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Humanisme : le Contrat social
29 août 2020

L'enfant de la haute mer (Jules Supervielle).

 

supervie

 

L'enfant de la haute mer.

Une rue flottante s'était formée dans le haut atlantique à la surface de la mer au-dessus d'un gouffre de 6000 m. On y voyait des maisons de briques rouges et des boutiques. Comment cela tenait-il debout sans même être ballotté par les vagues ? Une enfant de 12 ans marchait d'un pas sûr dans la rue liquide comme celle marchait sur la terre ferme. À l'approche d'un navire, l'enfant était prise d'un grand sommeil et le village disparaissait complètement sous les flots. Et c'est ainsi que nul marin n'avait jamais aperçu le village. L'enfant se croyait la seule petite fille au monde. Elle n'était pas très jolie à cause de ses dents un peu écartées et de son nez un peu trop retroussé. Il n'y avait qu'une seule rue dans la petite ville. Elle trouvait des aliments dans l'armoire et le garde-manger de la cuisine et même de la viande tous les deux ou trois jours. Il y avait aussi pour l'enfant des pommes de terre, des légumes et même des oeufs de temps en temps. Les provisions apparaissaient spontanément dans les armoires. Le matin, la petite fille pouvait trouver une demi livre de pain frais sur le comptoir de marbre de la boulangerie. Elle se levait de bonne heure et parcourait les boutiques : un estaminet, une boutique de forgeron, une boulangerie, une mercerie. Elle ouvrait les volets de toutes les maisons. Suivant le temps, elle laissait ou non les fenêtres fermées. Elle allumait du feu dans quelques cuisines pour laisser la fumée s'élever des toits. Une heure avant le coucher du soleil, elle commençait à fermer les volets puis elle abaissait les rideaux de tôle ondulée.

Elle agissait par instinct. Dans la belle saison, elle laissait du linge à sécher comme s'il fallait à tout prix que le village eût l'air habité. Toute l'année, elle prenait soin du drapeau de la mairie. La nuit, elle s'éclairait avec des bougies ou cousait à la lumière de la lampe.

Il y avait de l'électricité dans plusieurs maisons. Un jour, elle mit un noeud de crêpe noir au heurrtoir d'une porte car elle trouvait que cela faisait bien. Une autre fois, elle se mit à battre du tambour comme pour annoncer une nouvelle. Parfois, elle voulait crier mais sa gorge se serrait. Elle montait au haut du clocher pour remonter l'horloge. Elle était attirée par la crypte de l'église mais n'y entrait jamais, se contentant de jeter un regard rapide à l'intérieur en retenant son souffle.

Dans une malle de sa chambre, elle gardait des papiers de famille comme des cartes postales de Dakar, Rio de Janeiro, Hong Kong qui étaient signées Charles Liévens et adressées à Steenvoorde. L’enfant ignorait tout de ces pays lointains et de ce Charles.

Elle conservait aussi un album de photographies. Une de ses photos représentait une enfant qui ressemblait beaucoup à la fillette de l'océan et qui tenait un cerceau à la main. Dans une autre photographie, la petite fille était à côté d'un homme revêtu d'un costume de matelot et d'une femme endimanchée. L'enfant s'était longtemps demandé ce que voulaient ces gens. Elle se rendait tous les matins à l'école communale avec un grand cartable rempli de livres. Mais l'océan, celui qu'elle voyait sur les cartes, elle ne savait pas se trouver dessus.

Parfois, elle écoutait avec une soumission absolue, écrivait quelques mots, comme sous la dictée d'une invisible maîtresse. Il lui semblait que les questions écrites dans la grammaire s'adressaient directement à ellr.

Elle éprouvait parfois le désir insistant d’écrire et elle le faisait avec une grande application.

Elle écrivait une lettre où elle donnait des nouvelles de sa petite ville ou d'elle-même. Mais tout ce qu'elle écrivait n'était adressé à personne.

Alors elle jetait sa lettre à la mer comme les navigateurs en perdition qui livrent aux flots leur dernier message dans une bouteille désespérée.

 L'enfant avait 12 ans et le temps ne passait pas sur la ville flottante.

Elle se regardait dans le miroir de l'armoire en espérant voir sa poitrine gonfler mais en vain.

L'océan demeurait vide et elle ne recevait d'autres visites que celle des étoiles filantes.

Un jour, il y eut comme une distraction du destin. Un vrai petit cargo passa dans la rue marine du village sans que les maisons disparussent sous les flots ni que la fillette fut prise de sommeil. Il était midi juste quand le cargo fit entendre sa sirène. L'enfant, percevant pour la première fois un bruit qui lui venait des hommes, se précipita à la fenêtre et cria de toutes ses forces : « au secours ! ». Elle lança son tablier d'écolière dans la direction du navire.

