Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Humanisme : le Contrat social
10 mai 2007

Rousseau : l'homme qui croyait en l'homme (suite)

Chapitre IV : le philosophe En juillet 1759, de nombreuses personnes veulent rencontrer Rousseau à Montmorency pendant qu’il écrit dans son « donjon », un cabinet d’écriture qui domine Paris. Le 15 novembre 1759, Malsherbes et Margency invitent Rousseau à écrire dans le Journal des savants deux articles par mois pour 800 livres d’honoraires. Il travaille sur ses Institutions politiques (dont il tirera Du contrat social) et répond aux questions d’éducation que lui posent Mmes d’Epinay, de Créqui et de Chenonceau. Il réfléchit donc aux conditions morales de préparation du citoyen à son entrée dans la société. Il pense à un projet global de révolution politique. Il commence L’Emile en 1758 et l’achève en 1762. Ce livre a pour projet de régler l’éducation de quelques uns capables de détruire l’espace aliéné de la société. Rousseau estime que les pouvoirs politiques et religieux sont viciés. L’éducateur doit révéler en l’enfant la juste loi qu’il porte en lui. L’éducateur est hors des institutions et offre à l’enfant l’expérience de la conscience et de la liberté. L’Emile devait avoir une suite, Emile et Sophie ou les Solitaires mais Rousseau ne l’achèvera jamais. Vient le Contrat social, dans lequel Rousseau propose une critique des fondements du corps politique. Jean-Jacques cherche à publier son dictionnaire de musique et un Essai sur l’origine des langues puis renonce attendant de meilleures occasions. La Nouvelle Héloïse est publiée en février 1761, les libraires se le disputent tant le succès est grand. Seul Voltaire se gausse du roman de Rousseau : « Toutes ses grandes aventures sont armées de magnifiques lieux communs sur la vertu ». En mars 1761, des rumeurs se répandent dans les Salons parisiens. On reproche à Rousseau son oeuvre, Thérèse et ses enfants abandonnés. Il a laissé ses cinq enfants aux Enfants Trouvés mais en éprouve le plus vif remords et désire réparer. Il donne à Mme de Luxembourg quelques indications pour que certains soient reconnus et que Thérèse soit sous sa protection au cas où il viendrait à mourir. Jean-Jacques se croit mourant mais les médecins sont rassurants, son mal vient de la prostate, le col de la vessie ou dans le canal de l’urètre. Mme de Luxembourg, se démène pour retrouver les enfants de Rousseau et M. de Malherbes rassure l’écrivain à propos de la publication de ses livres mais Rousseau continue de croire à l’existence d’un complot contre lui. Il veut écrire ses mémoires, dire sa vérité comme il le proclame sur son cachet « Vitam impendere vero » (consacrer sa vie à la vérité). Il parlera de ses contradictions, la gloire et la solitude, la ville et la campagne, la misanthropie et l’amitié, la paresse et le travail, Français de corps et Genevois de coeur. Du Contrat social paraît fin avril 1762 et l’Emile le 22 mai. Il reçoit beaucoup de lettres (dont une de D’Alembert non signée). M. de Malsherbes veut récupérer sa correspondance avec Rousseau craignant de prêter caution à ses nouveaux ouvrages. LE Parlement, la Cour et les jésuites exigent de Rousseau qu’il rende des comptes. M. de Malsherbes est obligé d’interdire la vente de l’Emile. Le Prince de Conti annonce à Jean-Jacques son arrestation. Pour ne pas risquer la sécurité de ses amis, Rousseau prend la fuite. Il s’exile à Yverdon en Suisse alors qu’on lui avait proposé de séjourner à Paris ou chez Hume en Angleterre. Le Parlement condamne l’Emile à être lacéré et brûlé et Rousseau à être emprisonné. Les huissiers viennent le chercher à Montmorency mais Jean-Jacques a eu le temps de partir. Thérèse est restée sous la protection de M. et Mme