. Une fois par jour, Ben rejoignait le spationef. Il essayait d'entrer en liaison avec la capitale. Grâce au Manuel, il apprit que les pluies cesseraient bientôt. Il procédait à un second examen de Katy en passant les bandes et en notant les réactions et le fonctionnement de l'appareil. Les hommes et leur conversation lui manquaient alors il vérifiait Katy trois fois par jour. Comme le questionnaire lui était devenu tellement familier, il ne vit aucun inconvénient à modifier les questions. Il demanda à Katy si elle l'aimait et elle répondait avec les questions destinées au film. Cela faisait rire Ben mais il prit du retard sur les questions. Il demanda à Katy si leur situation s'arrangerait. Elle répondit qu'il fallait tenir bon. Ben s'aperçut qu'il était allergique quand la saison de pollinisation arriva. Il ne sortait que pour s'alimenter et vérifier la radio. Il ne travaillait plus que le matin. Parfois, il lisait pour Katy et d'autres fois il bavardait avec elle. Il manipulait les bandes et l'interrupteur pour varier les conversations. Comme la bande numéro deux était composée de détails sur les antécédents et les ambitions de Katy, Ben en profita pour parler de sa propre enfance. Il demanda à Katy si elle pensait qu'on viendrait les chercher. Elle répondit une fois encore qu'il fallait tenir bon. Ben pensait que les entreprises générales ne l'abandonneraient pas. Mais il était laissé par les réponses automatiques de Katy. Un jour il lui lança son pied dans l'estomac et elle s'effondra sur le dallage dans un bruit métallique. Il continua de la frapper jusqu'à la détruire. Il se rendit compte qu'il avait détruit son gagne-pain. Il se rendit à l'astronef pour informer les entreprises générales mais elles ne répondaient toujours pas. Alors il démolit aussi la radio. Le Manuel lui avait appris qu'il fallait garder son manteau pendant cette saison mais il s'en fichait. Il regrettait véritablement son geste envers Katy. Pour se punir il décida de ne plus dire un mot ni aux fleurs ni aux animaux. Mais par moment, les petits couinements des fleurs le faisaient rire aux éclats.
Autoportrait (Bernard Wolfe)
Le 5 octobre 1959.
Parks était à Princeton à l'IEAC. Ses collègues étaient des jeunes gens vêtus de jeans et de sweat-shirts qui traînaient dans les labos ou se prélassaient sur l'herbe. Ils faisaient partie de la mission MS. Parks n'avait pas prévu de s'habiller comme les autres car il venait de Rome. Par chance, il découvrit une boutique où on vendait des jeans.
Le 6 octobre 1959.
Parks avait rencontré le patron qui avait 40 ans. Lui aussi était habillé de façon décontractée le patron lui dit qu'il devait s'estimer heureux car il était venu à l'adresse la plus importante de l'Amérique, Pentagone y compris.
Parks avait travaillé six ans de suite dans les labos de cybernétique il avait entendu assez de rumeurs sur l'IEAC pour l'étourdir. Le patron lui apprit qu'à l'époque d'Oppenheimer et d’Einstein, ce lieu s’appelait l’Institut pour les Etudes Avancées. Il était alors dirigé avec un certain laxisme. En plus des mathématiciens et des physiciens, il y avait toutes sortes de types bizarres : des poètes, des égyptologues, des numismates, des médiévistes, des herboristes. Vers 1955, il y avait tellement de laboratoires de cybernétique dans le pays qu'une agence centrale de coordination avait été créée à Princeton. À ce moment-là, on s'était débarrassé des poètes et des égyptologues et l'institut avait pris le nom d’Institut pour Etudes Avancées en Cybernétique. Parks demanda au patron quel projet lui était réservé. Le patron lui répondit qu'il allait prendre en charge un laboratoire très important : le labo des Pros. C'était l'abréviation de prothèses, les membres artificiels. Parks ne put s'empêcher de ressentir une légère déception. Mais le patron lui expliqua que la cybernétique était un travail d'équipe et la première règle de n'importe quelle équipe était que chacun reste à sa place. Si on lui avait attribué cette place c'est parce que les travaux de Parks sur les insectes à cellules photoélectriques avaient été très appréciés. Parks était un des neurologues les plus doués. Le patron lui recommanda de ne pas prêter attention aux commérages à propos des MS. D'ailleurs le patron lui rappela le serment de loyauté qu'il avait signé.
Le 16 octobre 1959.
Deux matins par semaine, les membres du personnel revêtaient leur tenue de ski et de chasse pour se balader dans la forêt afin d'y couper du bois pour leurs feux de cheminée. Parks était parti avec eux. Son assistant, Goldweiser, lui révéla l'idée présente derrière ces expéditions. Cela permettait aux membres du personnel d'avoir l'impression d'appartenir de nouveaux à la race humaine. Len Ellsom fit une blague de mauvais goût sur ces expéditions. Parks l'avait connu au MIT. Parks savait que Ellsom avait travaillé sur le cerveau robot géant que Remington-Rand construisait pour l'armée de l'air. En raison de ses prouesses dans la simulation électronique du quotient intellectuel, il avait été affecté à l'IEAC. Parks lui demanda s'il faisait partie des MS. Len lui conseilla de garder le silence sur ce sujet en imitant le patron de l'institut. Sur le chemin du retour, Len lui proposa une rencontre pour discuter. Parks supposait que Len voulait lui parler de Marylin. Tout cet épisode de la vie de Parks lui était devenu complètement indifférent. Il avait tourné la page. Parks avait toujours détesté qu'on l'appelle Ollie et Len le savait pourtant il continuait de l'appeler ainsi. Parks pensait que Len cherchait à l'avoir. Il devait faire attention également à Goldweiser car il avait eu l'impression que ce type avait ri de bon coeur aux mots d'esprit de Len.