L'homme de barre ne tourna même pas la tête et un matelot passa sur le pont comme si de rien n'était. La fillette descendit très vite dans la rue et se coucha sur les traces du navire. Mais quand elle se releva, le cargo avait disparu. Elle était stupéfaite d'avoir crié « au secours ! ». Elle comprit alors seulement le sens profond de ces mots. Et ce sens l'effraya. Elle se demanda si les marins étaient plus cruels que les profondeurs de la mer. Alors une vague vint la chercher. On eût dit qu'elle comprenait certaines choses et ne les approuvait pas toutes. Dans le haut, la vague portait deux yeux d'écume parfaitement imités. Il y avait longtemps que cette vague aurait voulu faire quelque chose pour l'enfant mais elle ne savait pas quoi. Quand la vague vit s'éloigner le cargo et comprit l'angoisse de l'enfant, elle emmena la petite fille et l'enroula au fond d'elle-même. Elle la garda un très long moment en tâchant de la confisquer, avec la collaboration de la mort. La fillette s'empêcha de respirer pour seconder la vague dans son grave projet. N'arrivant pas à ses fins, la vague lança la petite fille en l'air puis la reprit comme une balle. Quand la vague comprit qu'elle ne pourrait pas donner la mort à l'enfant, elle la ramena chez elle dans un immense murmure de larmes et d'excuses.

La fillette recommença d'ouvrir et de fermer les volets sans espoir et de disparaître momentanément dans la mer dès qu'un navire pointait à l'horizon. L'enfant était née de la pensée d'un marin dans la nuit. Elle était née du cerveau de Charles Liévens, de Steevoorde, matelot de pont du quatre-mâts Le Hardi. Il avait perdu sa fille âgée de 12 ans pendant un de ses voyages. Il avait pensé longuement à elle avec une force terrible pour le grand malheur de cette enfant.

Le boeuf et l'âne de la crèche.

Sur la route de Bethléem, l'âne conduit par Joseph portait la Vierge. Le boeuf suivait, tout seul. Arrivés en ville, les voyageurs pénétrèrent dans une étable abandonnée et Joseph se mit aussitôt au travail.

Le boeuf était fasciné par la capacité de son maître pour bricoler et arranger les choses. Joseph partit chercher de la paille. Quand il revint, l'âne se demanda si Joseph préparait un petit lit d'enfant. La Vierge dit à l'âne et au boeuf qu'on aurait peut-être besoin d’eux dans la nuit. Une voix légère qui venait de traverser tout le ciel les bêtes. Le boeuf constata qu'il y avait dans la crèche un enfant nu alors il le réchauffa avec son souffle. La Vierge le remercia d'un souriant regard. Des êtres ailés entrèrent et Joseph revint avec des langes prêtés par une voisine. Joseph était surpris que trois soleils éclairent le ciel alors qu'il était minuit. À l'aube, le boeuf posa ses sabots avec précaution pour ne pas réveiller l'enfant et par crainte de faire du mal à un ange. Des voisins vinrent voir Jésus et la Vierge. C'étaient des pauvres gens qui n'avaient à offrir que leur visage radieux. Puis d'autres voisins apportèrent des noix et un flageolet. Le boeuf et l'âne se demandèrent  quelle impression ils allaient faire à l'enfant.

Le boeuf trouvait vraiment pénible de ne pouvoir s'approcher de ceux qu'il aimait le mieux sans avoir l'air menaçant. Une grande peur saisit le boeuf à la pensée qu'il s'était tant approché de l'enfant pour le réchauffer. Il aurait pu par mégarde lui donner un coup de corne.

L'âne conseilla au boeuf de ne pas trop s'approcher de l'enfant pour ne pas le blesser ou laisser tomber sur lui un peu de sa bave. L'âne voulait offrir à l'enfant ses oreilles pour l'amuser. Le boeuf rétorqua qu'il ne devait pas braire dans la figure de l'enfant pour ne pas le tuer.

L'âne le traita de paysan. L'âne se tenait à gauche de la crèche et le boeuf à droite. Ils restaient la durant des heures comme s'ils posaient pour quelque peintre invisible. L'enfant avait hâte de se rendormir et un ange lumineux l'attendait derrière. Après s'être incliné devant celui qui venait de naître, l'ange peignit un nimbe de très pur autour de sa tête. Il en peignit un autre pour la Vierge et un troisième pour Joseph. Puis l'enjeu s'éloigna. Le boeuf et l'âne regrettaient de n'avoir pas eu de nimbe. L'âne avait porté la Vierge. Il avait remarqué que l'enfant baignait dans une sorte de poussière merveilleuse. Le boeuf entraîna l'ânedans un coin de l'étable où il avait disposé en signe d'adoration une branchette délicatement entourée de brins de paille pour figurer les irradiations de la chair divine. Le boeuf et l'âne allèrent brouter jusqu'à la nuit. Dans les champs, il y avait déjà beaucoup de pierres qui étaient au courant de la naissance de Jésus. Il y avait aussi des fleurs des champs qui savaient et devaient être épargnées. Le boeuf et l'âne devaient donc manger sans commettre de sacrilège. Mais le boeuf était déjà rassasié par le bonheur. Même l'eau et l'air lui semblaient sacrés. Il craignait d'aspirer un ange. Le boeuf était honteux de ne pas se sentir toujours aussi propre qu'il l'aurait voulu. Le soleil entra dans l'étable et les deux bêtes se disputèrent l'honneur de faire de l'ombre à l'enfant. Un jour, du museau, l'âne tourna délicatement le petit de son côté et Marie, revenant auprès de son fils, eut grand-peur. Elle s'obstinait à chercher le visage de l'enfant où elle l'avait laissé. Elle fit comprendre à l'âne qu'il convenait de ne pas toucher à l'enfant.