de Luxembourg. Au cours de sa fuite, Tousseau écrit le Lévite d’Ephraïm. Il y narre la relation d’un lévite et de sa femme, fille de Judée, dans un Eden exempt des interdits qui régissent les tribus. Hélas la femme est violée et le lévite se venge. Bien sûr, le lévite incarne Rousseau et la femme violée la haine dont le philosophe est victime. Il arrive à Yverdon le 14 juin 1762 pour loger chez son ami Roguin. Chapitre V : le réprouvé Les livres de Rousseau sont brûlés à Rome, Paris et Amsterdam. Le 19 juin à Genève et le 2 juillet à Bern l’arrestation de Rousseau est décrétée sans que Voltaire prenne sa défense. Le contrat social et l’Emile sont brûlés. Rousseau quitte Yverdon le 9 juillet et se rend à Môtiers dans la principauté prussienne de Neufchâtel. Il est sous la protection de Frédéric II qu’il avait pourtant décrié. Il se lie d’amitié avec George lord Geith, maréchal d’Ecosse. Frédéric II lui offre de l’argent et veut lui construire une maison mais Rousseau refuse. Thérèse rejoint son aimé à Môtiers. Il retrouve le goût de la promenade et sympathise avec les dames de la région, leur offrant des lacets de sa confection. Les Eglises calvinistes et catholiques condamnent ou censurent Rousseau y compris y compris Christophe de Beaumont, archevêque de Paris, qu’appréciait pourtant Rousseau. Le philosophe lui écrit : « Je crois ne pouvoir mieux justifier tout ce que j’ai osé dire, qu’en disant tout ce que j’ai pensé ». Genève éprouve le besoin d’argumenter son rejet des thèses rousseauistes. Les autorités publient une brochure intitulée : « Lettres écrites de la campagne ». Rousseau répond en octobre 173 par les « Lettres écrites de la montagne » et s’en prend à tous ceux qui ont attaqué l’Emile. Il prône un christianisme ouvert aux autres et à la raison. Il rêve d’une démocratie directe comme dans le Contrat Social sans rejeter les thèses de Montesquieu et de sa séparation des pouvoirs. En fait il rend hommage à la constitution de Genève et son originalité. Cette pureté n’existe plus pour lui à cause de l’indifférence de ses compatriotes. En septembre 1764, un révolutionnaire corse (Buttafoco) demande à Rousseau d’écrire un projet de constitution pour son pays après avoir su l’intérêt que le philosophe portait à l’île de beauté. Rousseau s’exécute et évoque bien sûr la démocratie mais également l’égalité, l’inutilité de la noblesse, la construction d’une économie agraire, le contrôle des dépenses par une assemblée populaire, la limitation du droit de propriété et un gouvernement fédéral aux pouvoirs limités. Cette constitution sera lettre morte pour des raisons politiques. Voltaire publie Le sentiment des citoyens. Il traite Rousseau de fou, d’hypocrite et de débauché. Voltaire pourrait s’appliquer ses injures à lui-même puisque contrairement à Rousseau, il a l’hypocrisie de signer ses pamphlets sous pseudonyme. Le Sentiment des citoyens se termine par cette phrase assassine : « On punit capitalement un vil séducteur ». Rousseau est encore voué aux gémonies puisque ses Lettres de la montagne sont brûlées à Paris et à La Haye et dénoncé à Genève, Berne et Neuchâtel. Le pasteur Montmollin suit les autorités religieuses et politiques et Rousseau comparaît devant le consistoire de Môtiers mais les juges ne parviennent à aucune conclusion. Frédéric II vient en aide à Rousseau en le plaçant sous la protection du conseil d’Etat de Neuchâtel. Rousseau pense à justifier sa vie en écrivant ses mémoires. Les Confessions serviront donc à répondre aux mensonges et accusations qu’il a subis. Dans ses mémoires, le philosophe revient à l’origine, son Moi qui seul fait autorité pour légitimer ses actes. Rousseau est victime d’une lapidation. A Môtiers, ses portes ont été forcées, ses vitres