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Humanisme : le Contrat social
16 août 2020

Insomnie (Stephen King).

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Prologue : le temps des heures comptées.

 

1

 

Ralph Roberts compris que sa femme allait mourir. Il remercia le ciel d'avoir souscrit une couverture médicale complète car de mars à juin il dut emmener Carolyn dans divers établissements médicaux. Il avait eu l'impression de vivre dans une fête foraine durant cette période avec des médecins qui ne proposaient que des remèdes bidon et les refrains entraînants de l'orgue de barbarie qui n'arrivaient plus à couvrir la Marche funèbre. L'été fut caniculaire en 1992. La ville de Derry fut plongée dans une totale léthargie. Ralph savait que sa femme allait mourir peu de temps après l'été. Elle avait été la seule femme qu'il eût jamais aimée. Il écoutait l'horloge de la mort égrener son tic-tac en Carolyn. Il avait l'impression que son coeur allait éclater de chagrin et de terreur. Il se demandait comment il pourrait vivre sans elle.

Pendant cette période étrange, Ralph prit l'habitude de faire des marches de plus en plus longues malgré la chaleur. Cela lui permettait de rentrer fatigué et de ne plus entendre le tic-tac de l'horloge de la mort de Carolyn. C'est lors de l'une de ces marches que Ralph se rendit compte que quelque chose clochait sérieusement dans le comportement d'Éd Deepneau, son voisin de Harris Avenue.

2

Ce jour-là, Ralph avait remonté Harris avenue plus loin que d'habitude. Il avait parcouru plus de 8 km sans prendre un instant conscience du temps qui passait. Le ciel était couvert et pourtant Ralph voulut rentrer chez lui à pied. Il reconnut la voiture de son voisin Deepneau qui roulait à un train d'enfer vers l'entrée de l'aéroport. Deepneau freina au dernier moment et il sortit son badge pour ouvrir la barrière. Ralph entendit Deepneau lancer des jurons et il n'en revenait pas que son voisin, chimiste au laboratoire du centre de recherche Hawking, était l'un des jeunes hommes les plus doux et civilisés que Ralph eût jamais rencontrés. Helen, la femme de Deepneau venait voir Carolyn fréquemment avec son bébé. Une camionnette percuta la voiture de Deepneau. Deepneau jaillit de sa voiture endommagée et resta debout à côté de celle-ci pendant quelques instants. Ralph n'avait jamais vu son voisin avoir une telle attitude.

L'homme qui descendit de la camionnette faisait bien deux fois le poids d'Éd Deepneau. Ralph vit l'envie de meurtre dans les yeux de Deepneau. Ralph cria mais Deepneau ne se retourna pas. Le gros balèze avait peur. Deepneau le frappa. Il lui demanda combien il en avait tué. Ralph passa un bras sur les épaules d'Ed. Il lui demanda de laisser tomber d'un ton ferme.

Mais Deepneau se mit à chantonner. Le gros balèze pensait que Deepneau était fou. Ralph remarqua qu'une bâche bleue était tendue au-dessus de la plate-forme de la camionnette. À ce moment-là, Dorrance Marstellar, le patriarche du club des vieux croulants de Harris, arriva. Deepneau essaya de sortir de l'emprise de Ralph mais Ralph l'en empêcha. Ralph ordonna à Dorrance de s'en aller. Le patriarche lui avait dit qu'il ne voyait plus ses mains et lui avait conseillé d'arrêter de toucher Deepneau. Deepneau insulta le balèze et demanda à Ralph de regarder ce qui se trouvait sous la bâche.

Alors Ralph demanda au balèze ce qu'il cachait là mais le gros refusa de lui répondre. Deepneau traita le balèze d'assassin d'enfants. Le gros balèze releva la bâche pour montrer quatre tonnelets de fertilisant. Alors Ed se mit à pleurer. Ralph demanda au balèze d'ouvrir un des tonneaux pour calmer Ed. Mais Deepneau était persuadé que les tonneaux contenaient des bébés morts. Ralph put constater que les tonneaux contenaient une mixture faite de minuscules cristaux bleus et d'une matière brune.

Ed plongea la main dans le baril et laissa couler un peu de produit entre ses doigts. Quand il se rendit compte qu'il n'avait rien d'autre à trouver que d'un fertilisant le gros balèze lui conseilla de retirer le produit de son bras avant que la pluie ne tombe. Il lui donna des serviettes en papier. Après s'être essuyé, Deepneau présenta ses excuses au gros balèze. Le gros balèze demanda à Ralph s'il avait vu l'accident. Ralph répondit que non. Sans savoir pourquoi il avait menti. Le gros balèze estimait être responsable de l'accident. Deepneau était sincèrement désolé car il avait cogné sa tête dans le volant ce qui lui avait secoué la tirelire. Le gros balèze proposa d'échanger leurs noms et leurs numéros de téléphone. Le gros balèze avait eu une amende pour adresse l'hiver dernier et conduisait avec un permis provisoire. Il ne voulait pas d'ennuis avec les flics. Il était prêt à contribuer aux réparations jusque dans les 50 $. Ralph savait qu'il n'existait pas de permis provisoire. Il savait aussi que Deepneau était entièrement responsable de l'accident. Un camion s'arrêta sur le bas-côté. C'était celui de Trigger Vachon. Il demanda si tout allait bien. Ralph le rassura. Vachon demanda à Ralph des nouvelles de sa femme et cela culpabilise à Ralph qui était en retard pour s'occuper d'elle. Alors il demanda à Triiger de le ramener chez lui. Ralph se sentait encore perplexe à l'idée de ce qui venait de se passer mais il décida de ne pas s'en mêler davantage et il rentra chez lui. Gros balèze lui tendit la main pour le saluer et se présenta, il s'appelait John Tandy. Ralph salua Deepneau en lui demandant une dernière fois si tout allait bien et Deepneau lui répondit oui. Mais Deepneau avait un regard étrange comme s'il cherchait à savoir ce que son voisin avait vu et ce qu'il se rappellerait plus tard.

3

Vachon avait eu l'impression que Deepneau était sorti par la porte de service de l'aéroport. Il se demandait comment il pouvait avoir une passe. Ralph ne savait pas pourquoi. L'orage se mit à éclater. De la buée se forma sur le pare-brise et Ralph dessina des caractères chinois. Il les avait vus sur le foulard que portait Deepneau. Il arriva devant chez lui et salua Trigger. La porte d'entrée était entrouverte. Le coeur de Ralph battait à se rompre dans sa poitrine allait ajoutiez, il y avait Bill McGovern. Bill annonça à Ralph qu'il venait d'appeler les urgences.

4

Carolyn gisait en travers du passage qui donnait sur la cuisine. Ralph s'agenouilla à côté d'elle et lui dégagea les yeux et le front car ses cheveux lui retombaient sur le visage. Ralph remercia Bill. Bill avait entendu Carolyn tomber. Ralph entendait le tic-tac que même le tonnerre n'arrivait pas à étouffer. Bill referma la porte de l'entrée. Ralph déposa Carolyn sur le canapé. Ralph sentit que Carolyn lui glissait entre les mains. Il l'embrassa et lui demanda de tenir bon. L'ambulance arriva et Ralph se mit à pleurer.

5

Carolyn reprit connaissance dans l'ambulance mais elle eut une seconde convulsion. À l'hôpital, le docteur Jamal, neurologue, dit à Ralph que Carolyn était maintenant stabilisée. Il allait falloir lui administrer un nouveau traitement mail fallait s'attendre à voir bientôt apparaître des problèmes de contrôle neuromoteurs.

6

Ralph resta assis à côté de sa femme à écouter le tic-tac et se mit à pleurer. Il voulait attraper ce qui faisait ce bruit pour le piétiner. Le lendemain, Carolyn était parfaitement réveillée. Ralph la ramena à la maison et entrepris de rendre ces derniers mois aussi confortables que possible. L'hiver arriva et le compte à rebours mortel semblait égrener ses coups de plus en plus violemment à mesure qu'il ralentissait. Ralph n'avait pas de problèmes pour dormir. Ça, ce fut pour plus tard.

Première partie : de petits docteurs chauves.

Chapitre 1.

Un mois environ après la mort de sa femme, Ralph commença à souffrir d'insomnies, pour la première fois de sa vie. Il se retrouva dans un état de détresse qu'il ne pouvait accepter. À la fin de l'été 1993, il en vint à se demander à quoi ressembleraient ses dernières années sur terre. Mike Hanlon le bibliothécaire de Derry lui conseilla des livres sur les désordres de sommeil. Personne ne semble savoir exactement ce qu'était le sommeil lui-même. Il avait du mal à consulter un médecin car il en voulait encore docteur Litchfield qui avait diagnostiqué chez Carolyn, à la place d'une tumeur cérébrale, des céphalées d'hypertension. À la fin de l'été, Ralph en avait assez lu sur l'insomnie pour savoir que celle dont il était affecté, sans être rares, était toutefois moins commune que l'insomnie habituelle des gens qui ont du mal à s'endormir. À la suite de la mort de Carolyn, Ralph avait commencé à souffrir de réveils prématurés une fois réveillée, il n'arrivait pas à se rendormir. Il finit par renoncer complètement à essayer de se rendormir. Les livres qu'il avait lus lui avaient confirmé que l'on dort moins en prenant de l'âge.. Perdre une heure par nuit était acceptable pour Ralph il se considérait encore comme bien nanti.

Mais dès le mois de mai, Ralph se réveillait au chant des oiseaux, à 5:15. Il pensait qu'un interrupteur se déclenchait dans sa tête un peu plus tôt à chaque jour. En juin, il jaillissait du sommeil comme un diable de sa boîte à 4:30. Au mois de juillet, il se réveillait aux environs de 4:00. Il commença à envisager l'enfer qu'allait être servi si jamais il se retrouvait complètement privé de sommeil.

Il découvrait certaines vérités affligeantes à propos des nuits sombres de l'âme et la pire de toutes était celle-ci : à 4:15 du matin, n'importe quoi paraissait possible. Il avait accepté sa solitude mais il ne voulait pas accepter la dépression.

Il n'était pas sédentaire puisqu'il passait beaucoup de temps dans son jardin l'après-midi. Cela l'empêchait de penser à des choses sur lesquelles il préférait ne pas s'attarder. Au mois d'août, Ralph se réveillait vers 3:30 tous les matins.

2

Ralph reprit ses marches en parcourant 3 km les jours où il ne pleuvait pas. Il se rendait à la bibliothèque, dans une boutique de livres d'occasion et chez le marchand de journaux. Dans une boutique de vêtements d'occasion, il vit une affiche sur laquelle on voyait les photos d'une femme recherchée pour meurtre qui s'appelait Susan Edwina Day. Ralph chercha à quoi ce nom lui faisait penser. Ce nom était apparu dans la chanson que chantonnait Deepneau le jour où il avait perdu la raison momentanément. Mais Ralph n'eut pas le temps de s'en rappeler car Hamilton Davenport, le propriétaire du magasin de livres d'occasion lui adressa la parole. Ralph acheta deux journaux et c'est alors qu'il se rappela de la chanson de Deepneau. Quand Davenport lui demanda s'il allait bien, Ralph lui répondit qu'il ne dormait pas très bien depuis quelque temps alors Davenport lui conseilla de boire un verre de lait chaud et d’écouter de la musique douce une demi-heure avant de se mettre au lit. Ralph découvrit, cet été, qu'apparemment tout le monde, aux États-Unis, avait son remède favori contre l'insomnie.

Ralph demanda à Davenport qui était la femme sur l’affiche. Davenport répondit que Susan Day était l'une des trois ou quatre femmes qui détenaient le plus d'influence politique aux États-Unis. Elle avait reçu le prix Pulitzer pour une étude sur les femmes battues. La photo de Susan Day avait été collée sur un avis de recherche de la police. Davenport en était choqué. Davenport expliqua à Ralph qu'un membre de commando anti IVG avait essayé de jeter une bombe incendiaire sur le centre de planning familial l'hiver dernier. Depuis des années, des manifestants brandissaient leurs pancartes devant le bâtiment qui abrite l'planning familial. Ralph trouvait ces manifestants trop définitivement convaincus que Dieu était à leur côté. Davenport demanda à Ralph s'il avait quelque chose contre la clinique qui pratiquait des avortements. Ralph répondit qu'il n'en savait rien. Avec Carolyn, il n'avait jamais réussi à avoir un enfant.

Un homme appelé Dalton arriva. Davenport lui montra l'affiche du doigt en secouant violemment la tête et le sourire de Dalton s'agrandit. Davenport pensait que c'était un connard. Ralph s'apprêtait à partir mes Davenport lui demanda de signer une pétition en faveur de la clinique. Ralph eut envie de lui dire que la seule pétition qu'il avait envie de signer serait pour demander aux dieux du sommeil de lui restituer les 3 heures de bon repos qu'ils  lui avaient lui avait barbotées. Il pensa à Carolyn qui aurait probablement signé cette fichue pétition alors Ralph signa. La pétition demandait à Susan Day de venir à Derry.

3

Ralph vit Lois Chassey qui habitait de l'autre côté de Harris avenue. Il s'assit sur un banc à côté d'elle. Elle pensait que Ralph n'avait pas l'air d'aller très bien. Ralph venait d'avoir un étourdissement et Lois s'en était aperçue.

Elle lui demanda pourquoi il n'allait pas faire ça marche sur Extension où la route était plate et où il allait autrefois mais il répondit que cela lui faisait penser à Carolyn. Ralph vit de la tristesse et de la solitude dans le regard de Lois. Il la trouvait encore pas mal du tout et il ne voyait pas d'inconvénient à partager son lit mais il ne voulait pas faire n'importe quoi. Il proposa à Lois de venir le voir et rentra chez lui. Jamais il ne s'était senti aussi épuisé de sa vie.

Chapitre 2

1

Ralph prit rendez-vous avec le Dr Litchfield moins d'une heure après sa conversation avec lois il repensa à l'expression de culpabilité et de gêne lorsque le docteur avait compris qu'il s'était trompé dans son pronostic sur Carolyn. Une demi-heure plus tard, Ralph rappela la secrétaire du docteur pour annuler son rendez-vous. Il supposait qu'en fin de compte il allait essayer la méthode Hamilton Davenport. La première méthode qu'on lui avait conseillée était de prendre du whisky avec une cuillerée de miel une demi-heure avant de se coucher. L'idée était venue de McGovern. Ralph avait essayé et cela n'avait provoqué qu'un méchant mal de tête.

2

Ralph était inquiet par son état. Il se sentait horriblement mal. L'insomnie contaminait tous les aspects de sa vie. Le monde commençait à prendre cette apparence granuleuse et tristounette des photos de presse. Les décisions les plus simples devenaient difficiles à apprendre. Au cours des deux dernières semaines, il était revenu de plus en plus souvent les mains vides de la boutique de location de cassettes.

Sa mémoire à court terme commençait également à lui jouer des tours. Il avait oublié le numéro de téléphone du répondeur automatique du complexe de cinémas. Une solution se présenta à son esprit comme une brise fraîche par une journée brûlante. Cela valait la peine d'essayer.

3

Ralph se rendit à la bibliothèque et parcourue certains des livres qu'il avait déjà lus. De l'avis général, il semblait que si le fait d'aller au lit plutôt ne changeait rien, se coucher plus tard pouvait en revanche marcher. Mais ce fut un nouvel échec.