Le boeuf ne se croyait autorisé à rendre à l'enfant que des services indirects. En attirant à lui lui les mouches de l'étable ou en écrasant des insectes contre le mur. L'âne épiait les bruits du dehors et il barrait l'entrée quand quelque chose lui paraissait suspect.

Le boeuf se mettait derrière lui pour faire masse. Le boeuf était stupéfait de voir que la vierge, s'approchant de la crèche, avait le don de faire sourire l'enfant. Joseph y parvenait également en jouant du flageolet. Le boeuf aurait voulu aussi jouer quelque chose. Quand ils paissaient ensemble dans les champs, il arrivait souvent au boeuf de quitter l'âne. Il voulait voir si l'enfant avait besoin de rien. Il y avait à l’étable une espèce de lucarne que l'on devait nommer plus tard, pour cette raison même, un oeil-de-boeuf par où le bovin regardait du dehors.

Un jour, le boeuf remarqua que Marie et Joseph s'étaient absentés. Il en profita pour souffler délicatement dans la flûte. L'enfant se dressa un peu pour voir. Le boeuf n'était pas très content du résultat et pensait que personne ne l'avait entendu mais il se trompait. Un jour, la Vierge demanda au boeuf d'approcher de son enfant. L'enfant saisit le museau des deux mains. Jésus souriait. Voyant le boeuf si ténébreux, l'enfant se mit à rire aux éclats. Le boeuf se demandait si le petit ne se moquait pas. Le boeuf pensait que jamais on n'avait vu mère plus pure et enfant plus beau. Mais par moments, il leur trouvait l’air grave l'un et l'autre.

Le boeuf et l'âne remarquèrent une étoile qui avançait dans le ciel. Et, dessous, il y avait trois personnages couverts de pierres précieuses. Les bêtes s'écartèrent pour laisser passer les rois mages. Le boeuf exerça sur celui qui représentait l'Afrique une surveillance discrète. Il voulait voir si vraiment le roi noir n'éprouvait que de bonnes intentions à l'égard du nouveau-né. Quand le boeuf remarqua que le visage du roi noir reflétait la déférence et un grand oubli de soi, son coeur en fut traversé de douceur. Le boeuf remarqua que les deux rois blancs avaient mis dans leurs bagages un brin de paille qu'ils venaient de dérober à la crèche. Les rois mages s'endormirent sur une couche improvisée. Ils gardèrent leur couronne pour dormir. Le boeuf trouva cela étrange. Ils se réveillèrent avant le petit jour. Ils avaient vu en songe le même ange qui leur avait recommandé de partir tout de suite et de ne pas retourner auprès d'Hérode pour lui dire qu'ils avaient vu l'enfant Jésus. Ils s'en allèrent en laissant luire l'étoile au-dessus de la crèche afin que chacun su que c'était là.

Le boeuf pria Jésus de mettre un peu de sa lumière dans toutes ces pauvretés et ses confusions qui étaient en lui. L'âne pria aussi. Il demanda à l'enfant Jésus de remplacer les montagnes par de la plaine partout. Il lui demanda pourquoi ses oreilles étaient si longues et pourquoi il n'avait pas de crin à sa queue.

Durant les nuits qui suivirent, ce fut tantôt à une étoile et tantôt à un autre d'être de garde. Par l'intermédiaire du boeuf et de l'âne, plusieurs bêtes demandèrent à connaître l'enfant Jésus. La Vierge n'hésita pas à faire entrer même les bêtes féroces. Les bêtes entrèrent une à une. On commença par les bêtes venimeuses. Les serpents évitèrent de regarder la Vierge. On accorda une heure entière aux atomes pour se présenter et faire le tour de la crèche. Les chiens ne purent s'empêcher de marquer leur étonnement car ils n'avaient pas été admis à demeure à l'étable comme le boeuf et l'âne. Le lion entra avec sa toison. On voyait que sa grande préoccupation consistait à prendre le moins de place possible dans l'étable. Il avança, paupières baissées, cachant ses admirables dents comme une maladie honteuse et avec tant de modestie qu'il appartenait à la race des lions qui devaient refuser un jour de dévorer Ste Blandine. Puis le tigre s'écrasa par terre jusqu'à devenir une véritable descente de lit. La girafe ne plus montrer que ses pattes dans l'embrasure de la porte. L'éléphant se contenta de s'agenouiller devant le seuil. Un mouton insista pour être tondu sur-le-champ mais on lui laissa sa toison, tout en le remerciant. La mère kangourou voulut donner à Jésus un de ses petits mais Joseph refusa. L'autruche profita d'un moment d'inattention pour pondre son oeuf dans un coin et s'en aller sans bruit. Joseph en fit une omelette. Les poissons déléguèrent air une mouette pour les remplacer. Les oiseaux s'en allaient laissant leurs chants, les pigeons leurs amours, les singes leur gaminerie, les chats leur regard, les tourterelles la douceur de leur gorge. Il y eut des miracles : la tortue se dépêcha, l'iguane modéra son allure, l'hippopotame fut gracieux dans ses génuflexions et les perroquets gardèrent le silence. Joseph fatigué d'avoir dirigé le défilé toute la journée sans prendre la moindre nourriture écrasa du pied une mauvaise araignée dans un moment de distraction. Certaines bêtes s'attardèrent dans l'étable et le boeuf dut éloigner la fouine, l'écureuil, le blaireau qui ne voulaient pas sortir.