cassées et une pierre grosse comme la tête est venue frapper jusqu’à son lit. Montmollin oblige Rousseau à quitter Môtiers. Il s’exile sur l’île Saint-Pierre, sur le lac de Bienne. De 1762 à 1765, Rousseau se livre à la botanique avec passion. Ses promenades sur l’île lui permettent de rédiger la Flore de l’île de Saint-Pierre. Il s’inspire du système naturae de Linné. Malheureusement, les autorités de Berne l’expulsent. Rousseau fatigué de s’exiler demande l’incarcération aux autorités de Bienne qui la lui refusent. Fin 1765, Rousseau part pour Strasbourg. Il y est célébré. Le Devin du village est joué en sa présence. Puis le philosophe se rend à Paris où ses anciens amis s’empressent de le retrouver y compris Diderot. Mais Rousseau refuse de le voir estimant ne plus être de ses amis. Hélas, la police n’a pas oublié qu’il est considéré comme proscrit. Il part alors pour Londres en compagnie de Hume. Il est accueilli en héros. Thérèse le rejoint. La paranoïa supposée de Rousseau se manifeste par les soupçons qu’il a envers Hume et son refus de participer à un gala officiel. Il veut être accompagné par sa concubine dans les soirées ce qui choque la morale puritaine britannique. Cela n’empêche pas un riche propriétaire, M; Davenport, de lui offrir une maison à Wooton et Hume de lui faire obtenir une pension du roi d’Angleterre. Rousseau est malheureux à Londres. L’argent et le commerce, vanité et mondanité l’insupportent. Il préfère s’isoler dans les montagnes du Derbyshire à 200 kms de Londres. Hume est agacé par le comportement lunatique de Rousseau comme il le confie à ses amis parisiens. Certains lui recommandent la discrétion mais d’Holbach s’en amuse. Rousseau ne connaissant pas l’anglais n’est pas touché par les médisances de Wootton. Il poursuit la rédaction des Confessions, joue de l’épinette et pratique la botanique. Hume livre ses impressions sur Rousseau dans l’Exposé succinct, il ajoute certains documents dont certains de d’Alembert tendent à justifier l’hypothèse d’un complot ourdi contre Rousseau. La haine de Voltaire n’a pas faibli. Il continue d’insulter Rousseau dans une lettre à Hume publiée par le Mercure de France. Fin 1766, le sort s’acharne sur Rousseau. Thérèse est malade, d’Holbach enquête sur la situation financière du philosophe chez le banquier Rougemont tandis que voltaire cherche à prouver que Rousseau n’était qu’un valet à Venise. Les anciens amis de Rousseau redoutent le portrait qu’il va dresser d’eux dans les Confessions. Lassé de l’Angleterre, Rousseau quitte la maison de Davenport le 1er mai 1767. Le 21 mais, lui et sa concubine partent pour Calais. Il a livré à du Peyrou les trois premiers livres des Confessions. Rousseau risque toujours l’incarcération en France. Le Prince de Conti le cherche mais le philosophe est chez Mirabeau à Fleury sous Meudon. Le Prince de Conti le retrouve le 19 juin et le loge au château de Trye où Rousseau se fait appeler M. Renou. Mirabeau tient à collaborer avec lui pour ses théories économiques. Rousseau continue les Confessions,il en est au livre VI. Il publie le dictionnaire de musique en novembre 1767. Le 16 juin, il quitte Trye. En juillet 1768, il est à Grenoble et part à Chambéry se recueillir sur la tombe de Mme de Warend, décédée en 1762. Le 30 août, il se marie à Bourgoin où il a emménagé. Fin janvier 1769, il loge à Monquin dans les Alpes. Il poursuit la rédaction des Confessions, il achève les livres VII à XI. IL reprend son vrai nom et quitte Monquin le 10 avril 1770. Il ne veut plus y être « un enterré vivant ». Persuadé d’être victime d’un complot, Rousseau décide d’habiter à Paris pour mieux surveiller les conjurés. Il s’installe avec Thérèse dans leur ancienne demeure de la rue Plâtrière (aujourd’hui