4 il essaya une seconde fois. L'envie de dormir s'empara de lui à l'heure habituelle (23:20) et il lutta victorieusement en regardant la télévision. Puis il se mit à lire. Mais la somnolence disparut et Ralph ressentit une dépression profonde comme jamais. Il découvrit qu'être fatigué et avoir envie de dormir n'avaient rien à voir.

Son lit était devenu un objet de haine.

5

L'échec de Ralph lui donna une précieuse leçon : ne pas faire la fine bouche sur trois ou quatre heures de sommeil par nuit pour la seule raison que l'on a cru, à tort, que l'on avait le droit de dormir au moins six heures. Il était abominablement fatigué mais ne ressentait pas la moindre envie de dormir. Il voulut se faire une soupe instantanée mais il réalisa qu'il n’en avait plus. Ensuite il traversa Harris avenue et entra au Red Apple. Où ses véritables ennuis allaient commencer.

6

Il entra dans le magasin sans cesser de songer à l'échec spectaculaire de la méthode du sommeil retardé. Il s'acheta des soupes. Arrivé à la caisse, la caissière se mit à crier. Une femme ensanglantée se dirigeait d’un pas vacillant vers le Red Apple. C'était Helen Deepneau. Elle avait une entaille à la tempe gauche et les lèvres boursouflées et elle saignait du nez.

Elle portait son bébé qui braillait à tue-tête. Ralph courut dans l'allée et attrapa Helen par les épaules. Le bébé glissa mais Ralph réussit à rattraper Natalie par la bretelle de sa petite salopette. Elle réclama son bébé mais Ralph lui demanda d'attendre car elle tenait à peine debout. Il ordonna à Sue, la caissière, de l'aider. Bill McGovern arriva et demanda ce qui s'était passé. Ralph lui répondit que Helen avait été battue. Il lui tendit le débit. Comme Bill ne savait pas s'y prendre, Ralph demanda à Sue de s'occuper de Natalie. Des adolescents arrivèrent et regardèrent Helen avec avidité. Il y en eut pour rire. Alors Ralph leur ordonna de ficher le camp.

Ralph accompagna Helen vers le petit bureau, derrière la caisse. Il l'installa dans un fauteuil en plastique et prit le téléphone pour appeler la police. Mais Helen refusa. Sue donna Natalie à sa mère. Ralph demanda si c'était Ed qui lui avait fait ça. Helen acquiesça. Elle ne pouvait pas supporter l'idée que le père de sa fille se retrouve en prison.

7

Sue avait fermé le magasin. Elle demanda à Ralph il fallait faire. Ralph avait de la reconnaissance pour Helen car elle s'était occupée de l'enterrement de Carolyn et avait soutenu Ralph qui s'était retrouvé dépourvu de tout sens pratique. Il se devait donc de lui rendre la pareille. Il appela la police en repoussant la main d'Helen qui voulait s'interposer.

Il se rappela l'incident avec le gros balèze. Il n'était pas surpris par la violence de Deepneau. Il voulut savoir pour quelles raisons il avait frappé sa femme. Helen lui expliqua qu'il avait été battu par son mari parce qu'il avait appris qu'elle avait signé une pétition. C'était une pétition pour soutenir le centre de planning familial et pour que Susan Day vienne à Derry. Helen se demandait ce qu'elle allait devenir. Elle en voulait un Ralph d'avoir appelé la police. Mais il la rassura en lui disant qu'elle avait beaucoup d'amis dans le quartier. Ralph lui demanda où était son mari. Elle répondit qu'il devait être à la maison. Alors Ralph s'en alla avant l'arrivée de la police. Bill voulut l'en empêcher mais en vain. Bill suivit son ami.

Chapitre 3

1

Les Deepneau étaient végétariens. Ils avaient fait campagne en faveur de Clinton et ils étaient écologistes. Ed était dans son jardin. Il écoutait de la musique. Bill supplia Ralph de ne pas se battre avec Deepneau. Ed accueilli Ralph avec un sourire. Il lui proposa une bière. Mais Ralph répondit qu'il ne tournait pas rond. Une deuxième voiture de police venait d'arriver. Ed ne comprenait pas pourquoi. Il vit Bill il lui proposa également une bière. Alors Ralph lui ordonna d'arrêter ses conneries. Il lui demanda s'il avait frappé sa femme à cause de la pétition en faveur de Susan Day. Alors Ed le poussa. Ralph comprit que la folie de Deepneau était vieille d'au moins un an. Bill proposa à Ralph de partir. Mais Ralph et refusa. Ed reconnut s'être mis en colère après avoir découvert la signature d’Helen. Il comparait les défenseurs de l'avortement avec Hérode. Il était paranoïaque. Il pensait que les camions bâchés transportaient des foetus. Ed croyait en l'arrivée d'un nouveau messie. Ralph se moqua de lui en lui demandant s'il pensait que les foetus avortés étaient le signe que le roi Hérode avait été mis au courant avec un temps d'avance cette fois. Il trouvait enrageante l'idée que Helen avait dû sa raclée à un tel ramassis de conneries d'un autre âge. Une voiture de police se gara devant chez Deepneau. Deepneau dit à Ralph que le roi Hérode était l'une des incarnations du roi pourpre toujours lancé à la recherche du Messie.

Deux flics descendirent de la voiture et s'approchèrent de McGovern. Ralph distingua des autres hommes qui sortaient du Red Apple en tenant précautionneusement Helen et Natalie. Ils les mirent dans une ambulance. Celui des deux flics qui était en civil paraissait connaître McGovern. Ed passa un bras autour des épaules de Ralph et s'éloigna avec lui de quelques pas. Il lui dit que les centurions, serviteurs du roi pourpre, rien ne les arrêtait. Il prétendait que les centurions prenaient les foetus de toutes sortes de mères. Il affirmait que l'on retrouvait des foetus dans les égouts. Ed prétendait que quelqu'un lui avait parlé. Ralph voulut savoir de qui parlait. Ralph répondit qu'il lui en reparlerait plus tard. Ed accueillit les policiers avec un sourire. Il leur serra la main. Il avoua s'être comporté comme un vrai con avec un petit rire gêné. Il prétendit ne pas arriver à croire qu'il avait frappé sa femme. Ralph avait l'impression de voir Ed utiliser la même technique de séduction qui lui avait permis de calmer le gros balèze. Ralph intervint en disant qu'il ne fallait pas croire son voisin car c'était un cinglé. Leydecker, le sergent détective répondit à Ralph qu'il aurait un entretien avec lui. Alors Ralph partit rejoindre McGovern. Le flic en tenue coupa la musique. Le détective annonça à Ed que tout ce qu'il pourrait dire pourrait être utilisé contre lui devant un tribunal. Et qu'il avait le droit d'avoir un avocat. Alors Ralph se rendit compte que Leydecker n'était pas un naïf. Ed était sous le choc. Il resta muet comme un ordinateur humain essayant d'intégrer une masse énorme de données compliquées.

Il venait de prendre conscience que son numéro ne produisait pas l'effet escompté. Ralph ne pouvait s'empêcher de ressentir une certaine sympathie pour Ed car il avait fidèlement rendu visite à Carolyn trois fois par semaine pendant son séjour à l'hôpital. Ed demanda à Leydecker s'il était dans la merde. Le flic lui demanda pourquoi il avait essayé de scalper sa femme. Ed prétendit regretter ce qu'il avait fait. Le détective arrêta Ed sous l'inculpation de coups et blessures et agression conjugale. Le sourire de Ed avait disparu. Il allait être mis en garde à vue. Ed versa une larme. Il dit à Ralph qu'il était désolé et monta dans la voiture des policiers.

2

Leydecker s'excusa auprès de Ralph pour avoir été un peu brusque mais il savait que les types comme Ed étaient imprévisibles et il devait donc lui portait toute son attention. John Leydecker avait été l'élève de McGovern. Le policier dit à Ralph qu'il fallait être fou pour venir affronter Deepneau. Ralph avoua qu'il était furieux à ce moment-là. Le détective voulut savoir ce que Deepneau avait raconté à Ralph. Ralph rapporta sa conversation avec Deepneau. Ralph pensait que Deepneau serait envoyé à l'hôpital psychiatrique. Leydecker annonça à Ralph que Deepneau que ce que l'on pouvait espérer de mieux était que la cour l'oblige à suivre une thérapie. Leydecker pensait que Ed était coincé même si sa femme ne témoignait pas contre lui car l'employée du magasin et Ralph lui-même pourraient témoigner de l'état dans lequel Deepneau avait mis sa femme. De plus Deepneau avait dit devant un policier qu'il regrettait d'avoir battu sa femme. Leydecker pensait que Deepneau serait dehors dès le soir même grâce à une caution de 25 $. Il avait dit à Deepneau qu'il serait inculpé pour agression conjugale mais dans l'État du humaine, flanquer une raclée à sa femme relevait du simple délit. Heureusement si Deepneau faisait une demande de liberté sous caution, il devrait accepter de n'avoir aucun contact avec sa femme tant que l'affaire n'aurait pas été jugée par un tribunal.

3

Ralph retourna chez lui et fut pris d'un étourdissement. Il tremblait de tout son corps et avait la sensation désagréable d'être sur le point de vomir. Il comprit que ce n'était qu'une réaction à retardement. Il prit un bain puis se fit à manger. Il appela l'hôpital pour prendre des nouvelles d'Helen. Son état était considéré comme bon. Mais on ne lui donna pas de nouvelles de Natalie et il n'avait pas le droit de venir voir Mme Deepneau qui ne voulait voir personne. Ralph comprit que Helen ne voulait pas de visiteurs parce qu'elle avait honte. Alors qu'il s'apprêtait à manger, le téléphone sonne. Ralph entendit une respiration assez sonore pour avoir été un sanglot rentré. La personne raccrocha. Ralph devina que c'était Helen.

4

Un quart d'heure plus tard, le téléphone sonna de nouveau. C'était Helen. Elle avait une voix enrouée. Une infirmière lui avait donné un analgésique mais elle n'avait pas voulu le prendre avant d'avoir appelé Ralph. Elle voulait le remercier. Il s'attendait à ce qu'elle s'en prenne à lui. Elle avoua qu'elle avait été terriblement en colère contre lui. Elle avait confié son bébé à une amie. Puis une femme était venue la voir dans sa chambre. Elle s'appelait Gretchen Tillbury. C'était une conseillère matrimoniale au planning familial. Son mari lui avait ouvert la cuisse d'un coup de couteau. Helen avait refusé de lui parler de sa propre situation. Helen avoua à Ralph que son mari avait commencé à la frapper deux ans plus tôt. Gretchen avait insisté. Mais Helen avait répondu qu'elle n'avait pas besoin de ses conseils. Gretchen lui avait demandé comment elle se sentirait si elle reprenait la vie commune avec son mari et s'il se mettait à la battre de nouveau. Puis comment elle se sentirait si c'était à Natalie qu'il s'en prenait. Ça avait rendu Helen furieuse car Ed n'avait jamais levé la main sur Natalie.

Gretchen lui demanda si elle avait envie que sa fille grandisse en étant témoin des corrections que son mari lui imposait. Elle raconta à Ralph ce que Ed lui avait fait devant Natalie. Elle éclata en sanglots violents et Ralph lui-même se mit à pleurer. Helen avait discuté avec Gretchen pendant une heure. Helen avait accepté de la voir au planning familial. Helen détestait la manière qu’avaient les personnes comme Gretchen ne coinçait les gens et de ne plus la lâcher. Ralph lui expliqua que Gretchen essayait de l'aider. Gretchen lui avait parlé d'une maison de convalescence pour les femmes battues du côté de Newport. Gretchen lui avait expliqué que l'amour qu'elle portait à son mari ne pourrait pas le guérir et que tout l'amour du monde ne changerait rien aux responsabilités qu'elle avait vis-à-vis de sa fille. Et ça n'avait réussi à éteindre la fureur d'Helen.

Elle était toujours en colère contre Ralph mais elle était contente qu'il ne l’ait pas écoutée quand elle lui avait demandé de ne pas appeler la police.

Ralph demanda à Helen s’il pouvait venir la voir le lendemain. Mais elle ne voulait pas. Elle l'appellerait. Il lui demanda comment il allait faire pour sa maison. Elle répondit que c'était le mari de son amie Candy qui s'en occuperait. Elle demanda à Ralph s'il arrivait à dormir. Ralph fut pris au dépourvu mais il lui répondit qu'il dormait un peu mais pas autant qu'il le fallait. Elle le remercia encore d'avoir été aussi courageux qu'un chevalier de la table ronde. Ralph en fut amusé.

5

Ralph descendit pour s'asseoir sur le porche ou se trouvait déjà McGovern. McGovern semblait inquiet de la santé de son voisin. Ralph lui donna des nouvelles d'Helen. Mais il ne lui donna pas les détails car il savait qu'elle n'avait jamais eu beaucoup d'amitié pour Bill.

Billet lui avoua le courage dont il avait fait preuve lui avait semblé joliment culotté. Il avait pris l’air et avait rencontré Dorrance. Il trouvait qu'il ressemblait à un revenant. Ralph se rappela l'attitude qu'avait eue Dorrance quand Ed s'en était pris au gros balèze. Il évoqua des souvenirs de son adolescence. Ralph savait que son ami était homosexuel mais Bill n'en avait jamais parlé avant ce soir-là. Ralph aurait préféré qu'il choisisse un autre moment. Bill parla de leur voisine May qui souffrait d'emphysème. Il pensait qu'elle en avait plus pour longtemps. Cela le rendait triste car il va connaissait depuis fort longtemps. Puis il demanda à Ralph si le whisky avait eu son effet. Ralph dut reconnaître que tel n'avait pas été le cas. McGovern lui conseilla d'essayer quelque chose d'autre sans quoi il ne coucherait jamais avec la ravissante Lois. Ralph lui dit qu'il était surpris de ne plus le voir porté son panama. McGovern avait perdu son chapeau.

Ralph demanda à McGovern s'il se doutait que Ed était devenu cinglé à ce point. McGovern secoua la tête. Ralph voulait connaître son avis sur la suite et il répondit que comme tous les profs à la retraite, il était cynique. Il ne pensait pas que les choses s'arrangeraient. Il pensait qu’Helen  reviendrait avec son mari et qu'elle le quitterait une fois de plus. Il pensait qu'elle aurait besoin d'un round de plus pour jeter l'éponge. Lois vint les rejoindre. Elle venait d'apprendre ce qui était arrivé et voulait avoir des nouvelles d' Helen. Ils lui racontèrent la totalité de l'histoire.

6

Cette nuit-là, la Ralph se réveillait à 3:30 le vendredi matin. Il resta néanmoins encore un moment au lit. Il se rappela ce que Dorrance lui avait dit lors de la querelle entre Ed et le gros balèze. Il avait dit à Ralph qu'il ne pouvait plus voir ses mains.

Chapitre 4.

1

Ralph fut ravi de constater que McGovern avait tout faux en ce qui concerne Helen. Elle avait décidé d'en finir avec son mari. Elle lui avait envoyé une lettre. Côtoyer des femmes battues l'avait soulagé car elle savait à présent qu'elle n'était pas la seule à avoir subi cela. Elle parla de ses activités et de sa fille. Elle semblait tout juste découvrir qu'elle avait le droit d'être traitée décemment. Ralph en fut heureux mais triste également à l'idée de tous les moments sombres par lesquels elle avait dû passer avant d'être frappée par cette simple vérité.