L'âne et le boeuf sortirent pour manger. Joseph avait remarqué que le boeuf avait maigri depuis quelques jours.

Une nuit, ce fut la constellation du Taureau d'être de garde au-dessus de la crèche. Le boeuf était fier de voir l'enfant si bien gardé. Joseph avait vu le Seigneur en songe. Il avait compris qu'il devait partir sans tarder car Hérode voulait s'en prendre à Jésus. Mais le boeuf était trop faible pour partir alors il demanda à la constellation du Taureau de le secourir. Alors que la vierge le recommanda à une voisine. Joseph promit de revenir tout de suite. Le boeuf comprit que c'était un pieux mensonge. Quand la voisine entra, un peu après l'aube, le boeuf avait cessé de ruminer.

L'inconnue de la Seine.

Une noyée de 19 ans avançait entre deux eaux. Un peu après le pont Alexandre, les pénibles représentants de la police fluviale la frappèrent à l'épaule mais comme la nuit venait, ils n'insistèrent pas. Elle ne voulait pas être repêchée et être exposée à la morgue. Elle avait dépassé Paris et voyageait la nuit. Elle était toujours à la merci de n'importe quoi. Elle voulait atteindre la mer. Les paupières closes, les pieds joints, les bras au gré de l'eau, l'avançait. Dans la traversée d'une ville, elle fut maintenue quelques instants par des remous contre l'arche d'un pont. C'est un remorqueur qui brouilla un peu le fleuve et la débloqua.

Un homme lui dit qu'elle était près de la mer. Il lui attacha un lingot de plomb à la cheville.

Le corps de la jeune fille baigna dans une eau de plus en plus profonde. Quand ils eurent atteint les sables qui attendent sous la mer, plusieurs êtres phosphorescents vinrent à eux.

Mais l'homme, c'était « le grand mouillé » les écarta du geste. Il dit à la jeune fille qu'elle ne devait plus avoir peur d'avaler de l'eau. Mais elle avait encore grand-peur car elle comprenait pas ce marin des abîmes sans qu'il eût prononcé une seule parole dans toute cette eau. Elle s'aperçut que l'homme s'exprimait uniquement par les phosphorescences de son corps. Les Ruisselants, autour d'eux, ne se faisaient pas comprendre d'une autre façon. L'homme demanda à la jeune fille d'où elle venait. Mais elle ne savait plus rien d'elle-même alors l'homme la surnomma l'Inconnue de la Seine. Le Grand mouillé lui expliqua qu'il existait une grande colonie de Ruisselants. Il fit signe à tous les poissons torche, sauf un, de se retirer. Des gens de tout âge s'approchaient avec curiosité. Ils étaient nus.

La jeune fille demanda à garder sa robe. Le grand mouillé accepta. Les habitants des profondeurs avaient le désir de rendre service à la nouvelle venue. Mais elle avait envie de retirer le lingot de plomb. Le grand mouillé comprit son intention. Il lui expliqua que si elle retirait le lingot, elle perdrait connaissance et remontrait à la surface.

Un ou deux gros poissons domestiques s'attachaient à la personne de chaque Ruisselant et rendaient de menus services comme débarrasser le dos des herbes marines qui y restaient collées. La jeune fille ignorait pourquoi elle s'était jetée à l'eau. Une autre jeune fille s'approcha. Elle s'appelait la Naturelle. Elle lui expliqua que le séjour dans les profondeurs lui donnerait une confiance très grande. Mais il fallait laisser aux chairs le temps de se reformer pour que le corps ne remonte pas à la surface. Il ne fallait pas songer à manger et à boire. Bientôt l'Inconnue de la Seine verrait de vraies perles sortir de ses yeux. Elle voulait savoir en quoi consisteraient ses occupations et en lui expliqua qu'elle pourrait visiter le fond de la mer pour y recueillir des isolés et augmenter ainsi la puissance de la colonie. Une fois, les Ruisselants virent tomber au fond de la mer un bateau avec son équipage. Ils recueillirent les naufragés et récupérèrent les provisions. Les ruisselants faisaient semblant d'avoir besoin de provisions pour que le temps pèse moins.