rue Rousseau). La police le sait à Paris mais le procureur le tolère tant qu’il ne publie rien. Au cours de l’automne 1770, Rousseau reçoit Wielhorski qui lui avait été présenté par des amis quelques années plus tôt. Rulhière, auteur d’une histoire de la Pologne l’a engagé à le rencontrer. Wielhorski est en mission, il représente la Pologne en lutte. Rousseau accepte de soutenir la Pologne. Il travaille pendant tout l’hiver 1770-1771 en s’inspirant du Contrat social. Il veut lier démocratie directe et parlement, roi et souverain, démocratie nobiliaire et démocratie populaire. Il défend l’idée de patrie polonaise et son unité renforcée par un parlement et un roi. Il engage les Polonais à se regrouper autour du roi Poniatowski quitte à le remplacer plus tard. Il livre son manuscrit à ses interlocuteurs en juin 1771. A Paris, il sort peu et reçoit son ami Bernardin de Saint-Pierre. Il devient copiste pour s’assurer un revenu. L’idée de complot le poursuit. De 1772 à 1776, il répond à ses détracteurs et cherche des preuves de la fourberie de ses ennemis. Le complot est réel : Diderot, d’Alembert, Mme d’Epinay, Voltaire, Grimm, de Choiseul s’unissent contre lui car ils craignent la publication des Confessions. Des Portraits trahissant ses idées sont publiés. Pour se justifier, Rousseau se dédouble dans un nouvel autoportrait, Rousseau juge de Jean-Jacques. Il veut présenter ce manuscrit sur le grand autel de Notre-Dame de Paris en février 1773 mais échoue. Il livre alors un message aux Français : A tour Français aimant encore la justice et la vérité puis des Lettres sur la botanique pour Mme Delesert. A la fin de sa vie, Rousseau n’a plus personne à qui parler alors il livre ses pensées dans un dernier ouvrage inachevé, Les Rêveries du promeneur solitaire. Il y parle du complot, des enfants, de la botanique et de Mme de Wrend. Rousseau passe les cinq dernières semaines de sa vie à Ermenonville chez le marquis de Girardin. C’est là qu’il apprend la mort de Voltaire le 30 mai 1778. Le 2 juillet 1778, en fin de matinée, seul avec Thérèse et pris de malaise, Jean-Jacques Rousseau s’effondre et meurt.
Publicité
Publicité
Commentaires
M
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> L’intérêt que vous portez à Voltaire m’incite à vous indiquer ceci :<br /> <br /> <br /> <br /> Il y a deux ans une lecture attentive de sa Correspondance (treize volumes à la Pléiade) m’a conduit à publier un livre dont le contenu ne cesse de me surprendre, dans la mesure où la mise en relation de 1500 extraits environ de cette même Correspondance et des événements historiques sous-jacents ne paraît pas pouvoir laisser place au moindre doute sur le caractère délibérément faussé de l’image qui nous a été donnée de ce personnage. <br /> <br /> Je souhaiterais vivement que vous puissiez partager mon extrême surprise en consultant, si vous le voulez bien, la rubrique "livres" du site : www.cunypetitdemange.sitew.com<br /> <br /> Tout à la fin de cette rubrique, là où apparaît une reproduction de la couverture de "Voltaire – L’or au prix du sang", un clic sur le mot "Voltaire" (à gauche) vous permet d’accéder aux quarante premières pages du livre lui-même.<br /> <br /> Cette façon quelque peu abrupte de venir vers vous ne fait sans doute que rendre compte de mon propre désarroi, car, si je ne me trompe pas, un énorme travail de réinterprétation reste à faire, et non sans conséquences diverses…<br /> <br /> <br /> <br /> Très cordialement à vous,<br /> <br /> <br /> <br /> Michel J. Cuny
Répondre
M
Voltaire Rousseau les freres ennemis ! il avait son bon ami Hume aussi, j'ai beaucoup aimé l'Emile, et beaucoup d'autres oeuvres encore...
Répondre
Humanisme : le Contrat social
Publicité
Archives
Publicité