Elle allait demander le divorce. Elle avait reçu un mot d'Ed disant qu'il habitait dans l'un des cottages des laboratoires qui l'employaient. Il disait qu'il était désolé mais elle ne le croyait pas. Il lui avait envoyé 750 $. Elle espérait qu'il sera condamné à 18 mois de psychothérapie intensive. Elle avait peur de son avenir. Mais elle savait aussi qu'elle avait un véritable ami, Ralph. La lettre était signée : Affectueusement, Helen. Ralph écrasa les larmes qu'il avait au coin des yeux. En post-scriptum, elle lui apprenait que les hommes n'étaient pas les bienvenus et qu'il ne pourrait pas lui rendre visite.

Il rangea la lettre et sortit en direction d'Extension et de l'aire de pique-nique.

2

Le jour de la fête du Travail, Ralph ouvrit les yeux à 2:45. Le 10 septembre, le jour où Deepneau fut de nouveau arrêté, cette fois en compagnie de 15 autres personnes, le temps de sommeil de Ralph se trouvait réduit à environ trois heures. Sa liste de remède de bonne femme ne cessait de s'accroître au point qu'il s'était dit qu'il aurait de quoi écrire un petit livre amusant sur la question. Il y avait des moments où il aurait juré sentir son esprit se vider. Sue lui avait offert un oeil magique, une amulette, et Ralph avait senti un fou rire presque irrépressible monter en lui mais la gravité avec laquelle Sue lui avait fait ce cadeau et la chaîne apparemment en or à laquelle elle avait accroché l'allumette laisse entendre qu'il lui avait coûté beaucoup.

Alors Ralph porta le médaillon pour faire plaisir à Sue. Mais cela ne l'aida pas à dormir. Ralph fit sa déposition dans le cadre de l'affaire Deepneau et le détective Leydecker lui dit qu'il avait appris par McGovern qu'il souffrait d'insomnies. Leydecker lui conseilla de manger du gâteau au miel. Son grand-père ne jurait que par ça. Ralph essaya mais sans succès. Lois lui acheta un objet supposé soulager de l'arthrite et des insomnies. Cela n'eut aucun résultat. Trigger Vachon lui conseilla la camomille, sans résultat non plus. Le 10 septembre, jour de la première manifestation des Amis de la Vie devant le centre WomanCare, Ralph décida de faire appel aux produits pharmaceutiques. Il se promit d'aller voir un médecin si les médicaments ne fonctionnaient pas. Il retrouva Bill et Lois devant le parc. Ils lui parlèrent de la manifestation devant le planning familial. Deepneau avait été arrêté. Ralph en fut surpris car il croyait Deepneau à Fresh Harbor. Les manifestants avaient été arrêtés car ils avaient lancé des pierres. Un manifestant avait utilisé une bombe lacrymogène contre deux médecins.

Ralph se dit que Deepneau pouvait bien avoir été à cette manifestation il ne s'agissait donc probablement pas d'une banale affaire où quelqu'un aurait été blessé accidentellement. Loi proposa d'aller chez elle et elle appellerait Simone Castonguay qui avait une nièce standardiste au planning familial. Ralph promit de les rejoindre mais avant il alla chercher ses médicaments à la pharmacie. Loi demanda à Ralph s'il avait retrouvé sommeil il mentit pour la rassurer. Un instant, Ralph eut une hallucination. Il crut que Lois et Bill laissaient derrière eux des empreintes luisantes sur le trottoir d'où s'échappaient de petits rubans d'une fumée colorée. De plus il avait vu des diagonales d'un bleu brillant qui partaient des doigts de Lois.

3

Ralph n'avait jamais été gros consommateur de médicaments et il fut surpris par la profusion exubérante de produits dans la pharmacie. Une voix intérieure lui conseilla d'aller voir le médecin et aussitôt il pensa à ce que le docteur Litchfield avait dit quand sa femme était tombée malade. Il avait prétendu que sa vie n'était pas en danger. Alors il prit une boîte de Sleepinex et sursauta à cause d'un homme en blouse blanche qui venait de lui adresser la parole. C'était un pharmacien. Ralph lui demanda quel était le médicament le plus efficace. Plussaj, le pharmacien, lui demanda s'il était insomniaque. Ralph répondit qu'il serait le plus heureux des hommes s'il pouvait avoir 5 heures de sommeil certaines nuits. Plussaj voulut savoir depuis combien de temps cela dur et Ralph Ponty que cela avait commencé en avril, un mois après la mort de sa femme. Il se mit à penser que son insomnie pouvait être le symptôme d'un cancer. Le pharmacien lui demanda de décrire ce qu'il ressentait. Ralph répondit qu'il avait des réveils prématurés. Il donna le nom de son médecin et le pharmacien compris qu'il n'avait pas l'habitude de venir dans cette pharmacie. Il comprit que Ralph n'était pas allé voir son médecin depuis longtemps. Le pharmacien comprit que Ralph avait déjà essayé plusieurs remèdes. Alors il se fit sincère et révéla que tous les somnifères présents sur les rayons étaient inefficaces pour Ralph. Ralph se sentit en confiance. Le pharmacien lui demanda s'il avait un problème avec Litchfield et de sa capacité à comprendre à quel point ses insomnies le rendaient malheureux. Ralph répondit que c'était le cas. Plussaj lui demanda s'il faisait toujours des rêves et c'était le cas. Il faisait des rêves cohérents. Le pharmacien lui demanda s'il faisait des rêves lucides sur le lesquels il pouvait influer le cours. Ralph acquiesça. Le pharmacien le proposa d'aller dans un petit restaurant pour discuter.

Chapitre 5

1

Plussaj pensait qu'il n'y avait rien au monde qui puisse se comparer à une bonne nuit de sommeil. Il pensait que le sommeil était le parent pauvre de la médecine. Il avait lui-même souffert de problèmes d'endormissement à partir de l'âge de 13 ans. Il avait fini par faire des recherches pour deux articles. Il expliqua à Ralph qu'il y avait le bon et le mauvais sommeil. Tant que Ralph faisait des rêves cohérents c'était qu'il avait encore un bon sommeil. Ainsi, une ordonnance pour des somnifères serait peut-être la pire des choses pour lui en ce moment.

Il savait que Litchfield adorait remplir des ordonnances. Si Ralph prenait des somnifères, il pourrait dormir mais risquait de payer ensuite l'addition. En effet, les benzodiazépines entraînaient une accoutumance et réduisaient aussi le sommeil paradoxal, c'est-à-dire le sommeil pendant lequel on rêve.

Plussaj expliqua que personne ne savait vraiment pourquoi il semblait exister une relation très nette entre les rêves lucides et l'état de notre santé mentale. Une bonne santé mentale consistait à avoir la capacité de raisonner et une bonne mémoire. Ralph dit au pharmacien que sa mémoire était mauvaise depuis quelque temps. Le pharmacien lui expliqua que ce n'était pas encore très grave puisqu'il avait conservé sa mémoire à long terme. Il lui dit également que les expériences scientifiques avaient confirmé que les personnes arrêtant de dormir ou qui souffraient d'interruptions constantes de leurs rêves se mettaient à connaître des problèmes perceptifs comme l'hyperrréalité. L'hyperréalité se manifestait par des perceptions sensorielles exacerbées comme dans un trip au LSD. À ce moment-là, Ralph crut percevoir une aura bleue au-dessus de la tête d'un client du restaurant. Ralph demanda au pharmacien quelle solution il lui restait. Alors Plussaj lui annonça qu'il allait lui donner deux cartes de visite pour aller consulter des médecins. James Rey Hong était acupuncteur et Anthony Forbes hypnotiseur. Puis, Plussaj proposa de jouer l'addition à pile ou face.

2

A côté de la pharmacie, se trouvait un magasin inoccupé. La vitrine du magasin était crasseuse et quelqu'un en avait profité pour écrire un message menaçant de mort Susan Day. Plussaj en était indigné. Et Ralph également.

3

Plussaj appela l'acupuncteur pour prendre un rendez-vous pour Ralph. Il réussit à persuader la secrétaire de Hong de trouver un créneau pour début octobre. Plussaj demanda à Ralph de revenir le voir pour lui raconter comment le rendez-vous s'était passé. Ralph se sentait assez calme. Les auras avaient disparu mais elles n'avaient rien eu d'effrayant, en réalité. Le pharmacien dit à Ralph qu'il traversait une période dangereuse et qu'il devait prendre soin de lui. Il lui conseilla d'appeler Litchfield s’il avait vraiment l'impression de dérailler. Il lui laissa son numéro. Ralph pouvait l'appeler de jour comme de nuit.

4

Les auras étaient de retour. Le monde était devenu merveilleux. Les objets n'avaient jamais été aussi brillants. Tout paraissait se précipiter sur lui comme dans les vieux films en relief. Le plus grand sujet d'émerveillement de Ralph était les gens. C'était autour d’eux que les aura semblaient plus clairement définies et réelles. Ralph éprouvait une peur considérable et une stupéfaction l’émerveillait. De la tête de toutes les personnes qu'il pouvait voir montait une traînée de lumière translucide. Les gens qui paraissaient invariablement en mauvaise santé dégageaient un panache presque noir et remarqua que les gens ayant peur dégageaient une aura rouge. Il avait fait peur une jeune femme qui tenait son fils par la main. Ralph comprenait parfaitement qu'il n’allait pas pouvoir vivre bien longtemps dans un univers de cet éclat et de cette intensité sans mettre sa raison en danger.

Ralph ressentait une espèce d'agréable mélancolie qu'il avait parfois éprouvé après avoir fait l'amour, quand il était tout jeune homme. Si jamais l'hypnotiseur ou l'acupuncteur réussissaient à le guérir, Ralph soupçonnait qu'il arrêterait de voir les auras et les panaches après sa première nuit de sommeil. C'était une excellente raison d'éprouver une pointe de mélancolie.

5

Ralph se rendit chez Lois. La petite maison de lois était bien rangée et encombrée d'objets. Ralph l’avait toujours comparée à la demeure d'un hobbit. Au-dessus de la télévision se trouvait une photo de M. Chassey. Lois leur avait préparé des macaronis au fromage. Ils regardèrent les informations. Il était question de la manifestation contre le planning familial et des arrestations. McGovern rapporta les propos de Simone. Elle avait dit que l'un des manifestants était Charles Pickering, celui que les flics avaient attrapé alors qu'il s'apprêtait à jeter une bombe incendiaire sur le planning familial, l'année précédente. Deepneau faisait partie des personnes arrêtées. Il n'y avait eu aucun blessé. Personne n'avait été aspergée de gaz lacrymogènes.

À la télévision, il fut question de Susan Day et de la manifestation contre le centre de planning familial. Ralph ne fut pas surpris de reconnaître à la télévision le détective John Leydeker. Le détective avait déclaré que cette manifestation n'avait rien de spontané puisque les manifestants avaient préparé des panneaux portant le nom de Susan Day. Ils avaient même apporté des poupées dans lesquelles ils avaient mis du faux sang. Les manifestants avaient lancé les poupées sur le bâtiment en criant des slogans contre Susan Day. Puis le reportage montrait Deepneau et son acolyte Dan Dalton que Ralph avait rencontré chez Davenport. Deepneau prétendait que les manifestants n’avaient l'intention de blesser personne et que personne ne l'avait été. Mais il affirmait que des flots de sang coulaient de WomanCare.

Dalton avait l'air cinglé et Ralph se demandait ce que les gens qui regardaient la télé devaient en penser. À côté, Deepneau semblait plutôt raisonnable. C'en était presque comique. Mais Deepneau affirma que cela faisait huit ans que durait le massacre à WomanCare. Il considérait l'IVG comme un acte brutal perpétré par une société sexiste. Quand un journaliste lui demanda si la méthode des manifestants était la meilleure pour faire connaître leur point de vue, Ralph remarqua immédiatement l'expression dure et froide de Deepneau. Ralph se prit à avoir peur pour la journaliste blonde presque aussi jolie que la femme de Deepneau. Deepneau osa comparer l'IVG avec la Shoah. Dalton évoqua le vote du conseil municipal visant à réexaminer le plan d'occupation des sols permettant au planning familial d'avoir son activité en cet endroit. Il pensait que la venue de Susan Day à Derry permettrait au conseil municipal de voter en faveur du planning familial. Ralph eut le sentiment que la jeune journaliste avait été séduite par Deepneau. Lois éteignit la télé et les trois amis commentèrent le reportage. Lois se demandait pourquoi la police avait relâché Deepneau. Elle aussi avait remarqué que la journaliste avait l'air prête à inviter Deepneau à venir dîner chez elle.

Lois ne comprenait pas pourquoi les violences conjugales étaient classées comme délits et non comme crimes. McGovern se doutait que les avocats des Amis de la Vie sauraient faire en sorte que la police ne fasse pas l'amalgame entre l'affaire Deepneau et l'attaque du planning familial. Ralph raconta à ses amis, pour la première fois, ce qui s'était passé en bordure de l'aéroport, l'été précédent. Ils en furent stupéfaits. McGovern lui conseilla de raconter cette histoire à Leydecker. Ralph eut envie de voir le policier à l'instant même. Il embrassa Lois sur le coin de la bouche avant de partir et elle le regarda avec étonnement et gratitude.

6

Ralph regarda les informations de 18:00. Il apprit que Dalton était à la tête du groupe des Amis de la Vie. Mais il songeait que Deepneau aller de venir le vrai patron. Mais Ralph se doutait que les patrons de Deepneau n'allaient guère apprécier que l'un de leurs chimistes ait été arrêté pour avoir jeté des poupées pleines de sang factice contre les murs d'une clinique qui pratiquait des avortements. En effet, le laboratoire de Deepneau était en passe de devenir le cinquième centre de recherche médicale à avoir l'autorisation de travailler sur du tissu foetal. Ralph se rappela que Deepneau lui avait raconté il voyait des auras ou des couleurs. Deepneau avait dit que le monde était plein de couleur mais qu'à partir d'un certain moment ces couleurs devenaient toutes noires. Une aura rouge apparut au-dessus du téléphone. Alors Ralph ferma les yeux et quand il les rouvrit, l'aura avait disparu.

Ralph comprit qu'il avait la capacité de chasser les auras par la force de la volonté. Un peu comme dans un rêve lucide. Grâce à cette aura, Ralph avait la conviction que c'était Deepneau qui l'appelait. Il décrocha le téléphone et dit : « allô. »

7

Ralph n'entende tout d'abord personne au bout du fil puis Deepneau proféra des menaces. Ralph lui répondit par un salut et lui dit qu'il l’avait vu aux informations. Deepneau lui en voulait car il avait reçu la visite de Leydecker. L'histoire de l'incident de l'aéroport et de la dispute avec le gros balèze avait beaucoup intéressé Leydecker. Le détective avait compris que Deepneau croyait en l'existence d'êtres surnaturels transportant des foetus dans des camions pour leur faire quitter la ville. Une lumière rouge pulsait au rythme des paroles de Deepneau au-dessus du téléphone. Deepneau affirma ne pas avoir été gêné quand Ralph avait appelé la police parce qu'il avait frappé sa femme. Deepneau paraissait sacrément déstabilisé comme s'il avait donné ce coup de téléphone avec un scénario précis en tête et que Ralph refusait de lui donner les bonnes répliques. Ralph lui répondit que si le fait de ne pas avoir était gênée par l'arrivée de la police chez lui après ce qu'il avait fait à Helen, en revanche la conversation d'aujourd'hui avec le détective l'embêtait visiblement. Ralph lui demanda pourquoi. Alors Deepneau lui répondit que ce serait une très grave erreur de ne pas prendre cela au sérieux. Ralph rétorqua que Deepneau était malade. Ralph se refusait d'entendre ce genre de reproches. Alors Ralph lui dit qu'il l'aimait bien et qu'il le trouvait intelligent. Il avait envie de retrouver l'Ed d'avant. Mais Deepneau lui demanda s'il voyait déjà les couleurs. Au même instant, la lumière rouge, autour du téléphone, disparut d'un seul coup.