L'inconnue de la Seine fut surprise de voir un cheval. La Naturelle lui expliqua que c'était un grand luxe. Un homme proposa à l'Inconnue de la Seine de monter sur le cheval mais elle refusa car elle ne se sentait pas encore assez solide. Le beau cheval répudié s'en retourna avec toute sa prestance comme si rien au monde ne pouvait plus le changer ni l'émouvoir.

L'inconnue de la Seine demanda si c'était le Grand mouillé qui commandait et on lui répondit que c'était le plus fort des Ruisselants et celui qui connaissait le mieux la région. Il existait des êtres complètement inconnus sur terre et qui est sous la mer avait acquis une grande réputation. Le Grand mouillé avait été un simple mousse à l'âge de 12 ans et devint un géant de la faune sous-marine. L'inconnue de la Seine ne quittait pas sa robe car c'était tout ce qu'elle avait sauvé de sa vie antérieure. Les hommes auraient bien voulu connaître la forme de sa gorge. Pour se faire pardonner sa robe, l'inconnue vivait à l'écart et passait sa journée à récolter des coquillages pour les enfants et les plus mutilés d'entre les noyés. Chaque jour le grand mouillé venait lui rendre visite. L'inconnue aurait voulu remonter le fleuve pour entendre quelques bruits de la ville. Mais le Grand mouillé lui expliquait que si elle remontait elle s'exposerait à être enfermée dans la plus odieuse des prisons. Elle était malheureuse en pensant au monde de là-haut. Des fragments de la vie, son avis, lui parvenaient dans la mer. L'une après l'autre, les mères refusaient de laisser leurs filles fréquenter l'inconnue de la Seine à cause de cette robe qu'elle portait jour et nuit. On lui reprochait de garder des ornements qui ne regardaient plus les mortes. Une naufragé dont la raison avait été ébranlée jusqu'après sa mort pensait que l'inconnue de la Seine était toujours vivante. Mais la Naturelle la reprenait systématiquement. La Naturelle finit par reprocher à l'inconnue de garder sa robe. Mais l'inconnue pensait que sa robe la protégeait contre tout ce qu'elle ne comprenait pas encore. Elle s'enfuit vers des régions désertiques et elle coupa le fil d'acier qui l'attachait au fond de la mer. Elle voulait mourir tout à fait. Dans la nuit marine ses propres phosphorescences devinrent très lumineuses puis s'éteignirent pour toujours. Alors son sourire d’errante noyée revint sur ses lèvres. Elle regagna les eaux moins profondes.

Les boiteux du ciel.

Les ombres des anciens habitants de la Terre se trouvaient réunies dans un large espace céleste. Elles marchaient dans l'air comme des vivants l'eussent fait sur terre. Ils avaient gardé leurs anciennes habitudes. On retrouvait là-haut une Europe aérienne avec la France, tout entière, et une Norvège dont pas un fjord ne manquait. Tout ce qu'on faisait sur terre se reflétait dans cette partie du ciel et même si on changeait un pavé dans une rue obscure. On voyait passer les âmes des véhicules de tous les siècles. Ceux qui n'avaient jamais connu que leurs pieds comme moyen de transport se servaient seulement de leurs pieds. Certains ne croyaient pas encore à l'électricité et d'autres tournaient des commutateurs imaginaires. De temps en temps une voix, la seule qu'on entendait dans ces espaces interstellaires et qui venait on ne savait d'où, disait à chacun de ne pas oublier qu'ils n'étaient que des ombres. Mais c'était comme si on n'avait rien dit. Les ombres croyaient de nouveaux à tout ce qu'elles faisaient, suivaient leur idée.

On était privé de la parole et même du murmure mais l'âme était si transparente que pour engager une conversation il suffisait de se placer en face de son interlocuteur. Pour cacher ses sentiments, on se voyait obligé de s'enfuir à toutes jambes et de s'isoler si on pouvait. Mais la plupart des gens prenaient l'habitude de ne penser à rien de secret et de s'exprimer de façon parfaitement courtoise. Chacun avait toujours l'apparence du même âge mais cela n'empêchait pas les parents de demander à leurs enfants ce qu'ils comptaient faire plus tard. Mais quand les jeunes gens s'embrassaient, c'était avec indifférence.