Le 18 octobre 1959.
Un an plus tôt le patron avait établi une ligne de conduite pour le labo : commencer par les jambes parce que, bien que les systèmes neuromosteurs des jambes et des bras se ressemblaient beaucoup ceux des jambes étaient infiniment plus simples. Le patron pensait que si les jambes électroniques donnaient satisfaction, le labo pourrait ensuite surmonter les plus grandes difficultés. L'armée avait choisi un double amputé parmi les malades de l'hôpital Walter Reed. Il s'appelait Kujack et avait perdu ses deux jambes en sautant sur une mine à la sortie de Pyongyang. Il équipe du service neurologique avait pris une importante décision. Il ne fallut plus construire des jambes expérimentales directement dans les muscles et les nerfs du cobaye. Les douilles en métal et en plastique seraient construites de telle façon que chaque nouveau membre expérimental pouvait être enclenché dès que prêt à l'essai. Goldweiser avait résolu le problème des joints en les fixant aux moignons de Kujack et les tissus musculaires et nerveux avaient pris d'une façon satisfaisante. 23 membres avaient été préparés mais ça s'était terminé par un triste fiasco. Alors le patron avait demandé à Parks d'intervenir. Le problème n'était pas seulement de copier une jambe mais de fabriquer une jambe capable d'équilibrer et de soutenir, de marcher, de courir, de sauter, de gambader... De plus, la jambe devait ressentir le toucher, le froid, la douleur, l'humidité mais aussi exécuter les mouvements dictés par le cerveau. Parks devait reproduire l'organe dans sa totalité. La prothèse ne devait pas seulement être égale à l'original mais supérieure. Cela signifiait qu'il fallait fabriquer un système neuromusculaire synthétique capable d'améliorer vraiment les nerfs et les muscles que la nature avait créés dans l'original. Goldweiser avait émis une opinion qui impressionna Parks : « ils n'attendent pas grand-chose de nous, ils veulent juste que nous soyons Dieu ». Il avait distingué une vérité.
Le 22 octobre 1959.
Parks ne savait pas quoi faire de KujackS Son attitude était bizarre. il avait comme un éclair de malice dans les yeux. Il rappelait Lem à Parks. Kujack semblait se moquer de quelque chose bien que son visage reste impassible. Parks lui demanda de penser à la façon dont il shootait dans le ballon avant son accident. Ce fut un échec. Parks se sentait découragé surtout lorsqu'il remarqua que Kujack s'amusait plus que jamais. Un jour, Kujack lui parla d'une conversation qu'il avait eue avec Ellsom. Ellsom lui avait dit que Parks construisait les meilleures punaises électroniques dans le métier. Parks fut étonné que Len ait puis formuler quelque chose d'agréable à son sujet. Ce devait être sa culpabilité dans l'histoire avec Marylin. Mais Parks n’aimait pas le voir tourner autour de Kujack.
Le 25 octobre 1959.
Ce jour-là, le patron était venu avec l'équipe pour couper du bois. Il avait demandé à Parks comment cela se passait dans son laboratoire.
Parks lui répondit qu'il y avait deux aspects au problème : le cinesthétique et le nerveux. Le patron était impatient de pouvoir arriver quelque chose qu'il pourrait communiquer à la presse. Parks savait qu'il prenait le terrible risque de tout le révéler sur les cinesthétiques-nerveux mais il devait poser la première pierre pour un petit plan qu'il venait juste d'imaginer. Il lui parla de Len et le patron lui demanda s'il le connaissait. Parks lui dit que Len avait obtenu son diplôme un an plus tôt que lui. Il savait que Len avait accompli une tâche importante sur le calculateur de balistique Remington-Rand. Le patron ajouta que Len avait contribué à l'élaboration du joueur d'échecs robot et que c'était la raison de sa présence à l'IEAC. Parks prétendit ne pas connaître l'existence de ce robot. Alors le patron lui expliqua que Washington avait mis au secret ce robot pour des raisons de sécurité. Parks en avait donc déduit qu'un cerveau électronique capable de jouer avait été mis au point que cela avait amené à une découverte importante sur le plan militaire. Il avait compris que la mission MS portait sur les cerveaux et les jeux. Len était impliqué dans cette histoire. Le patron appréciait Len même s'il le trouvait un peu fantasque. Parks lui expliqua que Len était un peu spécial car il pouvait être gai un instant et très triste l'instant suivant. De plus, il écrivait des poèmes. Cela confirma à ce que pensait le patron. Ainsi le patron avait quelques doutes sur Len.