Ralph prétendit ne pas avoir de couleur. Deepneau voulu donnait un conseil à Ralph en lui disant qu'il était en train de s'enfoncer en eaux profondes et n'avait pas la moindre idée de ce qu'était la folie et cela viendrait s'il persistait à se mêler de ce qui ne le regardait pas.

Ralph voulut savoir quelles étaie les choses qui ne le regardaient pas et Deepneau lui répondit que c'était des forces à l'oeuvre, à Derry dont il valait beaucoup mieux ne rien savoir. C'étaient des entités et il conseilla à Ralph de le laisser tranquille pour ne pas risquer d'attirer ces entités. Deepneau parla d'un petit docteur chauve qui l'avait mis au courant. C'est à ce petit docteur chauve que Ralph devrait répondre s'il essayait encore d'embêter Deepneau. Après quoi, Deepneau ordonna à Ralph de le laisser tranquille.

Après sa conversation, Ralph essaya d'oublier les manifestations antiavortement, les auras, Deepneau et le roi pourpre. Ce fut en fin de compte plus facile qu'il ne l'aurait cru.

Chapitre 6.

1

L'été s'acheva et les réveils prématurés de Ralph continuèrent. Il ouvrait les yeux tous les matins vers 2:15. Les feux d'artifices délirants ne s'étaient pas reproduits. Susan Day devait prononcer son discours le vendredi 8 octobre. Ralph vit Deepneau à plusieurs reprises à la télévision parlant d'un ton rapide et persuasif. Il plaisait au public. Les actions violentes avaient cessé mais pas les manifestations. Les prédicateurs brandissaient la menace de la damnation tandis que les enseignants parlaient de modération et d'éducation. Un policier aurait déclaré son espoir que Susan Day ait la grippe et serait obligée d'annuler sa venue.

Deepneau ne tenta pas de communiquer avec Ralph. Ralph reçut une carte postale d'Helen le 21 septembre. Elle venait de trouver un emploi à la bibliothèque de Derry. Ralph voulut montrer la carte postale à McGovern et à Lois mais ils n'étaient pas chez eux.

Il trouva McGovern dans le parc. Bill pleurait.

2

McGovern apprit à Ralph que l'homme à qui il devait son premier poste d'enseignant était mourant. L'homme s'appelait Bob Polhurst et souffrait d'une pneumonie. Pour Bill c'était une bonne nouvelle car il était atteint de la maladie d'Alzheimer depuis 1988.

C'était un professeur sensationnel. Soudain, Ralph sentit l'aura d'un petit garçon près de sa maman. Il avait des visions et se rendait compte qu'il percevait le passé de l'enfant. L'enfant était tombé de son berceau quand il avait huit mois et s'appelait Patrick. Bill sentait que Ralph n’allait pas bien mais Ralph voulut le rassurer. Il raconta que Bob voyait à travers les gens d'une manière qui lui paraissait inquiétante.

Bill raconta à Ralph que Bob avait deviné son homosexualité. Avant de l'engager, Bob lui avait demandé s'il pouvait avoir l'assurance qu'il n'y aurait pas le moindre petit incident touchant à ses préférences sexuelles. Bill avait protesté pour le principe. Bob lui avait tout appris de l'enseignement de l'histoire et du jeu d'échecs. Bob n'oubliait jamais une plaisanterie ni anniversaire des gens qui lui étaient proches. Il avait publié des articles sur la guerre de sécession et écrit un livre sur la bataille de Gettysburg qu'il n'avait pas voulu faire éditer. Bob redoutait d'être sous les feux des projecteurs.

Ralph raconta à McGovern que depuis un mois il voyait des choses. Un clochard s'approchait d’eux est Ralph pouvaient voir son aura verte qui ne concordait ni avec son attitude servile ni avec son sourire torve. Le clochard demanda un peu de monnaie à Ralph. Ralph lui donna 35 cents. Bill lui reprocha d'avoir encouragé le penchant alcoolique du clochard. Ralph renonça à parler des auras à son ami. Alors il lui montra la carte d'Helen. Bill trouva sensationnelle la nouvelle. Il aurait été prêt à parier qu'Helen retournerait avec Deepneau.

3

deux jours plus tard, Ralph lisait le quotidien de Derry. Le journal, bien qu'opposé à l'avortement, prenait ses distances avec les amis de la vie. Les Amis de la Vie s'étaient précipités sur des manifestants partisans de l'IVG. Il s'était ensuivi une mêlée d'une dizaine de minutes et la police avait procédé à plus de 30 arrestations réparties à peu près également entre les deux groupes.

La photo en première page du quotidien représentait Hamilton Davenport et Dan Dalton. Davenport brandissait le poing en un geste de triomphe. Dalton avait l'air sonné.

Le carillon retentit et Ralph devina que c'était Deepneau qui sonnait.

4

Ralph s'était trompé. C'était Helen et Natalie qui venaient le voir. Ralph voulait être sûr qu'il ne restait aucune trace des mauvais traitements qu'Helen avait subis. Elle paraissait impeccable. Helen lui murmura à l'oreille qu'il était son vieil ami et Ralph sentit quelque chose s'agiter à la hauteur de son bas-ventre. À ce moment-là, il se rappela ce que Deepneau lui avait dit. Helen lui présenta Gretchen Tillbury. C'était une grande blonde d'un mètre 80. Ralph fut frappé par son aura. Il la remercia d'avoir aidé Helen. Les deux femmes étaient venues pour demander quelque chose à Ralph.

5

Cela faisait longtemps qu'elle n'était pas venue chez Ralph. Elle regarda avec curiosité autour d'elle et prit la photo de Carolyn posée sur la table de la cuisine. Ralph eut une soudaine révélation : il aimait Helen en grande partie parce que Carolyn l'avait aimée. Ralph donna le biberon à Natalie. Helen se mit à pleurer car elle n'en revenait pas de voir à quel point son bébé était l'aise avec Ralph. Elle parla de son nouveau travail à la bibliothèque de Derry. Mike Hanlon venait de l'engager. Helen commençait son travail le 12 octobre, les après-midi et débuts de soirée. Les doigts de Natalie laissèrent une série de délicates traînées gris-bleu dans l'air. Le bébé fit un geste pour les attraper. Ralph en fut stupéfait. Elle voyait les auras. Helen était entourée d'une aura d'une opulente couleur ivoire et Gretchen avait une aura orange foncé.

Helen voulait divorcer et vendre sa maison. Ralph comprit qu'elle avait toujours peur de son mari. Sa mère avait refusé d'admettre que Deepneau ait jamais fait autre chose que donner à Helen de temps en temps une claque conjugale sur les fesses.

Ralph lui dit qu'elle n'avait rien imaginé et c'était lui qu'elle avait supplié de ne pas appeler la police. Gretchen lui pinça la cuisse et lui adressa un infime signe de tête. Ralph vit que l’aura de Helen changeait de couleur car elle se détendait. Helen et Gretchen faisaient partie du comité d'accueil de Susan Day. Leur principal travail étant d'assurer la sécurité. Susan viendrait avec son propre service de sécurité qui avait déjà reçu des menaces. Ralph se rappela que 10 ans auparavant, trois jeunes gens s'étaient emparés d'un homosexuel aussi discret qu'inoffensif, du nom d'Adrian Mellon et il l'avait jeté dans la rivière après l'avoir battu et frappé de plusieurs coups de couteau. Seul un fou pouvait ignorer la violence de Derry.

Gretchen précisa que le service de sécurité avait déjà reçu une trentaine de menaces. Alors Helen donna à Ralph une bombe de défense. Elle lui annonça qu'il avait été déclaré officiellement Centurion. C'est ainsi que les Amis de la Vie baptisaient leurs principaux ennemis. Ralph raconta ce que Deepneau lui avait dit le jour où il avait agressé sa femme. Il avait parlé des Centurions. Helen lui apprit que les laboratoires Hawking avaient licencié son mari. Ralph comprit que Gretchen avait une taupe chez les Amis de la Vie. Leur informateur pensait que Deepneau était celui qui faisait remuer la queue du groupe. La queue étant Dalton.

Ralph demanda si Deepneau avait parlé de l'incinérateur de Newport qu'il voyait comme un crématorium pour bébés. Gretchen était surprise que Ralph soit au courant de ça. Alors Ralph raconta l'incident qui s'était produit à l'aéroport en juillet 1992.

Ralph Lohr demanda ce que Deepneau allait chercher à faire. Gretchen n'en savait rien mais elle avait donné à Ralph un aérosol en guise de petite police d'assurance. Helen lui annonça que l'autre centurion de sexe masculin était le maire Cohen. Le maire avait un permis de port d'armes. Gretchen avait vérifié dans les archives de la municipalité. Gretchen en avait profité pour vérifier si Deepneau en avait un aussi mais ce n'était pas le cas. Helen demanda à Ralph s'il allait porter la bombe sur lui. Il répondit qu'il y penserait très sérieusement. Elle lui demanda s'il avait retrouvé le sommeil. Il ne cacha pas la vérité. Elle l'embrassa sur le coin de la bouche. Elle lui dit qu'il était le plus sensationnel centurion de sexe masculin qu'elle avait rencontré.

6

Ralph regarda aérosol sur lequel était dessinée une femme résistant héroïquement à l'attaque de son agresseur. Il songea que la folie de Deepneau devenait contagieuse. Il y avait donc des femmes à Derry qui se baladaient avec ces bombes lacrymogènes dans leur sac Ralph n'avait pas envie d'être dans ce coup la alors il posa un aérosol sur le dessus du placard. Il allait rendre visite au Derry des vieux croulants avec l'espoir de faire une partie d'échecs.

Chapitre 7.

1

Ralph avait acheté deux romans westerns dans ma librairie de livres d'occasion. Quelqu'un l'attendait devant chez lui. C'était Dorrance. Ralph était fatigué et n'avait qu'un désir, s'asseoir dans son fauteuil et boire un café. Dorrance tenait dans sa main un roman de Stephen Dobyns intitulé Cemetery Nights.

Ralph lui proposa de revenir une autre fois. Dorrance était venu simplement pour lui livrer un message. Le message était simplement : « annule le rendez-vous ». Ralph demanda de quel rendez-vous il s'agissait. Dorrance lui répondit qu'il n'aurait pas dû s'en mêler et qu'il était trop tard. Il fallait simplement que Ralph annule le rendez-vous pour que le type ne lui enfonce pas des aiguilles dans le corps. Ralph comprit que Dorrance parlait de Hong. Mais Dorrance n'en savait rien. Il se contentait de délivrer un message de temps en temps.

Ralph demanda qui lui avait confié ce message alors Dorrance lui donna son recueil de poésie. Ralph lui avoua ne pas être amateur de poésie mais Dorrance lui affirma que celles-ci lui plairaient.

Ralph insista alors Dorrance pourra le livre dans la main de Ralph et cita le début d'un des poèmes : « chaque chose que je fais, je la fais à la hâte, pour pouvoir faire autre chose… »

Puis Dorrance s'en alla. Ralph décida de ne pas lui courir après.

2

Une fois chez lui, Ralph regarda le calendrier mural. Il y avait un cercle autour du lundi suivant pour le rendez-vous avec l'acupuncteur. Il eut l'impression de prendre du recul par rapport à sa vie et de découvrir une route inconnue conduisant dans un tunnel sans lumière où n'importe quoi pouvait l'attendre. Quelque chose lui disait néanmoins de ne pas faire demi-tour. Ralph comprenait que les choses avaient commencé à devenir bizarres à cause de l'insomnie. Dorrance lui avait dit que c'était trop tard, maintenant. Alors Ralph décida qu'il valait mieux s'intéresser aux détails les uns après les autres, en commençant par le rendez-vous avec l'acupuncteur.

Il commença à lire le recueil de poésie. Dorrance avait raison. La plupart des poèmes racontaient une histoire qui plaisait à Ralph. Il voulut le montrer à Carolyn lorsqu'il se souvint qu'elle était morte depuis six mois alors il éclata en sanglots.

Il essaya de dormir, en vain. Alors il se prépare un café et regarda une partie de football à la télé.

3

La bibliothèque municipale ouvrait les dimanches après-midi et Ralph s’y rendit le lendemain de la visite de Dorrance. Il n'y avait personne. La salle de lecture était glaciale. Le foyer de la cheminée était vide. Le bibliothécaire de service ne s'était pas non plus donné la peine d'appuyer sur les interrupteurs qui allumaient les globes suspendus au plafond.

La pluie froide crépitait contre les vitres. Il découvrit un livre intéressant intitulé Les Types de rêves. Il en commença la lecture. Il apprit qu'en 1960, on avait découvert que la privation de tel ou tel stade particulier du sommeil conduisait à l'hypothèse de Dement, à savoir que la privation entraînait une désorganisation de la personnalité à l'état de veille. Mais Ralph continuait de rêver. Une main légère se posa sur l'épaule de Ralph, tirant de sa lecture avec un sursaut. C'était un homme qui menaça Ralph. Il l'accusait d'être un centurion impie. Il appuya un couteau contre le flanc gauche de Ralph.

4

L'homme qui menaçait Ralph était apparu dans divers reportages télévisés sur les différentes manifestations contre l'avortement. Ralph n’osait pas tourner la tête pour le regarder. Alors il lui dit qu'il ne comprenait pas pourquoi il voulait lui faire du mal et l'homme répondit que c'était parce qu'il était un salopard de centurion. Ralph lui répondit que ce devait être Deepneau qui lui avait raconté ça. L'homme lui ordonna de ne pas prononcer ce nom et de s'excuser. Ralph obéit mais l'homme le piqua avec son couteau. Alors Ralph se retourna et vit que l'homme était entouré d'une aura instable, vert et noir qui évoquait des feux follets, hérissée de pointes d'un noir absolu. Ralph fouilla dans sa poche droite. Il sentit un objet relativement gros qu'il n’identifia pas et ne se rappela pas y avoir placé. L'homme enfonça sa lame et Ralph sentit sa poitrine s'enflammer. Le vert de l’aura de l'homme trahissait sa confusion mentale et sa paranoïa ; le noir, quelque chose d'autre, de bien pire. Il ordonna à Ralph de ne pas crier et Ralph promit. Le sang coulait maintenant le long de son flanc. Ralph se dit qu'il n'aurait peut-être même pas annulé son rendez-vous avec l'acupuncteur.

Ralph sentit la bouteille aérosol que Gretchen lui avait donnée. Il ne comprenait pas comment la bombe était passée du dessus du placard à la poche de sa vieille veste. Il s'en empara et dit à l'homme que s'il promettait de ne pas le tuer il lui dirait quelque chose qu'il savait. Alors Ralph dégagea le petit aérosol de sa poche et dit qu'il ne savait qui était le roi pourpre. L'homme fut surpris et eut un léger mouvement de recul. Ralph se jeta sur sa droite il appuya sur l'aérosol au moment où l'homme plongeait sur lui avec son couteau. Le résultat fut instantané. L'homme poussa un hurlement de douleur et l'achat son couteau. Son aura passa du noir au rouge. L'homme poussa un hurlement et se laissa choir sur le sol ou il se mit à rouler dans tous les sens. À l''immense stupéfaction de Ralph, l'homme menaça de le poursuivre en justice.