Les aveugles y voyaient tout autant que les autres mais ils gardaient la tête en arrière comme pour éviter des obstacles pourtant inexistants. L'homme qui avait connu un grand amour sur terre changeait souvent de trottoir dans l'espoir d'être plus heureux en face. Parfois, les derniers arrivants s'arrachaient le coeur qu'ils jetaient à leurs pieds pour le piétiner. Mais le coeur modeste reprenait avec calme sa place dans la poitrine de l'homme désincarné qui n'avait pas réussi à souffrir ni à pleurer. On consolait les nouveaux qui ne savaient encore que faire de leur ombre et n'osaient mettre un pied devant l'autre. Un homme, qui avait été un grand pianiste, s'assit un jour à son fantomatique piano et invita les amis à venir pour le voir jouer. Chacun crut vraiment l'entendre. Mais il fut manifeste que nul bruit n'en sortait. Alors, comprenant qu'il n'y avait pas eu de miracle, on se hâta de rentrer chez soi au plus vite. Mais la grande tristesse des Ombres venait surtout de ce qu'elles ne pouvaient rien saisir. Un jour, des flâneurs qui se promenaient sur ce qu'on prenait généralement pour la place publique virent une longue boîte en bois blanc. Les Ombres ne comprirent pas tout de suite qu'il ne s'agissait pas d'une hallucination. Alors un peuple immense de tous les temps, bêtes et hommes, s'entassa autour de la boîte. L'espérance allait son train. Le bruit courut que les Ombres allaient bientôt voir leur corps tel qu'il avait été sur Terre. On allait pouvoir s'inviter entre amis à s'examiner tel qu'on avait été. Mais aucun autre miracle ne se produisit et la boîte demeura des semaines et des mois sur la place publique entourée d'une garde de moins en moins nombreuse puis la boîte resta toute seule. À la suite de cette grande espérance déçue, les Ombres commencèrent à s'éviter pour se cacher leur épouvantable découragement. Charles Delsol ne savait pas depuis combien de temps il était mort. Il avait perdu de vue Marguerite Desrenaudes quelques jours avant son décès et ignorait si elle était encore vivante. Il se souvenait du jour où il l'avait vue pour la première fois à la bibliothèque de la Sorbonne. Tous les jours il s'asseyait en face d'elle et ne lui adressait pas la parole, sa claudication le rendant fort timide.

Une fois Marguerite se leva pour aller chercher un livre. Elle boitait aussi. Elle était agacée de sentir sur elle le regard de ce muet. Et cet échange de boîteries qui qu'il avait l'air de lui proposer. Un jour du mois de mars, elle avait ouvert la fenêtre toute grande et Charles n'avait pas osé lui demander de la refermer. Alors il s'était tenu tranquille et avait senti la mort huit et la poitrine. Il était mort trois jours après. Après son arrivée là-haut, Charles s'était mis à poursuivre ses études à la bibliothèque de la Sorbonne, projetée en plein ciel. Un jour, il vit une Ombre assise en face de sa place habituelle et qui lui rappelait tout à fait Marguerite. Charles avait oublié que tout ce qu'il pensait se voyait dans son âme transparente. Marguerite lui demanda s'il était mort à cause de la fenêtre ouverte. Il mentit en répondant qu'il avait été écrasé par un taxi. Quelques jours plus tard, ils sortirent ensemble de la bibliothèque et Charles proposa à Marguerite de porter sa serviette. Elle accepta. À peine eut-il pris la serviette qu'il la sentit prendre du poids sous son bras. Une sorte de bien-être lui montait dans ce qui avait été ses mains.

Il sentit une vive douleur à son poignet et la serviette s'échappa de ses mains. D'authentiques dictionnaires en sortirent avec tout leur poids. Marguerite en était bouleversée. Il faisait un petit froid sec et de belles colonnes de vapeur sortirent du nez du jeune homme et de la jeune fille bien respirante. Ils s'embrassèrent puis, mûs par des forces nouvelles et joyeuses, ils se dirigèrent vers la place publique où se trouvait la boîte en bois blanc. Ilsl'ouvrirent et trouvèrent plusieurs objets leur ayant appartenu sur Terre et surtout une carte du ciel qui les invitait au voyage.

Rani.

Rani avait été élu cacique pour sa victoire dans l'épreuve du jeûne. Dès le début de l'épreuve, les temps avaient pris pour lui l'apparence d'une grande horloge à six visages de jeunes filles disposées autour du cadran. Elle lui portait toutes les quatre heures  de l'eau et des feuilles de coca. Yara, sa fiancée, lui disait un regard qu'il arriverait des choses merveilleuses. Dans les premières heures de la 10e nuit, Rani vit couché à son chevet, le grand dromadaire du dernier sommeil. Le dromadaire tenta 20 fois de suite de se dresser sur ses pattes alors Rani fit signe qu'il consentait à interrompre le jeûne. Rani voulut aller au-devant de Yara quelques jours plus tard. Celle-ci se tenait près des feux du clan. Le vertige fit tomber Rani dans le foyer où il se brûla le visage jusqu'à l'os. À présent, tous baissaient la tête et s'écartaient lorsque Rani passait. Rani pensait que Yara se cachait aussi de lui quand il vit sa fiancée immobile devant sa tente qui le regardait fixement. Alors il alla tout de suite chercher une charge de bois et la laissa tomber aux pieds de la jeune fille en signe d'amour. Mais la jeune fille disparut et Rani l'entendit pousser des cris d'épouvante. Le lendemain, les six membres du conseil des anciens s'avancèrent vers le visage brûlé ils lui tournèrent simultanément le dos pour lui annoncer par leur attitude et leur silence qu'il ne pouvait plus compter être leur cacique. Des semaines durant, il se cacha dans la forêt. Il se mit à aimer les serpents qui dans leurs plis et leurs replis ne comptent plus que sur eux-mêmes et tiennent toujours la mort prête dans leur bouche.