Ralph lui répondit qu'il aurait d'abord à s'expliquer pour le couteau avant de pouvoir porter plainte. À ce moment-là, Mike Hanlon, le bibliothécaire, arriva. Il était accompagné de son assistant et de cinq curieux. Ralph se laissa tomber sur sa chaise. Mike demanda à Ralph ce qui s'était passé. L'assistant reconnut l'homme qui avait agressé à Ralph, c'était Charlie Pickering. Alors Mike appela les flics.

5

Leydecker confisqua la bombe aérosol de Ralph mais le policier lui dit qu'il n'aurait pas d'ennuis car il avait agi en légitime défense. Un infirmier prodiguait des soins à Ralph. Le jeune technicien des urgences avait pris des photos de Ralph avant de le soigner. Hanlon confirma à Ralph que Charlie était membre à part entière d'une association anti IVG nommée Notre Pain Quotidien. Il avait fait mettre le feu au WomanCare. On l'avait placé dans un hôpital psychiatrique pendant six mois. Leydecker demanda à Ralph s'il se sentait assez bien pour venir faire sa déposition au commissariat. Mais Ralph alla vomir aux toilettes. Alors le détective tire accompagner Ralph chez lui. Ralph remercia Mike d'avoir engagé Helen.

6

Leydecker demanda à Ralph si le gâteau Daniel avait été efficace contre ses insomnies. Et Ralph mentit en disant que ça l'avait été.

7

Ralph demanda à Leydecker s'il y avait des chances de prouver que Deepneau était le complice de Pickering parce qu'il était persuadé que c'était Deepneau qui l'avait poussé à l'agressé. Leydecker pensait que ce serait difficile. Pickering devait être d'une loyauté à toute épreuve vis-à-vis des gens qu'il considérait comme des amis.

Leydecker pensait qu’un maboul comme Pickering était un instrument parfait entre les mains d'un type commun Deepneau. Le policier fut surpris de constater que Ralph possédait une vieille voiture. Il ne comprenait pas pourquoi il ne l'utilisait pas. Alors Ralph lui expliqua que pendant les 15 dernières années de sa vie professionnelle il avait piloté un bureau mais avant il avait été vendeur. Pendant 25 ans il avait parcouru dans les 1200 km par semaine. L'envie de conduire lui avait passé depuis longtemps. Depuis la mort de sa femme, il n'avait guère eu de raisons de prendre le volant. De plus, ses réflexes et sa vue n'étaient plus ce qu'ils avaient été et il avait bien failli renverser un gamin, un an auparavant. Mais il n'éprouva pas le besoin de le confier au policier. Leydecker lui dit qu'il n'était pas quelqu'un d'ordinaire car des types ayant 40 ans de moins que lui auraient terminé l'aventure à l'hôpital ou à la morgue. Ralph lui répondit que son ange gardien avait dû faire des heures sup. Leydecker pensait que Deepneau était du genre autodestructeur car il avait déjà perdu sa femme, son emploi et il était en train de perdre ses partisans les plus modérés.

Le détective pensait que Deepneau allait peut-être essayer de faire du mal à Susan Day. Ralph y avait pensé.

8

Ralph vérifia le dessus du placard. Il s'attendait à y trouver une autre bouteille aérosol désigne aérien. Il vida les poches de sa veste de cuir et trouva un morceau de papier sur lequel était écrit la citation : chaque chose que je fais, je la fais à la hâte. Alors, Ralph se dit que Dorrance avait dû rentrer chez lui et avait mis la bombe aérosol dans la poche droite de la vieille veste de cuir en plus de sa carte de visite, sous la forme d'un fragment de poème. Puis au lieu de remettre la vieille veste de cuir où l'avait trouvée il l'avait accrochée correctement au portemanteau. Cela fait, il était redescendu attendre sur le porche. Dorrance avait su que Ralph allait avoir besoin de l'aérosol et il savait où le trouver et où le mettre.

Ralph ressentit de nouveau cette impression d'être poussé par des mains invisibles vers la gueule d'un tunnel ténébreux. Alors il voulut annuler le rendez-vous avec l'acupuncteur. Mais il tomba sur le répondeur. Il laissa un message.

Chapitre 8.

1

Ralph fit un mauvais rêve. Il se trouvait sur une plage totalement vide, à l'exception d'un objet rond de la taille d'un ballon de basket. Il avait parcouru la moitié de la distance qui le séparait de l'objet. Ce n'était pas un ballon de basket mais une tête humaine. On avait enterré un être humain jusqu'au cou dans le sable et la marée montait. Il se mit à courir et une vague vint effleurer la tête qui se mit à crier. C'était la voix de Carolyn. Carolyn respirait à petits coups rapides et effrayés et chaque expiration expulsait des jets d'une aura grils noir par ses narines. Une substance luisante coula de ses lèvres. Ralph cria qu'il allait la sauver. Il se mit à creuser le sable autour d'elle. Il se rendit compte que Rosalie, la chienne matinale de Harris avenue était assise à côté de sa femme qui hurlait. Une aura noir crasseuse entourait également la chienne. Elle tenait le panama disparu de McGovern entre ses pattes.

Carolyn lui criait de ne pas s'occuper d'elle car elle était morte et de guetter les empreintes de l'homme blanc. Une vague recouvrit la tête de Carolyn et lui enleva tous ses cheveux. Ralph creusa encore plus vite. Une autre vague recouvrit la tête de Carolyn qui explosa. Une horde de bestioles noires se déversa de son crâne.

2

Ralph se réveilla. Il se trouvait de nouveau dans l'univers de la réalité. Ralph pensait que c'était les pilules analgésiques qui avaient provoqué son cauchemar. Il regarda la pendulette à côté de la lampe : 1:48. Il se sentait parfaitement réveillé. Il regarda par la fenêtre et vit deux petits hommes chauves habillés d'une blouse blanche en train de discuter. Il crut que c'était un rêve mais ce n'en était pas un.

3

Ralph regarda ce qu’ il y avait dans un placard et trouva des objets qui lui faisaient bien plus mal que la blessure sous son bras car ils lui rappelaient Carolyn. Il trouva ce qu'il avait cherché : des jumelles. Sa blessure se rouvrit et saigna. Il se rappela que Deepneau lui avait parlé de docteurs. Lorsqu'il atteignit la fenêtre, Ralph constata que les étrangers se trouvaient toujours là. Ralph utilisa ses jumelles. Il voulait être sûr de pouvoir identifier les deux hommes si jamais il était appelé à le faire. Il avait éprouvé le besoin de dissiper l'impression dérangeante qu'il était en train de vivre une rencontre du troisième type. Les petits docteurs chauves ne semblaient pas posséder de traits. Ils ressemblaient à des mannequins dans un magasin de vêtements. Ralph remarqua la perfection de leur peau surnaturellement lisse.

Ralph avait l'impression qu'ils ressemblaient à des esquisses exécutées à la hâte. Ils étaient immergés dans une aura resplendissante qui donnait l'impression d'être d'un vert mordoré et grouillait de minuscules éclats rouge orange comme des étincelles tourbillonnant au-dessus d'un feu de camp. Ces auras dégageaient un sentiment de puissance en totale contradiction avec les visages dépourvus de traits comme d'intérêt. Ralph remarqua qu'il n'y avait pas de panache s'élevant au-dessus de leur tête sans cheveux. Un des deux hommes portait une paire de ciseaux aux longues lames.

4

Ralph contrôla sa panique. Le besoin de crier commença à passer. Il savait qu'il n'avait pas arrivé. Deepneau avait vu l'un de ces hommes, lui aussi. Si ça continuait, après les couleurs et les petits docteurs chauves, Ralph allait rencontrer le Roi Pourpre. Les deux petits hommes venaient de sortir de chez May Locher. Ralph appela la police.

5

Ralph dit à la police qu'il avait vue deux hommes sortirent de la maison de May Locher. L'un d'eux tenant une paire de ciseaux. Il raccrocha avant d'avoir donné son nom. Ralph vit Rosalie s'approcher de la maison de May Locher. Il s'empara de ses jumelles pour regarder. La chienne reniflait des empreintes. Elle venait de lui donner la preuve irréfutable qu'il avait bien vu ce qu'il pensait avoir vu. La chienne suivait les traces laissées par les deux docteurs chauves. Ralph pensa que la chienne suivait les empreintes de l'homme blanc dont lui avait parlé Carolyn dans son rêve.

Ralph avait découvert un certain nombre de choses étranges et intéressantes depuis qu'il se réveillait de plus en plus prématurément, et l'une d'elles était que la capacité de l'être humain à s'illusionner atteignait son niveau le plus élevé entre 3:00 et 6:00 du matin. La chienne s'en alla quand la police arrive. Deux policiers en tenue descendirent et s'approchèrent de l'allée qui conduisait à la maison de May Locher. Ils n'eurent pas conscience de marcher sur des empreintes d'un vert mordoré. Ralph reconnut le policier qui l'avait accompagnée Leydecker le jour de l'arrestation de Deepneau. Chris Nell. Ou Jess Nell. Les policiers discutèrent puis l'arme à la main, ils escaladèrent un escalier qui menait au perron. Ils sonnèrent mais personne ne répondait. Une image effrayante emplit soudainement l'esprit de Ralph. Il vit une femme gisant dans un lit, la gorge tranchée. Il y avait le cadavre d'une autre femme, l'assistante.

Ralph vit une autre voiture arriver et un homme en civil en descendit. Il discuta avec les policiers. Une autre voiture de police arriva et deux autres flics en descendirent. Ils avaient amené un appareil pour ouvrir la porte de la maison de May Locher. Les voisins de May Locher sortirent de chez eux pour assister au spectacle. Une ambulance arriva. Le détective agacé par le comportement des policiers avec leur machine secoua négativement la tête, escalada les marches et enfonça la porte de May Locher. Le détective réapparu sur le perron et fit signe aux ambulanciers. Les brancardiers se dirigèrent vers la maison sans courir. Ralph comprit que May Locher était morte.

6

Ralph vit que tous les voisins de May Locher étaient venus voir ce qu'il se passait. Ralph resta longtemps prostré, regrettant d'avoir eu une telle vision, pris de l'espoir aveugle que si le tunnel existait vraiment, on exigeât pas de lui qu'il y entrât. Pour la première fois de sa vie, il souhaita être mort.

Chapitre 9.

1

Ralph alla voir Leydecker. Il y avait dans son bureau une affiche du film Dumbo l'éléphant avec la place de la tête de l'animal, le visage de Susan Day.

Comme Ralph trouvait cela de mauvais goût, Leydecker enleva la photo de Susan de l'affiche. Ce n'était pas son idée mais celle de ses collègues qui avaient organisé un pot en son honneur et lui avait offert des cadeaux d'un goût douteux dont cette affiche. Ses collègues avaient décidé de célébrer sa nomination pour une mission spéciale. Ralph aperçu de fugitives étincelles d'une aura bleue autour du visage et des épaules de Leydecker. Ralph devina que la mission spéciale était la protection de Susan Day. La police d'État serait présente avant tout pour les questions de circulation. Leydecker pourrait choisir quatre hommes pour l'accompagner dans sa mission. Leydecker avoua qu'il détestait Susan Day et qu'il était catholique. Ce n'était pas la religion qui le poussait à détester Susan Day mais le fait que selon lui elle mettait de l'huile sur le feu. Il était persuadé que Susan Day ne mesurait pas les conséquences de l'événement. Les partisans de l'avortement avaient demandé à Susan Day de venir faire un discours à Derry afin de se constituer un trésor de guerre destiné à combattre les conseillers municipaux les plus conservateurs qui voulaient fermer le planning familial. Mais il Leydecker expliqua à Ralph que les conseillers municipaux n'avaient aucune chance de faire modifier le plan d'occupation des sols et les gens de WomanCare le savaient.

Leydecker pensait que les pros IVG voulaient mettre un terme à la discussion et que leurs opposants admettent leur tort. Leydecker soutenait le droit qu'avait une femme de se faire avorter mais il ne supportait pas l'attitude des pros IVG consistant à dire qu'ils avaient forcément raison.

Il les voyait comme des nouveaux puritains voyant ceux qui ne pensaient pas comme eux comme des gens qui iraient en enfer. Leydecker pensait que ce qui était en question était de savoir quelle équipe était la meilleure. De savoir qui avait raison. Ralph remarqua des étincelles verdâtres dans l'aura de Leydecker. Il comprit que le policier avait peur. Leydecker reconnut avoir la frousse que quelque chose arrive à Susan Day ou qu'une confrontation oppose les pros et les anti IVG. Ralph avait envie de demander des nouvelles de May Locher et cela aurait paru suspect alors il demanda d'abord des nouvelles de Pickering. Leydecker lui répondit que son agresseur serait probablement jugé pour tentative d'homicide. L'essentiel était que Pickering resterait incarcéré. Leydecker pensait que Deepneau avait utilisé Pickering pour se débarrasser de Ralph. Ralph remercia Leydecker d'avoir fait en sorte que son nom n'apparaisse pas dans le journal. L'incident avait été mentionné comme la simple arrestation de Pickering pour port d'armes dans l'enceinte de la bibliothèque municipale. Ralph se prit la fiche de Dumbo que Leydecker avait mise dans la corbeille. Il avait l'intention de l'offrir à Natalie quand elle serait plus grande. Avant de partir, il demanda au policier ce qui était arrivé à May Locher. Il observa l'aura du policier et fut rassuré car celle-ci ne montrait aucun signe de soupçon. Leydecker accepta de lui dire la vérité à condition qu'il ne la répète pas. Le policier lui expliqua qu'après 3:00 du matin, il y avait eu un appel anonyme pour signaler la présence de deux hommes armés de ciseaux. Mais May Locher n'avait pas été tuée avec des ciseaux. Leydecker avait soupçonné que Ralph était l'auteur de l'appel anonyme mais son collègue policier avait dit que l'homme qui avait appelé avait une voix jeune. Leydecker raconta comment les policiers avaient découvert le corps. May Locher était morte dans son lit mais elle n'avait aucune trace de violence. Le plus intéressant était que la porte d'entrée était verrouillée de l'intérieur. Les fenêtres étaient également fermées. Les médecins avaient conclu à une crise cardiaque. Mais la maison avait été placée sous scellés et le corps de May serait autopsié.

Leydecker envisageait d'écouter l'enregistrement de l'appel anonyme. Il proposa à Ralph de l'écouter avec lui. Ralph répondit avec un sourire embarrassé.

2

Cette nuit-là, la Ralph se réveilla à 1:42. Ralph songea qu'il vaudrait mieux être mort. Il trouvait que le plus délirant était les gens qui n'arrêtaient pas de lui dire qu'il avait l'air en pleine forme. Il passa la nuit à se demander s'il avait bien vu les deux docteurs chauves sortir de chez May Locher. Il avait envie de parler de cette histoire à quelqu'un avant de devenir fou. Il avait intérêt à le faire avant que Leydecker écoute l'enregistrement de l'appel anonyme et ne vienne lui demander des explications. Il avait l'intention d'en parler à Bill car il le connaissait depuis plus de 20 ans il l'avait soutenu pendant l'enterrement de Carolyn.

Chapitre 10.

1

Le lendemain matin, il faisait beau et Ralph estima que ce serait de la folie que de ne pas en profiter. Il se rendit jusqu'à l'aire de pique-nique sans s'avouer nettement qu'il espérait tomber sur le vieux Dorrance. Mais il ne trouva que Don Veazie qui lui parla de Bill Clinton en mauvais termes. Ralph avait voté pour Clinton.

2

Le monde secret des auras étaient devenus de nouveau visible devant la maison de May Locher. Le ciel était au-delà de toute couleur, une explosion bleue supersonique. Ralph en avait le souffle coupé. Alors il ferma les yeux et en les rouvrant la seule différence était une inversion des couleurs. Mme Perrine demanda à Ralph de faire attention et d'un seul coup la débauche de couleurs et de sensations s'évanouit. Elle lui demanda s'il était ivre. Il affirma qu'il était aussi sobre qu'un juge. Voyant qu'il avait un trou à sa chemise, elle lui proposa de passer chez elle pour la raccommoder.

3

Revenu chez lui, Ralph prit brusquement la décision de ne pas tout dire à Bill. En particulier, se garderait bien de lui expliquer à quel point les deux bonshommes qu'il avait vus sortir de la maison de May Locher ressemblaient aux extraterrestres des journaux à scandale. Bill lui parla de Bob qui venait d'être hospitalisé.

Ralph éprouva le besoin de se confier à son ami. L'attention silencieuse que Bill lui accorda le soulagea beaucoup. Il commença son histoire en évoquant l'incident entre Deepneau et le gros balèze. Il parla des propos étranges que Deepneau lui avait tenus et des auras qu'il avait vues. Il lui parla de l'apparition magique de la bombe lacrymogène dans sa poche en lui expliquant que Dorrance était probablement à l'origine de ce tour de prestidigitation. Bill lui demanda quelles étaient les éléments de cette histoire qu'il avait racontés à Leydecker. Ralph avoua qu'il n'avait presque rien rapporté au policier. Puis Ralph raconta comment il s'était réveillé dans la nuit et avait vu deux hommes sortirent de la maison de May Locher. Mais il ne lui raconta pas le cauchemar de Carolyn pour ne pas ternir sa crédibilité. Il avoua avoir appelé anonymement la police. Bill resta quelques instants sans réagir. Bill et lui demanda de quoi avait l'air les deux hommes. Ralph répondit qu'ils avaient des figures difficiles à distinguer. Bill demanda s'il pouvait s'agir de Deepneau et de Pickering et Ralph répondit que non. Bill appela Larry Perrault, le frère de May Locher. Bill pensait que si quelque chose d'anormal avait été trouvé après l'autopsie de May, son frère aurait été mis au courant. Bill avait compris ce qui retenait éveillé son ami. Il voulait lui venir en aide. En attendant le retour de son ami, Ralph regarda la rue. Il observait une petite fille qui sautait à la corde la fillette leva les yeux et Ralph Hewitt il ne s'agissait nullement d'une petite fille. C'était un homme d'une taille approximative d'un mètre 20. L'homme avait un regard diabolique. On aurait pu croire que le gnome venait de lire dans les pensées de Ralph. Ralph remarqua quelque chose qui le remplit d'horreur. Le petit homme portait le panama disparu de Bill.

4

Le petit homme en leva son chapeau. Il était chauve. Il pointa son doigt vers Ralph. Puis après avoir enfoncé son chapeau sur la tête, le petit homme s'engouffra à toute allure dans une rue.

Bill revint mais Ralph ne lui raconta pas ce qu'il venait de voir. Il ne voulait pas que son ami le prenne pour un fou.

Billet lui raconta ce qu'il venait d'apprendre. Le détective responsable de l'affaire avait appelé Larry pour lui dire que les conclusions de l'autopsie attribuaient le décès à des causes parfaitement naturelles. Mais les policiers avaient pris l'appel anonyme au sérieux. Malgré les portes fermées de l'intérieur et l'absence de la moindre trace de vol. Les policiers avaient envisagé la mort de May sous l'angle d'une intrusion de cambrioleurs qui auraient provoqué une crise cardiaque. Mais le médecin légiste avait conclu que May était morte dans son sommeil. Bill conseilla à Ralph d'aller voire Litchfield. Bill pensait que Ralph s'était endormi et avait rêvé des deux types chauves. Mais Ralph répliqua que ses jumelles étaient encore posées sur la petite table du séjour, à côté de son fauteuil. Bill expliqua que Ralph devait être somnambule. Bill pensait que ces histoires d'auras provenaient des insomnies de Ralph. Il s'était écoulé 45 minutes durant l'appel de Bill à Larry. Ralph pensait qu'il s'était écoulé que cinq minutes. Bill l'avait remarqué penser que Ralph avait encore somnolé. Bill voulut expliquer à son ami que la vision de deux hommes dont l'un portait des ciseaux pouvait s'expliquer par la peur d'aller voir l'acupuncteur et par le fait que Ralph avait été attaqué au couteau par Pickering. Bill était inquiet pour son ami. Il lui dit qu'il ressemblait de plus en plus à Deepneau. Il voulut savoir si Ralph avait fait d'autres cauchemars mais Ralph ne voulait pas lui parler d'un cauchemar qu'il avait fait avec Carolyn. Ralph demanda à son ami croyait que le fait que May Locher soit morte la même nuit ou il avait vu deux hommes sortirent de chez elle soit une coïncidence. Bill pensait que c'était dû à l'état physique et mental de Ralph qui avait créé les conditions favorables à un événement psychique. Ralph était en colère. Il s'en alla et Bill le rattrapa. Il voulait le convaincre d'aller voir son médecin. Les gens dans la rue les observaient, interloqués. Ralph allongea le pas et prit la direction de l'aéroport sans même y réfléchir. Il imaginait que toutes les vieilles personnes dans la ville redevenaient des enfants jouant au jeu des chaises musicales dirigé par McGovern. Celui qui ne trouvait pas une chaise, mourait. Ralph se dit que l’on avait finalement poussé dans le tunnel, et l'obscurité régnait tout autour de lui.

Deuxième partie : la cité secrète.

Chapitre 11.

1

Ralph avait grandi dans le quartier de Mary Mead. Il avait découvert qu'en plus du Derry dévolu aux adultes, il y en avait un qui n'appartenait strictement qu'aux enfants : la zone près du dépôt des chemins de fer ; l'allée derrière le cinéma Aladdin ; le vieil orme immense qui surplombait la rivière ; la centaine de pistes tortueuses s'entrecroisant dans les Friches-Mortes. Ces rues secrètes se déployaient bien en dessous du champ visuel des adultes qui les ignoraient. Il y avait des exceptions comme le flic Aloysius Nell. Ralph pensait que le collègue de Leydecker devait être le petit-fils d’Aloysius Nell. Ralph avait pris conscience de l'existence d'une seconde ville secrète-celle qui appartenait aux vieux-à l'époque où il avait pris sa retraite. Il avait fallu la disparition de Carolyn pour qu'il se rendît compte qu'il en était lui-même citoyen. Le Derry des Vieux Croulants se superposait à une troisième ville secrète : le Derry des Damnés, celui des ivrognes et des cinglés qu'on ne pouvait garder enfermés.

C'est dans l'aire de pique-nique que Lafayette Chapin avait initié Ralph à l'une des plus importantes considérations qu'on puisse faire sur sa vie une fois que l'on était devenu un vieux croulants. Lafayette lui avait dit que dans sa vie réelle, il était charpentier. Mais cela faisait 10 ans que c'était terminé. Comme si la retraite était un baiser de vampire qui entraînait ceux qui survivaient dans le monde de morts-vivants.

2

Ralph s'engagea dans l'aire de pique-nique. Bill était toujours derrière lui mais à une distance respectueuse. Des vieux croulants étaient en train de jouer aux cartes ou aux échecs. Mais c'était un prétexte. Les gens venaient en réalité ici pour affirmer concrètement qu’ils menaient encore une certaine forme d'existence réelle. Ralph s'assit sur un banc et regarda les avions atterrir. Il entendit les conversations. On parlait de May Locher. La plupart des conversations tournaient autour de la venue imminente de Susan Day. Les avis étaient divergents concernant l'IVG. Ralph fut surpris par l'arrivée de Dorrance. Lafayette ne comprenait pas pourquoi le vieux Pedersen tolérait la masturbation mais pas l'IVG. Ils étaient prêts à se battre. Ralph n'en croyait pas ses yeux. Derry n'était pas une ville comme les autres. Ralph et Stan Eberly les empêchèrent de se battre.

3

Lafayette était surpris par le comportement de Pedersen. Pedersen venait de lui expliquer pourquoi il était contre l'IVG. Sa femme était morte à la naissance de leur seconde fille. Ralph regarda Dorrance qui se tenait debout dans l'herbe en bordure de la route. Ralph se mit à repenser à Deepneau et se demanda ce que celui-ci avait bien pu faire sur le terrain d'aviation avant l'incident avec le gros balèze. Ralph prit la direction d'Extension et Lafayette lui emboîta le pas. Faye n'en revenait toujours pas d'avoir vu Pedersen pleurer. Il remercia Ralph d'avoir su l'arrêter avant que cela ne tourne mal. Faye demanda à Ralph s'il était toujours d'accord pour le tournoi d'échecs qu'il organisait depuis 1984 et qu'il avait déjà gagné six fois sur neuf. Ralph le soupçonnait d'avoir fait exprès de perdre les trois autres fois pour que la compétition conserve de son intérêt pour les autres. Ralph accepta de participer.

Lafayette apprit à Ralph que Jimmy Vandermeer souffrait d'un cancer. Ralph ressentit un chagrin intense car il avait bien connu Jimmy au cours de leur « vie réelle ». Ils avaient été tous les deux voyageurs de commerce. Ils avaient fait équipe dans leur tournée de Nouvelle-Angleterre. Ralph avait trouvé en lui un bon compagnon. Puis Ralph avait obtenu un poste sédentaire à l'imprimerie et perdu contact avec Jimmy. C'était seulement dans le Derry des vieux croulants qu'il avait renoué avec lui. Ralph demanda le numéro de la chambre d'hôpital de Jimmy à Lafayette. Ralph demanda à Lafayette s'il savait pourquoi Deepneau possédait une carte magnétique permettant d'ouvrir le portail de l'aéroport. Lafayette lui montra un bâtiment préfabriqué qui était une école de pilotage.

4

Ralph pensa à Deepneau. Il aurait voulu savoir où il habitait à l'heure actuelle et si c'était pour l'école de pilotage que Deepneau s'était trouvé sur le périmètre de l'aéroport le jour ou il avait percuté le gros balèze. Il retourna à Harris avenue et croisa la chienne. Elle aboyait alors que personne ne passait en ce moment sur le trottoir. Elle paraissait mortellement terrorisée. Ralph pensait qu'elle voyait les auras. Jusqu'ici, le phénomène s'était toujours produit de lui-même. Ralph se demanda s'il ne pouvait pas le provoquer. Il sentit alors quelque chose se déclenchait dans sa tête puis l'éclat de la lumière envahit tout. Il venait de trouver le chemin de ce monde plus vif. Il vit une membrane trouble se matérialiser autour de Rosalie et un panache gris sombre s'élever de sa tête. Le panache ne sortait pas de la tête de la chienne mais de sa truffe. Ralph comprit que les âmes des chiens ne résidaient pas au même endroit que celle des hommes. Ralph entendit une voix qui lui faisait mal aux oreilles. C'était le docteur chauve numéro trois qui se tenait entre la laverie et la maison voisine. Il portait sa blouse blanche et son jean de nain. Il portait toujours le panama de Bill. Il souriait férocement à la chienne et Ralph découvrit une double rangée de dents blanches et pointues. Il semblait porter un scalpel ou un rasoir. Il siffla et Rosalie se recroquevilla puis hurla. Rosalie, la queue entre les jambes, commença à ramper vers la rue. Ralph se mit à crier et le nain brandit son arme avec une expression de surprise sur le visage. Il n'avait pas l'habitude d'être vu par les semblables de Ralph et encore moins d'être défié par eux. Ralph lui ordonna de laisser la chaîne tranquille. Le son de sa voix lui avait paru lointain. La créature chauve eut un mouvement de recul comme pour se défendre. Il brandit son scalpel et se tourna vers la chienne. Rosalie adressa à Ralph un regard suppliant et commença à traverser la rue. Elle se plaça derrière la jambe droite de Ralph et leva ses yeux vers lui. Le docteur chauve afficha une grimace de haine. Ralph leva brusquement la main à hauteur de l'épaule comme s'il s'apprêtait à donner un coup de karaté. Ils vit un rayon serré de lumière bleue jaillir du bout de ses doigts et foncer en travers de la rue comme un javelot. Doc chauve se baissa juste à temps. Le nain chauve serra les poings. Puis il prit le bord du panama dans sa bouche et en arracha un morceau d'un coup de dents. Après quoi, il traite à Ralph de bouffeur de cons et l'invita à baiser sa mère. Ralph se rappela qu'il avait déjà entendu quelqu'un s'exprimer de manière aussi charmante : Deepneau, à l'extérieur de l'aéroport, pendant l'été 1992. Il en fut terrifié. Dans quel guêpier s'était-il fourré ?

5

Ralph leva de nouveaux saints ouverte à hauteur de la tempe mais il était presque certain qu'il n'en rejaillirait aucun javelot de lumière bleue, cette fois. Le doc ne savait pas qu'on le menaçait d'une arme déchargée alors il recula. Il fit brusquement demi-tour et courut dans l'allée. Avec lui s'évanouit aussi l'illumination générale. Ralph était soulagé d'avoir arraché Rosalie aux griffes de ce monstre. Rosalie se traînait dans le parc, la tête basse. Ralph s'élança à ses trousses. Il dut s'arrêter à cause de l'épuisement. Il vit Lois assise sur un banc qui sanglotait.

Chapitre 12.

1

Quand Lois entendit Ralph lui demander ce qu'elle avait, elle se cacha le visage. Elle lui demanda de s'en aller. Ralph éprouva un sentiment de honte à l'idée de l'avoir surprise avec son rimmel qui coulait. En temps normal, il aurait accepté de s'en aller mais les circonstances n'étaient pas ordinaires car il était encore sous l'effet de cette étrange légèreté et il avait en horreur de voir Lois assise toute seule ici à pleurer. Il s'assit à côté d'elle. Il lui passa un bras autour de ses épaules et elle se laissa faire. Elle lui dit qu'elle s'était maquillée spécialement pour son fils et sa belle-fille qui étaient venus la voir. Elle se remit à pleurer alors Ralph tira un mouchoir de sa poche et le donna à Lois. Lois avaient l'air d'un vieux clown triste et Ralph éprouva une bouffée de fureur brûlante pour celui ou ceux qui avaient provoqué ce changement. Elle se tourna vers lui et lui demanda de quoi elle avait l'air. Il embrassa sa joue mouillée et lui dit qu'elle était charmante. Elle lui dit qu'elle était contente que ce soit lui et pas Bill qui était passé. Elle serait morte de honte si Bill l'avait vue pleurer en public.

Lois avait appris Ralph s'était disputé avec Bill. Elle lui demanda à propos de quoi. Ralph mentit en disant que c'était à cause des échecs. Elle lui avoua qu'elle aussi était insomniaque. Chaque nuit à se réveiller un peu plus tôt. Ralph lui demanda quand cela avait commencé. Elle répondit que cela faisait un mois ou deux avant la disparition de Carolyn. Elle ne dormait plus qu’une heure par nuit depuis le début du mois d'octobre. Il lui demanda comment cela se faisait-il qu'il ne voyait jamais la lumière allumée chez elle. Elle répondit qu'elle n'avait pas besoin d'éclairage pour trouver son chemin. Mais elle ne voulait pas que quelqu'un s'aperçoive qu'elle ne dormait pas. Elle avait souvent vu Ralph éveillé dans son séjour la nuit car il y avait un lampadaire en face de chez lui. Alors il lui demanda combien de fois elle l'avait surpris installé dans son fauteuil à se fourrer les doigts dans le nez ou à se tripoter l'entrejambe. Mais elle répondit qu'elle avait toujours trouvé parfaitement correct. Il lui demanda s'il y avait une autre raison à sa crise de larmes. Elle répondit qu'il y avait des choses pires que l'insomnie comme la trahison.