Rani voulut revoir son clan. Il savait demeurer invisible. Voyant ses compagnons aller et venir avant de se coucher pour la nuit, il pensait que les hommes n'étaient plus que souvenirs de vomissures. Il vola ses anciens compagnons pour faire des offrandes aux arbres et aux pierres, à tout ce qui n'est pas souillé par l'usage de la parole. Une nuit, le visage entouré de lianes et de feuilles, il pénétra dans la tente de Yara pour lui voler son miroir. Une autre nuit, ivre de chicha, il voulut enivrer un arbre qu'il aimait entre tous et finit par lui sacrifier deux doigts de sa main qu'il coupa avec ses dents. Il se regarda longuement dans le miroir de la Yara et il vit que son visage était tel qu'il l’avait laissé naguère dans les yeux épouvantés des hommes de son clan. Il ne se nourrissait plus que de racines et une force étrangère s'emparait de lui. Il se plaça au milieu du clan pour crier son retour et ordonner aux hommes de partir. Les femmes et les filles du clan se traînèrent vers Rani et s'accrochèrent à ses jambes qu'elles griffèrent de désir et de désespoir. Rani cria encore à son clan de partir et chacun trouve alors la force de s'enfuir. Et parce que tout était bien ainsi le serpent-des-jours-qui-nous -restent à vivre, auprès de l'Indien, mille et  mille fois solitaire, vint se lover.

La jeune fille à la voix de violon.

Une jeune fille avait compris dès l'enfance qu'on lui cachait quelque chose. Mais elle ne s'inquiétait guère des chuchotements, pensant qu'il en était toujours ainsi quand il y avait à la maison une petite fille.

Un jour, elle tomba d'un arbre et poussa un cri qui lui parut inhumain et musical. Elle surveilla désormais sa voix et crut y reconnaître des accents de violon.

Un garçon lui demanda un jour de faire marcher son violon et comme elle prétendit ne pas en avoir, il répondit qu'elle en avait un dans la bouche. Rien ne l'agaçait tant que les compliments sur sa voix. Elle avait l'impression que sa voix la révélait beaucoup trop comme si elle se mettait à se déshabiller au milieu d'une conversation. Comme elle ne voulait pas se singulariser, elle gardait généralement le silence et s'habillait avec modestie. Toutes ses amies finirent par la délaisser. Un chirurgien, ami de la famille, fut appelé à examiner cette gorge et ces cordes vocales. Mais après avoir observé la jeune fille, il s'abstint d'intervenir.

Un jour, alors qu'elle mangeait avec ses parents, elle répondit à une question de son père et ses parents la regardèrent avec étonnement : la voix de leur fille était devenue une voix comme les autres. Pour être sûr, le père décida de se faire lire le journal par sa fille tous les matins. Elle était devenue une femme et ne put s'empêcher d'en vouloir à son ami qui avait détruit en elle ces accords singuliers. Étonné de l’avoir pleuré, son père lui dit que si c’était à cause de sa voix, elle avait plutôt lieu de se réjouir.

Les suites d’une course.

Sir Rufus Flox avait donné son nom à son cheval. Il n'hésitait pas, la nuit qui précédait une course, à coucher dans l'écurie, contre sa monture et lui chuchoter des conseils précis pour le lendemain. Il ne faisait qu'un avec son cheval sur la piste. Lors du Grand prix des amateurs à Auteuil, il se précipita avec son cheval dans la Seine après avoir mené la course. Sir Rufus en ressortit sans son cheval. Le lendemain, il fut stupéfait de voir dans la glace de son taxi qu'il avait les yeux mêmes de son cheval et il entendit une voix en lui. C'était celle de son cheval qui lui reprochait de déjeuner tranquillement après l'avoir lâchement noyé parce qu'il ne pouvait plus le maîtriser. Sir Rufus rétorqua que c'était le cheval qui avait plongé. Le cheval lui promit qu'il ne se souviendrait de lui. Au cours du déjeuner, ses amis lui parlèrent de la course. Mais il leur annonça qu'il ne voulait plus en parler et qu'il ne montrait plus jamais en course.