2

Lois avait le même médecin que Ralph. Elle avait décidé de ne plus le voir. Elle demanda à Ralph s'il était allé voire Litchfield. Il répondit que non. Lois savait que Ralph lui en voulait car il avait loupé le coche pour Carolyn. Ralph était surpris par cette remarque. Alors elle lui dit que cela avait traversé l'esprit de tout le monde. Elle lui apprit que Bill n'arrivait pas à comprendre pourquoi il n'avait pas traîné le médecin en justice. Ralph se mit à penser à Litchfield et à l'acupuncteur. Le poème « Poursuite » que Dorrance avait cité, lui revenait à l'esprit. Loi lui raconta son entrevue avec Litchfield. Quand elle ne pouvait plus supporter son insomnie, elle était allée consulter Litchfield et lui avait tout raconté. Elle pensait qu'il allait lui prescrire des somnifères mais il lui avait répondu que comme elle faisait un peu de tachycardie, les somnifères pouvaient être dangereux. C'était il y a une semaine. Puis son fils et sa belle-fille avaient voulu l'invité à déjeuner. Mais elle avait voulu les inviter à déjeuner chez elle. Ce si son fils voulait l'emmener faire un tour. Il n'avait qu'à l'emmener au centre commercial. Pas un instant, elle ne s'était demandé pour quelle raison son fils et sa belle-fille voulaient absolument venir la voir tous les deux un jours de semaine. Elle avait passé la nuit à mitonner quelque chose de bon. Mais sa belle-fille savait exactement la vérité. Et son fils aussi. Parce que Litchfield le leur avait dit. Ralph en resta interloqué car la relation entre le médecin et son patient est sous le sceau du secret. Le fils avocat de Lois devait parfaitement le savoir. Elle pensait que dans l'esprit de Litchfield, les vieux n'avaient aucun droit au secret médical vis-à-vis de leurs enfants. Dans l'heure intérêt, bien entendu. Dans la minute qui avait suivi la sortie de Lois du cabinet de Litchfield, le médecin téléphone à son fils pour lui dire qu'elle souffrait d'insomnies ce qui signifiait un déclin prématuré des fonctions cognitives. Harrold lui avait tout répété. Depuis la mort de Carolyn, Ralph avait pris conscience que la naïveté avec laquelle il avait considéré le monde jusqu'à l'âge de 20 ans ne l'avait pas quitté lorsqu'il avait atteint l'âge adulte. Cette innocence particulière paraissait lui revenir alors qu'il venait de franchir le seuil qui sépare l'âge adulte du grand âge. Les choses n'arrêtaient pas de le surprendre. Lois raconta à Ralph que son fils voulait la placer dans une maison de retraite. Son fils lui avait expliqué que c'était un projet d'habitation pour citoyens du troisième âge souhaitant vivre en communauté. Elle lui avait répondu qu'il pouvait toujours foutre une tarte aux pommes de chez McDonald's sur un plateau d'argent massif et dire que c'était une pâtisserie française, ça resterait toujours une foutue tarte de chez McDo. Son fils avait commencé à bégayer et à devenir tout rouge tandis que sa belle-fille s'était contentée de son petit sourire avec la bouche en cul de poule.

Sa belle-fille lui avait dit qu'elle pouvait toujours regarder la brochure parce qu'ils avaient fait tout ce chemin pour venir la voir. Alors Lois avait accepté de regarder la brochure. C'était une maison de retraite avec une équipe médicale où les pensionnaires étaient constamment surveillés. Ils n'avaient pas le droit de décider ce qu'ils pouvaient manger. Ralph trouva cette perspective d'un sinistre quasi insupportable.

Loi ajouta qu'il y avait un système pneumatique qui livrait les pilules quotidiennes directement dans la cuisine. Il y avait une sortie obligatoire dans un bus deux fois par semaine. Les photos de la brochure avaient glacé le sang de Lois. On y voyait des vieilles en train de jouer à la canasta et des vieux jouant au lancer du fer à cheval. La mère de lois était morte à 92 ans et son père avait vécu jusqu'à 86 ans. Lois n'avait pas envie de passer 12 ans dans un endroit où on l'appellerait à la salle à manger par haut-parleur. Après avoir regardé la brochure, elle avait dit à sa belle-fille que c'était très intéressant et l’avait remerciée. Quand son fils lui demanda de mettre son manteau, elle crut qu'ils avaient déjà réservé une place pour elle dans la maison de retraite. Alors elle refusa de sortir. Elle prétendit qu'elle avait beaucoup à faire et sa belle-fille se moqua d'elle et son fils rétorqua qu'elle n'allait tout de même pas les renvoyer en ville les mains vides alors qu'ils étaient venus de loin pour elle. Elle rétorqua qu'elle n'avait pas l'intention d'habiter dans ce truc même s'ils étaient venus de l'autre bout de la planète. Au lieu de se démonter, sa belle-fille insista en prétextant qu'ils voulaient simplement qu'elle vienne voir. Il s'avéra qu'ils avaient déjà un rendez-vous de prévu pour 11:00 du matin et qu'un type les attendait pour faire la visite des lieux et sortir à Lois son baratin. Elle avait été blessée par la façon désinvolte dont ils l’avaient traitée. Il était très clair que sa belle-fille avait beaucoup mieux à faire que gaspiller son temps à venir à Derry voir sa vieille toupie de belle-mère. Janet lui ordonna d'enfiler son manteau. Elle répliqua qu'elle n'irait nulle part. À ce moment-là, Janet avait demandé à son mari s'il avait l'intention de parler de ce que le docteur avait dit. Finalement, ils s’y étaient mis à deux. Cela avait rendu Lois furieuse et elle avait demandé à son fils s'il la croyait sénile.

Il avait répondu qu'il n'avait jamais rien pensé de pareil mais voulait prendre soin de sa sécurité comme elle prenait soin de la sienne quand il était petit. Janet avait dit que si Lois ne voulait pas respecter son engagement pour le rendez-vous, il n'y avait plus rien à dire. Loi ne répondit qu'elle respectait les engagements qu'elle prenait elle-même et se fichait de ceux que l'on prenait à sa place. Son fils continuait d'affirmer qu'il se faisait du souci pour sa mère parce qu'elle vivait seule. Il prétendait que sa femme voulait simplement se montrer bonne fille. Alors Lois lui répondit que faire des coups en douce dans le dos des gens n'était pas le meilleur moyen d'exprimer son inquiétude et son amour. Elle lui demanda pourquoi il n'avait pas raccroché quand Litchfield avait appelé quand il avait compris de quoi il s'agissait. Janet voulut la piéger en lui demandant où elle avait mis ses boucles d'oreilles en diamants. Lois avaient répondu qu’elles étaient sur la commode. Mais les boucles d'oreilles n'étaient pas à leur place. Janet avait affiché un sourire mielleux. Ralph regarda Lois en pensant que c'était sa Lois sacrée et à cet instant précis ses mains et celles de Lois entrelacées se nimbèrent d'un ravissant bleu. Les auras étaient revenues

3

Ralph dit à Lois qu'elle aurait dû mettre son fils et sa belle-fille à la porte de l'instant où elle s'était rendue compte que les boucles d'oreilles avaient disparu. Mais elle était bouleversée et avait perdu les pédales. Janet avait prétendu que le Dr Litchfield avait dit qu'elle arrivait à un âge où elle ne pouvait plus faire attention. Cela avait rendu Lois furieuse. Janet avait prévu que Lois serait furieuse et se sentirait coupable ensuite. Elle avait hurlé à son fils et à sa belle-fille de foutre le camp. Janet s'était contentée de rester assise tandis que son fils avait l'air d'avoir envie de disparaître dans un trou de souris. Elle avait juste répondu que quand Lois aurait fini de se débarrasser de tous les vieux poisons qui traînaient dans son organisme alors elle serait prête à écouter des paroles sensées. Lois avait dit quelque chose qui avait fait disparaître le sourire mielleux du visage de Janet. Alors ils étaient partis.

Ralph regarda Lois qui baignait dans une capsule de lumière grise translucide. Elle lui demanda pourquoi il la regardait comme cela et il lui répondit parce qu'elle se souvenait exactement de ce qu’elle avait dit à Janet. Ralph savait qu'elle avait dit à Janet que c'était elle qui avait pris les boucles d'oreilles quand elle avait compris que sa belle-mère ne viendrait pas avec eux. Lois demanda à Ralph comment il pouvait savoir cela. Ralph savait qu'elle avait vu Janet cacher les boucles d'oreilles alors qu'elle-même  était restée dans la cuisine avec son fils. Elle avait vu en Janet à son retour. À présent, Ralph savait tout de Janet. Il avait lu en Lois. Il avait vu que Janet avait pris les boucles d'oreilles dans leur soucoupe et les avait fourrées dans la poche gauche de son jean. Lois avait vu que l'aura de Janet était passée du vert pâle à une série de strates brunes et rouges. C'était cela que Lois avait interprété. Lois demanda à Ralph comment il savait. Il répondit de la même manière qu'elle-même savait des choses. Il demanda depuis combien de temps elle voyait les auras.

4

Lois ne comprenait pas ce que Ralph voulait dire. Elle mentait. Ralph le savait et lui expliqua que ce qu'elle voyait, c'était l'autre partie du monde. C'étaient des formes autour des choses et à l'intérieur des choses, des sons à l'intérieur des sons. Cela rassura Lois car elle croyait qu'elle perdait la tête.

5

Ralph serra Lois dans ses bras. Ralph dit à Lois que Litchfield pensait sans doute qu'elle était atteinte de la maladie d'Alzheimer. Lois avait parlé à Litchfield des couleurs que le médecin avait interprété comme étant des hallucinations. Ralph avait sans questions à poser à lois. Il bandait. C'était tellement inattendu qu’il mit un certain temps à s'en rendre compte. Il expliqua à Lois que ce qu'ils vivaient ce n'était pas la maladie d'Alzheimer ni la sénilité. C'était l'hyperréalité. Il lui parla du pharmacien Plussaj. Il lui expliqua qu'ils avaient la capacité de déchiffrer les auras. Il lui demanda si elle avait eu des gens qui semblaient n'appartenir à aucun groupe de l'espèce humaine. Lois n'en avait pas vu. Lois savait que c'était Ralph qui avait appelé la police car elle l'avait vu grâce aux couleurs. Ralph remarqua que Lois parlait des couleurs au lieu de parler des auras. Deepneau lui aussi parlait des couleurs. Ralph voulait lui parler du sujet réel de sa dispute avec Bill. Et à ce moment-là, doc chauve 3 sorties de la sanisette du parc. Il brandissait son scalpel rouillé.

Chapitre 13.

1

Ralph demanda à Lois si elle pouvait voir doc chauve 3. Elle ne le pouvait pas. Rosalie aboya. Ralph ordonna à doc chauve 3 de laisser la chienne tranquille. Le monstre ignora Ralph. Puis il lui fit un doigt d'honneur et lui montra ses dents pointues. doc chauve 3 se pencha sur Rosalie qui lui lécha les doigts humblement. Soudain, des éclats de lumière blanche et limpide se mirent à danser au-dessus des droits de Ralph. Alors il posa les mains sur les yeux de Lois qui poussa un cri. Quand il retira ses mains, il vit un huit couché tout blanc qui entourait ses yeux comme si elle venait d'enlever des lunettes de plongée pleines de sucre glace. Alors Lois put voir la créature et elle lui ordonna de laisser Rosalie tranquille. Mais doc chauve 3 avait déjà tiré la chienne en partie hors de la réalité ordinaire. Alors Ralph ordonna à Rosalie de s'enfuir. Le monstre allait égorger Rosalie. Ralph demanda à Lois d'utiliser sa main pour tuer le monstre. Doc chauve 3 coupa le panache de Rosalie.

2

Ralph comprit que les docteurs chauves étaient les centurions dont Deepneau avait parlé. À sept ou 8 m au-dessus du sol, le panache de Rosalie disparut simplement dans le néant. La chienne Moury. Ralph se rappela le rêve avec Carolyn avec une cruelle intensité et dut lutter pour ne pas pousser un cri de terreur. D'immondes choses noires giclaient du museau de Rosalie. Doc chauve 3 regardait Rosalie en souriant. Puis il défit le foulard de la chienne et le plaça autour de son propre cou. Ralph prit Lois par les épaules pour l'obliger à le regarder, puis il leva la main droite. Il redressa le pouce et pointe un index vers le nain chauve. Il empoigna la main de Lois et en retira le gant. Lois compris. Elle leva la main et braqua son index. Deux formes oblongues compactes s'élancèrent du bout de ses doigts et doc chauve 3 poussa un cri et sauta en l'air. Lois et envoya une deuxième balle le nain s'effondra sur le sol en hurlant. Au bout de quelques instants, il put se remettre debout. Puis il s'enfuit. Lois avait deviné que le monstre se dirigeait vers le terrain de jeu des enfants. Ralph le rassura. Il était sûr que le monstre ne toucherait pas aux enfants. En dépit de tous les événements qui bousculent la vie de Ralph, une chose lui apparaissait très clairement : il était merveilleux de tenir à nouveau une femme contre soi.

Il repensa au vieux dicton stupide de Dorrance : quand le vin est tiré, il faut le boire. Ralph soupçonnait que rien n'était plus vrai.

3

La chienne n'était pas morte. Elle essayait de se redresser. Puis elle s'enfonça entre les arbres. Loi demanda à Ralph ce que cela voulait dire. Il répondit que la chienne faisait du rab, en ce moment. Lois demanda si le nain était l'un des deux que Ralph avait vu sortir de chez May Locher. Il répondit non. Il lui expliqua qu'il n'en avait vu que trois en tout. Lois invita Ralph à manger chez elle. Elle voulait discuter et Ralph promit de lui dire tout ce qu'il savait. Ralph plongea dans ses pensées ce qui inquiéta Lois. Il se demandait pourquoi Lois n'avait pas vu le panama de Bill que portait le doc chauve. Alors il s'efforça de sourire pour la rassurer.

Il pensait que doc chauve 3 empochait les souvenirs. Pour les deux autres, il ne savait pas. Il pensait que la fille de Lois n'avait plus les boucles d'oreilles. Elle se reprochait sans doute amèrement de les avoir perdues et devait se demander par quelle aberration elle s'en était emparée. Ralph comprit que ce qu'il avait vu briller sur les oreilles de doc chauve 3 étaient les boucles d'oreilles de Lois.

4

Ralph regarda Lois préparer le repas. Elle lui demanda de faire le service.