À la fin du déjeuner, la maîtresse de maison eut une crise de nerfs en voyant, plantée dans le dos de Rufus, la queue de son cheval. Rufus s'enfuit sans prendre congé des invités. Dans la rue, il se retrouva complètement homme. Mais plusieurs jours plus tard, il se sentit inhumain. Pourtant le grand miroir qu'il avait acheté ne lui révéla rien de particulier. Il alla voir sa fiancée, une américaine. Mais ce jour-là, chaque fois qu'il rencontrait une jument, il ne pouvait s'empêcher de la suivre des yeux. Alors il renonça à sa visite et se rendit dans une grande écurie. Le lendemain, au lieu de sonner pour son petit déjeuner, il se mit à hennir la femme de chambre et lui demanda un morceau de susucre. Il fallait absolument qu'il raconte à sa fiancée tout ce qu'il éprouvait. Elle lui conseilla de ne pas contrarier sa nature. Alors, dans la nuit même, Rufus devint cheval. Toute la nuit, comme un malfaiteur, il évita les agents et même les passants. Il réussit à gagner le bois et mangea de l'herbe. Une biche le renifla. Enfin, sa fiancée parue dans l'allée du Ranelagh et fut surprise tout de même de voir son fiancé transformé en cheval. Un pauvre homme s'avança sans chemise contenant une corde sous le bras. On voyait bien qu'il allait se pendre à un arbre. Rufus alerta sa fiancée. La jeune femme interpella l'homme. Elle lui proposa d'acheter sa corde. Puis elle l'emmena avec Rufus vers une écurie de la porte Dauphine. L'homme tenait le cheval par la corde qui s'était mise à lui réchauffer agréablement la paume de la main. Rufus n'ust pas de peine à devenir cheval de trait. Il promenait régulièrement sa fiancée et les jours coulaient pour eux avec nonchalance.

Un jour, l'Américaine ne fut plus seule dans le tilbury. L'homme était de toutes les promenades. Le cheval écoutait la conversation des jeunes gens. Lhomme traita le cheval de cocu et voulut le faire chatrer à la première occasion. Alors le cheval lança le couple contre un platane. Rufus redevenu homme regarda le drame entre les brancards. Il essayait d'enlever le mors, mais empêtré dans les courroies, ce n'était vraiment pas facile, d'autant plus que ces gestes étaient encore un peu chevalins.

La piste et la mare.

Au centre du désert de la pampa, un homme s'avançait seul, portant deux sacoches en bandoulière et, à la main, une mallette. Il était de type oriental et avait dû quitter son pays depuis peu. On lui avait parlé d'une ferme à plusieurs lieues de là. À la ferme de San Tiburcio, l'homme assista à la tonte des brebis dans un hangar. Le Turc ambulant continua sa route en se pressant comme s'il était attendu depuis un moment. Juan Pecho devait être le patron. Une énorme paresse flâne partout dans son corps. Il tond mal et distraitement. Juan Pecho et les enfants ont vu le Turc. On lui donne une patrie, des sentiments, un caractère. Le Turc se présenta comme représentant pour la République Argentine de plusieurs grosses maisons étrangères. Il baissa les yeux sur son mensonge. La faim, le grand air l'avaient rendu inventif. Juan amena le Turc à la porte du rancho. Il lui présenta sa soeur Florisbela. Le Turc commença à sentir sa fatigue. Juan annonça que le Turc installerait ses affaires sur la table après le dîner. Tout le monde entra dans la vaste pièce qui servait de cuisine et de salle à manger. Les huit chiens bâtards vinrent flairer l'intrus. Le Turc mangeait dans un coin. Sous l'odeur de la viande grillée, le Turc convint en lui-même que cette vie nomade lui plaisait et retrouva, en même temps que son nom : Ali Ben Salem, l'amour de ses parents et de sa patrie et l'essentiel de sa biographie. Après le dîner, Juan demanda au Turc de montrer ses richesses. Il ouvrit des boîtes en carton dans lesquelles se trouvait des broches, des bracelets, des boucles d'oreilles, des porte-bonheur. Le Turc leur montra également des objets de toilette, de mercerie et parfumerie. Juan Pecho ouvrit une boîte renfermant un rasoir mécanique et s’en fit expliquer le maniement. Il en demanda le prix et négocia. Les péons avaient acheté des objets et s'en étaient allés. Il ne reste plus dans la pièce que Juan, le rasoir et le Turc. Juan planta son couteau dans la nuque du Turc. Puis il saisit le rasoir. Il se rasa avec soin. Après quoi, il enleva la ceinture du Turc qui renfermait 20 £. Juan n'avait pas tué pour ça, il n'était pas un voleur. Alors il eut l'idée de faire avec cet or une bonne action. Il glissa les livres sterling dans la tirelire de son neveu, l'infirme. L'or purifié coulait maintenant du côté des anges. Juan laissa dans la poche du Turc l'argent qui provenait des achats de Florisbela et des péons.

Puis il regarda les mallettes et les sacoches et en vida le contenu. Il jeta le corps du Turc dans une mare toute proche. Il partagea avec ses proches les affaires du Turc.

Florisbela avait entendu tomber le corps alors elle se mit à prier. Juan s'étonna de ne pas avoir les péons se diriger vers le hangar sans même se faire payer le salaire de la tonte. Ils étaient partis s'avant l'aube. Quatre jours plus tard, Florisbela annonça à Juan que le corps du Turc flottait. Juan retourna dans la mare pour repêcher le corps et y ajouter une autre pierre plus grosse autour du cou. Les proches de Juan n'avaient pas voulu des objets qu'il avait volés au Turc. Quelques jours plus tard, deux agents de la police montée se présentèrent à la porte du rancho. Juan se demanda qui l'avait dénoncé. Et lorsque le commissaire demanda à Juan si personne n'avait vu commettre le crime, il se souvint tout d'un coup : « si, senior, un chien ».

 

 

 

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