5

Le repas était délicieux. Après quoi, Lois reprit leur conversations initiale. Elle demanda à Ralph qu'est-ce qu’il lui avait fait pour que les couleurs reviennent. Il n'en savait rien. Il avait agi purement par instinct. Elle avait eu l'impression d'être aux frontières de ce monde et qu'en lui mettant les mains sur les yeux, il l’avait poussée dedans. Ralph appelé ce monde, le monde des auras. Quand Lois avait découvert ce monde, fin juillet, elle était sûre qu'elle était devenue folle mais ne pouvait pas s'empêcher de l'aimer. Ralph comprit que Bill l'avait influencé à propos de Lois. À cause de lui, il avait cru qu'elle était superficielle. Il était surpris parce que Lois voyait les auras depuis l'été dernier. Elle lui demanda si elle avait vraiment tirer sur cette chose avec son doigt. Ralph lui expliqua qu'il avait fait la même chose peu de temps avant de la rencontrer dans le parc. Ils lui racontèrent sa première confrontation avec doc chauve 3. Elle lui demanda d'où leur venait ce pouvoir. Il n'en savait absolument rien. Elle lui demanda de lui raconter son histoire dans la version intégrale. Il commença par lui expliquer que quand il avait compris que sa femme allait mourir, il s'était mis à marcher beaucoup.

6

Il lui raconta tout depuis son intervention entre Deepneau et le gros balèze et terminant sur la dispute après laquelle Bill lui avait conseillé d'aller voir un médecin. Cela soulage Ralph. Comme s'il avait eu des briques empilées sur le coeur et l'esprit et qu'il les retirait une à une.

Il voulut savoir si Lois croyait son récit et tel était le cas. Elle demanda à Ralph si Dorrance pouvait lui aussi voir les auras. Et si quelque chose de cet autre monde lui avait demandé de mettre la bombe lacrymogène dans la poche de Ralph. Ralph n'en savait rien. Mais cela signifiait qu'il existait une entité capable de prédire l'avenir. Et cela lui faisait peur. Lois voulait appeler son ami Simone avec qui elle devait faire une partie de cartes. Elle pensait annuler. Mais Ralph lui conseilla d'y aller. Ralph avait la conviction que doc chauve 3 voulait couper le panache de Lois qui il ne voulait pas qu'elle reste en ville. Ralph avait besoin de réfléchir et il ne pourrait pas le faire de manière constructive tant qu'il ne serait pas raisonnablement certain que Lois était à l'abri pour un moment. Il lui demanda à Calais Ralph comptait revenir. Elle répondit qu'elle serait de retour à 19:00. Alors il lui demanda de l'appeler dès son retour. Elle avait compris que Ralph avait peur que le chauve ne lui fasse du mal. Il voulait s'occuper de cette affaire seul. C'était un ordre. Avant de partir, elle l'embrassa sur le coin des lèvres. Ralph comprit qu'il pourrait faire bien autre chose que parler quand elle reviendrait.

Chapitre 14.

1

Ralph rentra chez lui. Jamais il ne s'était senti aussi bien depuis la mort de Carolyn. Il voulait se raccommoder avec Bill. Un mot avait été agrafé à sa porte. Bill lui annonçait qu'il était allé voir son ami Bob à l'hôpital. Bill présentait également ses excuses à Ralph. Pour se faire pardonner, il lui proposait de manger en sa compagnie. Ralph en fut soulagé. Leydecker lui téléphona. Il lui annonça que Pickering avait été libéré sous caution. Le juge avait fixé la caution à 80000 $. Ralph demanda à Leydecker comment Deepneau avait pu trouver une telle somme. Le policier n'en savait rien. Deepneau avait prétendu avoir vendu des actions. Leydecker pensait que les Amis de la Vie n'étaient pas assez riches pour payer la caution. De plus Deepneau était persona non grata chez eux. Leydecker conseilla à Ralph de faire attention aux Amis de la Vie. Leydecker avait mis Mike Hanlon au courant pour qu'ils veillent attentivement sur Helen. La police surveillait étroitement la bibliothèque. Leydecker proposa à Ralph de le faire protéger par un policier. Ralph refusa. Il prétendit qu'il pouvait s'en sortir tout seul. Leydecker répondit que jusqu'à présent Ralph avait eu de la chance mais qu'il n'aurait peut-être pas autant la prochaine fois. Ralph affirma qu'il pourrait s'en sortir. Alors Leydecker répondit que s'il changeait d'avis il pourrait toujours l'appeler.

2

Ralph décida de proposer à Bill de le retrouver au restaurant Point du jour/Coucher de soleil. Ce serait l'occasion de se rabibocher. Alors il téléphona à l'hôpital.

3

La nièce de Bob lui dit que Bill n'était pas là. Il était parti déjeuner avec quatre de ses anciens collègues. Il lui demanda de prévenir Bill qu'il avait téléphoné. Ralph devina que la nièce de Bob voulait tuer son oncle car elle ne supportait plus de le voir mourant. Une lumière bleue et froide s'élèva en rayons fins depuis les trous de l'écouteur. Ralph comprit que la couleur du meurtre était le bleu.

Il raccrocha. Les auras avaient disparu. Il entendit une voiture pétarader. Ralph hurla.

4

Ralph décida de sortir après ce qui s'était passé au téléphone. Il se rendit à l'aire de pique-nique. Faye avait laissé un mot sur la table qui servait à jouer aux échecs. Ralph le lut.

5

Faye annonçait que Jimmy Vandermee était au plus bas et que ceux qui voulaient lui rendre un dernier hommage étaient invités à le faire à l'hôpital.

Ainsi Bob et Jimmy se trouvaient dans deux chambres contiguës. Et la suivante était la chambre 317 où Carolyn était morte. Ralph pensait que ce n'était pas une coïncidence. Il alla s'asseoir sur le plateau de la table de pique-nique voisine pour réfléchir sur les impressions que lui avait faites les trois docs chauves. Il avait remarqué que le doc aux ciseaux était droitier tandis que celui au scalpel était gaucher. Il se rappela que les docs étaient entourés d'auras d'un beau vert mordoré et laissaient derrière eux des diagrammes de pas de danse. Il lui vint soudain à l'esprit qu'il avait été le témoin de beaucoup d'événements et rien de ce qu'il avait vu ne suggérait le danger ou de mauvaises intentions. Il en conclut que doc chauve 1 et doc chauve 2 étaient très différents de doc chauve 3. Les deux premiers étaient propres tandis que le troisième était sale. Les deux premiers paraissaient sains d'esprit alors que le troisième avait l'air aussi cinglé qu'un rat shooté au crack.

Comme Ralph était le seul à les voir avec Lois ainsi que Deepneau, il en conclut que Deepneau devait être lui aussi insomniaque. Ralph repensa à plusieurs phrases qu'il avait entendues. Lois lui avait dit que dans sa famille, mourir à 80 ans, c'était mourir jeune. Plussaj lui avait dit qu'on pouvait mourir de l'insomnie ; Bill lui avait dit que Bob qui avait été spécialiste de la guerre de sécession ne savait même plus ce qu'était une guerre civile. La nièce de Bob avait dit qu'un médecin accoucheur qui mettrait du temps à couper le cordon ombilical d'un nouveau-né pourrait être sanctionné. Alors, ce fut comme si un projecteur puissant venait brusquement de s'allumer dans la tête de Ralph et il poussa un cri.

6

Ralph passa le reste de l'après-midi sur le porche de la maison à attendre Lois. Il fallait qu'il récupère le chapeau de Bill ainsi que les boucles d'oreilles de Lois. Il regarda les gens dans la rue. Il pouvait distinguer la couleur de leurs auras qui trahissaient leurs humeurs. Quelque chose lui disait qu'il avait aperçu la pointe d'un iceberg d'énergie d'une telle puissance et d'une telle vitalité qu'il réduisait toutes les armes nucléaires mises au point depuis 1945 à des pétards allumés par des gamins. C'était une énergie suffisante pour détruire l'univers ou pour en créer un nouveau.

7

Ralph se prépara à manger. La sensation de profonde fatigue qui avait pesé sur lui depuis le milieu de l'été avait entièrement disparu. Il se sentait plein d'une énergie maniaque. Il ne se doutait pas que les cheveux dans lesquels il passait la main s'étaient épaissis et qu'on y voyait des fils noirs, pour la première fois depuis cinq ans. Il mangea presque gloutonnement.

Il contempla Harris avenue avec une satisfaction qu'il n'avait pas éprouvée depuis des années. Les auras réapparurent. Mme Perrine marchait dans l’avenue. Elle avait une aura grise mais quelques points plus sombres luisaient à hauteur de son ventre. Ralph la salua. Elle constata qu'il portait toujours la même chemise sur un ton de reproche. Elle lui rappela qu'elle lui avait proposé de recoudre sa chemise. Puis elle reprit sa marche. Ralph arrondit la main en cornet autour de sa bouche puis il inhala vivement, ce qui produisit un sifflement à peine perceptible. Le résultat fut stupéfiant. Une lumière grise en trait de crayon jaillit de l'aura de Mme Perrine. Cette lumière s'allongea rapidement puis s'enfonça dans le tube formé par la main de Ralph. Ralph eut l'impression d'avaler de l'énergie à l'état pur. Il peut voir des rais de lumière, aussi gris qu'un brouillard chargé d'électricité, fumer depuis l'extrémité de ses doigts. La sensation de puissance que ressentir Ralph fut suivie par un sentiment de honte et d'horreur stupéfaite.

Mme Perrine se retourna et lui demanda s'il n'avait entendu un bruit ressemblant à un coup de fusil. Il répondit non. Elle remarqua qu'il semblait plus jeune. Il la remercia. Elle lui demanda de faire attention au gilet qu'il avait emprunté à Bill. Il répondit que son ami aurait été bien inspiré de prendre mieux soin de son chapeau. Comme Mme Perrine ne comprenait pas il lui expliqua que Bill avait perdu son chapeau. Elle lui conseilla de rentrer chez lui. Ralph se sentait comme un vampire car il avait volé la force vitale de Mme Perrine. La raison principale qui avait empêché ses amis de le pousser à consulter un médecin était son air bien portant. Les gens n'arrêtaient pas de lui parler de sa bonne mine. Il se demanda s'il avait déjà dérobé la force vitale des gens sans s'en rendre compte. Il se demanda si les centurions n'étaient pas des voleurs de force vitale.

Chapitre 15.

1

A 19:20, Lois arriva. Ralph et Lois brûlaient l'un pour l'autre. Elle tendit un doigt vers lui et un rayon de force étroit, d'un gris brillant, apparut à l'extrémité des doigts de Lois. Ralph braqua lui aussi l'index et un rayon bleu en jaillit. Les deux fins pinceaux de lumière se rejoignirent et s'entortillèrent. Il passa un bras autour de la taille de Lois et l'embrassa.

2

Ralph buvait un café dans la cuisine de Lois. Elle paraissait avoir rajeuni de 10 ans. Cela impressionnait Ralph. Elle se rendit compte. Elle lui dit qu'ils avaient trouvé la fontaine de jouvence. Elle lui demanda de se regarder dans la glace. Elle lui félicita d'avoir changé sa chemise.

3

Ralph se regarda dans la glace. Des mèches noires avaient réapparu dans sa chevelure. Les poches de ses yeux avaient disparu. Il n'y avait plus de rides sur ses lèvres. L'usure de ses dents semblait avoir disparu. Il se rappela ce que Deepneau lui avait dit. Il lui avait confié que des créatures sinistres, assassinaient des bébés et avaient envahi Derry. Deepneau pensait que toutes les lignes de force avaient commencé à converger à Derry. Lois dit à Ralph que ses amies n'avaient pas arrêté de la fixer et elle avait dû leur raconter qu'elle avait trouvé un nouveau maquillage. Elle pensait que si le rajeunissement continuait, elle devrait quitter la ville avec Ralph. Elle avait dû raconter à ses amis qu'elle venait de rencontrer un homme. Elle voulait un ami car elle souffrait de la solitude. Alors Ralph l'enlaça.

4

Lois lui avait parlé de sa partie de cartes. Elles étaient une douzaine à jouer chaque semaine pour de petits enjeux.

Cet après-midi, elle n'avait pas réussi à perdre. Ses amies n'arrêtaient pas de lui poser des questions pour savoir comment elle avait rajeuni. Malgré cela, elle avait gagné car elle avait pu deviner les pensées de ses amies grâce à leurs auras. Pendant la dernière heure, elle avait fait exprès de perdre pour ne pas se faire détester. Ralph lui rapporta comment Mme Perrine était passée pendant qu'il mangeait il expliqua ce qu'il avait fait à la vieille dame. Lois avait fait exactement la même chose avec son amie Mina. Elle avait juste tendu les lèvres et avait aspiré un gros nuage de la force vitale de son amie. Mina avait senti comme une morsure. Lois pensait que c'était eux les centurions. Ralph l'embrassa. Il était rassuré que Lois ressente la même chose que lui. Il pensait qu’ils ne devaient pas recommencer pour ne pas créer une dépendance. Tout à coup, il y eu un choc assourdi et des grincements de frein. La chienne avait été écrasée par une voiture. C'était celle de Plussaj. Soudain, Ralph se sentit de retour en juillet 1992 avec Carolyn agonisant et Deepneau en proie à d'inquiétants démons.

5

Doc chauve 3 était adossée au coffre de la fort de Plussaj. Lois étaient sur le point de s'évanouir. Doc chauve 3 les regarda et leur fit un pied de nez. Doc s'approcha du pharmacien. Loi supplia Ralph de l'arrêter. Ralph leva la main et envoya un rayon de lumière bleue qui traversa la vitre.. Doc sortit un objet de la poche du pharmacien qui se désolait sur le sort de la chienne. Il avait dérobé un peigne.

Chapitre 16.

1

Lois avait pleuré à la mort de Rosalie. Ralph n'avait pas pu prévenir le pharmacien du danger qu'il courait. Il ne voulait pas que Plussaj le prenne pour un fou. Ralph proposa à Lois d'aller à l'hôpital avec lui pour voir Bob et Bill. Ralph raconta à lois le mot qu'il avait trouvé sur la table de l'aire de pique-nique. Il lui fit remarquer l'étrange conjonction des chambres d'hôpital où se trouvaient Bob, Jimmy et où s'était trouvée Carolyn. Lois pensait que ce ne pouvait pas être une coïncidence.

2

Ralph se demandait ce que Lois avaient pensé du fait que doc chauve 3 avait volé le peigne de Plussaj. Il gara à la voiture dans le parking de l'hôpital. Il remarqua que Lois avait pleuré à cause de la mort de Rosalie. Mais il fut frappé par l'étendue de la transformation qu'elle avait subie depuis le matin où il l’avait trouvée en sanglots sur le banc du parc. Son fils et sa belle-fille auraient pris la poudre d'escampette s'ils avaient pu la voir. Elle lui demanda pourquoi il l’avait emmenée dans ce parking. Il répondit qu'il était à la recherche des deux autres docs chauves. Ralph avait compris quel était le rôle des docteurs chauves grâce à quelque chose que lui avait dit la nièce de Bob. Elle avait dit que si un médecin accoucheur prenait autant de temps pour couper le cordon ombilical d'un nouveau-né, il serait poursuivi pour faute professionnelle. Cela avait rappelé à Ralph les trois soeurs grecques responsables du cours de la vie de tous les êtres humains. L'une d'elles filait le fil, l'autre décidait de sa longueur et la troisième coupait le fil. La troisième s'appelait Atropos. Lois comprit le rapport avec les panaches. Mais dans la mythologie grecque, les trois soeurs étaient du même côté. Ralph pensait que seuls deux des trois docs chauves formaient une équipe. Mais le troisième était différent. C'était un voyou. Lois avaient vu doc chauve 3 prendre le peigne de Plussaj et elle avait reconnu le chapeau de Bill sur sa tête. Alors elle comprit ce que Ralph voulait lui expliquer.

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